M. Denis Sommer attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur les mutations profondes vers lesquelles s'engagent les constructeurs automobiles français à travers leurs projets stratégiques « usines du futur ». Ces transformations toucheront notamment les plates-formes de production, qui deviendront multi-modèles et multi-marques, ainsi que les temps de travail (« lundi au lundi », 24h/24) au sein des sites d'assemblage. Elles interrogent donc les capacités d'adaptations de l'ensemble de la filière, des grands équipementiers aux nombreux fournisseurs PME-PMI de second rang. Ces derniers doivent pouvoir investir, se réorganiser, dégager des marges leur permettant d'amortir les efforts à consentir et de répondre aux attentes de leurs clients. Or, et sous réserve des dispositions à venir du projet de loi-cadre PME-PMI que le ministre de l'économie et des finances présentera au printemps 2018, ces capacités d'adaptation sont à ce jour hautement diminuées par les pratiques usuelles de la filière. Outre les pressions qui sont faites parfois sur les PME-PMI sous-traitantes pour les inviter à délocaliser vers des pays du sud et de l'est de l'Union européenne au nom du not best land in cost, les acheteurs imposent systématiquement à leurs fournisseurs des target price qui font fondre les marges, empêchent l'élaboration de stratégie de développement industriel à moyen et long terme et favorisent les entreprises qui sacrifient la qualité des produits livrés pour maintenir leurs marges. Par ailleurs, les clients imposent souvent aux PME-PMI les sociétés où acheter leurs matières premières et le prix de ces dernières. Or la matière première représente 90 % du prix d'une pièce manufacturée dans les PME-PMI métallurgiques de la filière automobile. La pression à la baisse des prix ne peut alors porter que sur la marge brute, c'est-à-dire sur la valeur ajoutée, ce qui fragilise considérablement les fournisseurs de la filière lors des renversements de conjoncture. Cette contrainte usuelle prive les fournisseurs de la maîtrise du prix et de la qualité des matières premières qu'ils usinent. Enfin, l'attention du ministre de l'économie et des finances est attirée sur la très contestable pratique des marges arrières, aussi dite « productivité additionnelle » ou quick saving, qui consiste en un ticket d'entrée à payer aux clients pour en devenir fournisseur. Cette pratique de droit d'entrée peut représenter jusqu'à 1 % du chiffre d'affaires réalisé sur un produit par le fournisseur, comptabilisé sous forme de ristourne, sachant que le résultat de ces entreprises est voisin de 2 % dans le meilleur des cas. Elle est contestable dans son impact économique, dans son opacité, voire dans sa légalité puisque qu'elle constitue une distorsion indirecte de la vérité des prix et des marchés. Il lui demande quelles dispositions il entend prendre à l'égard de ses pratiques. Il l'interroge sur les mesures d'accompagnement qui doivent permettre la réussite des projets « usines du futur » et sur les orientations à proposer à la concertation en amont de la prochaine loi-cadre PME-PMI qu'il présentera.
La plate-forme filière automobile et mobilités porte une attention particulière à cet enjeu stratégique, au travers de ses enquêtes annuelles de « performance industrielle » et de « qualité des relations client fournisseur ». Elle apporte un soutien méthodologique aux dirigeants de PME-PMI sous forme de guides méthodologiques, voire un accompagnement au travers de diagnostics individualisés en matière de compétitivité industrielle. Les pratiques évoquées par l'auteur de la question s'inscrivent dans le cadre de relations commerciales donneur d'ordre sous-traitant, que l'État n'a pas vocation à réguler strictement. Les situations contestables peuvent être portées à la connaissance du centre de médiation de la filière. Pour mémoire, la loi du 9 décembre 2016 encadre les délais de paiement entre professionnels. Dans le cadre des travaux préparatoires au projet de loi-cadre sur les PME-PMI, devant être présentée au printemps 2018, plusieurs dispositions visant à dynamiser le potentiel de croissance des entreprises sont envisagées, notamment la transformation du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi en allègement de cotisations sociales et la réduction du taux de l'impôt sur les sociétés à 25 % d'ici 2022.
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