M. Christophe Jerretie attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse sur la reconnaissance des troubles anxieux scolaires. Chaque année, après avoir essayé de nombreuses méthodes adaptées et, en dernier recours, certains traitements par médicaments, de nombreux élèves souffrant de phobie scolaire sont contraints d'être déscolarisés pour ne pas dégrader dangereusement leur état de santé mentale et physique. Subie par des milliers d'enfants, la déscolarisation est souvent le dernier recours pour leur offrir une chance d'étudier. La déscolarisation n'est pas un choix mais une incontournable nécessité qui survient après avoir épuisé les options proposées par le système éducatif actuel. Cette déscolarisation est subie et non choisie par les enfants et leurs accompagnateurs. Pour le bien-être de ces enfants, une reconnaissance officielle des troubles anxieux scolaires par l'État et l'éducation nationale apparaît comme nécessaire. Or le projet de loi pour une école de la confiance, dans sa rédaction actuelle, manque de précisions quant aux méthodes pouvant être mises en place afin d'aider les personnes souffrant de phobie scolaire. Cette reconnaissance, comme handicap fortement invalidant, par les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) ou dans les futurs pôles inclusifs d'accompagnement localisés (PIAL), pourrait permettre d'aider ces enfants en difficulté à pouvoir bénéficier d'un régime scolaire qui leur serait plus adapté. Il souhaiterait donc savoir si le ministère envisage la reconnaissance de ces troubles par les MDPH ou les PIAL, et si ces troubles peuvent également être inscrits dans les conditions de dérogation d'octroi du centre national d'enseignement à distance (CNED). Enfin, plus généralement, il souhaiterait connaître les nouvelles mesures qui seront prises pour mieux accompagner les enfants atteints de phobie scolaire pour qu'ils puissent, un jour, retrouver les bancs de l'école.
La direction générale de l'enseignement scolaire (DGESCO) connaît et prend en compte la problématique des troubles scolaires anxieux, en augmentation depuis quelques années. Dans le cadre du recueil annuel des données de santé concernant les visites médicales systématiques et à la demande, la rubrique « troubles scolaires anxieux » a été ajoutée, depuis l'année scolaire 2016-17, dans les motifs d'assistance pédagogique à domicile (APAD) et de projet d'accueil individualisé (PAI). À titre d'exemple, sur l'académie de Lille pour l'année scolaire 2017-18, les « troubles scolaires anxieux » représentent 195 des 899 élèves ayant bénéficié d'une APAD et 26 des 62 élèves ayant bénéficié du Centre national d'enseignement à distance (CNED) réglementé. Sur la même année, dans l'académie de Dijon, 154 PAI sur les 6862 répertoriés concernent des « troubles scolaires anxieux ». Sur un département moyen comme l'Indre-et-Loire, en 2016, une centaine de jeunes étaient connus comme étant pris en charge pour cette problématique. Par ailleurs, l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) réalise une étude sur le phénomène nommé par certains « phobie scolaire » dans le cadre d'une recherche citoyenne et participative à destination des familles. Lorsque la famille et les professionnels se mobilisent conjointement, il est tout à fait possible de rescolariser normalement la plupart de ces élèves. Les médecins de l'éducation nationale sont sollicités depuis quelques années pour accompagner ces jeunes en refus scolaire anxieux. Souvent ce sont eux qui établissent le diagnostic après avoir reçu l'élève et sa famille, et pris en compte son contexte scolaire. Ils adressent ensuite le jeune pour soin à un pédopsychiatre avec lequel ils évaluent au fil de l'évolution le degré de rescolarisation souhaitable. Chaque situation est étudiée au cas par cas, il n'existe pas de réponse unique. Pour prévenir l'installation durable des troubles, il n'est pas souhaitable d'ancrer le refus scolaire anxieux dans le champ du handicap. Il existe des dispositifs pour prendre en charge les enfants ayant ce type de troubles. Par ailleurs, les troubles anxieux scolaires peuvent toutefois aboutir à une situation de handicap et relèvent dans ce cas d'un accompagnement dans le cadre de l'école inclusive. Les dispositifs mis en place par l'éducation nationale pour les troubles anxieux scolaires passent par les projets d'accueil individualisés (PAI), comme pour tout problème de santé. La circulaire n° 2003-135 du 8 septembre 2003 qui les organise est en cours de réécriture, avec une publication prévue sur l'année 2019-20, notamment afin de mieux répondre à ce type de besoins des élèves. Il s'agit de repérer les symptômes le plus tôt possible, de sensibiliser et former les personnels des équipes éducatives et d'éviter la déscolarisation ou de rescolariser le plus rapidement possible. En effet, la déscolarisation aggrave le retrait social et les difficultés. Cependant, une rescolarisation sans soin est souvent vouée à l'échec. De nombreux médecins conseillers techniques départementaux se sont emparés de cette problématique et insistent sur la nécessité d'un soin approprié parallèlement à la démarche de rescolarisation, dès le début des symptômes. Pendant la phase de rescolarisation, qui est progressive, une assistance pédagogique « à domicile » (c'est-à-dire sur tout lieu où l'élève malade peut bénéficier d'un enseignement) peut être proposée. La circulaire APAD, également en cours de réécriture, devrait être étendue comme dispositif d'accompagnement pédagogique à domicile, à l'hôpital et à l'école. L'APAD est accessible et proposé aux élèves qui en ont besoin, dans un souci d'accompagnement optimal et d'équité. Il est parfois nécessaire de le commencer dans un lieu neutre en dehors de l'école, comme par exemple dans une bibliothèque municipale, si possible avec un enseignant de la classe pour favoriser le lien et le retour, puis au sein de l'établissement dans une pièce isolée par exemple et enfin en complément d'un retour partiel en classe. En quelques semaines ou mois, le jeune va pouvoir reprendre l'ensemble de ses cours en classe tout en poursuivant le soin autant que de besoin. Dans les cas sévères ou diagnostiqués tardivement il faut parfois 2 ans pour ce résultat. Dans les cas les plus complexes, une hospitalisation peut être nécessaire, avec un recours à des dispositifs plus lourds comme le soin-études. Le CNED peut être envisagé pour accompagner temporairement l'élève lorsque la scolarisation ordinaire est impossible. Il est recommandé d'avoir recours au CNED partiel et non au CNED complet afin de maintenir d'emblée un lien entre l'élève et l'école. Le CNED partiel pourra compléter les aides mises en place dans le cadre du PAI. Enfin, le pôle inclusif d'accompagnement localisé (PIAL) est un dispositif permettant un accompagnement par aide humaine des élèves en situation de handicap pour développer leur autonomie et faciliter leur acquisition de toutes les connaissances et les compétences du socle commun. Dans les cas de troubles scolaires anxieux les plus sévères associés à d'autres troubles handicapants, l'élève peut bénéficier de ce dispositif si la MDPH estime que l'aide d'un accompagnant des élèves en situation de handicap (AESH) s'avère pertinente. Les équipes pédagogiques et les personnels ressources que sont les psychologues, les infirmiers et les médecins de l'éducation nationale, bien sensibilisés à ce sujet, sont les mieux placées pour trouver, avec la famille et l'élève, l'accompagnement le plus adapté. Des guides académiques sur le refus scolaire anxieux et la plateforme « Cap école inclusive » qui intègrera cette dimension prochainement, sont à leur disposition pour les aider à répondre aux besoins particuliers des élèves.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.