Mme Catherine Osson interroge M. le ministre de l'éducation nationale sur l'extension de la liste des langues et cultures régionales enseignées. Depuis la circulaire n° 2001-166 du 5 septembre 2001, l'éducation nationale a soutenu l'apprentissage de langues vivantes régionales et la connaissance des cultures qu'elles portent, contribuant ainsi à transmettre un patrimoine national qu'il convient de connaître, de préserver et de faire vivre. L'introduction d'un article 75-1 dans la Constitution par la loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008 portant modernisation des institutions de la Ve République, aux termes duquel « les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France », a confirmé la volonté institutionnelle d'œuvrer pour la préservation et la valorisation des langues régionales. La loi n° 2013-595 du 8 juillet 2013 d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République a réaffirmé que, « les langues et cultures régionales appartenant au patrimoine de la France, leur enseignement est favorisé prioritairement dans les régions où elles sont en usage » et que « cet enseignement peut être dispensé tout au long de la scolarité ». La liste de ces langues et cultures régionales aujourd'hui reconnues se cantonne au basque, au breton, au catalan, au corse, au créole, au gallo, à l'occitan-langue d'oc, aux langues régionales d'Alsace, aux langues régionales des pays mosellans, au tahitien, aux langues mélanésiennes (drehu, nengone, païci, aïje) ainsi qu'au wallisien et au futunien. Ainsi, aucune des langues régionales des Hauts-de-France ne sont reconnues, alors même qu'elles font partie intégrante du patrimoine culturel et participent au rayonnement de la région, en France et à l'étranger. À titre d'exemple, le picard est utilisé, selon les départements historiques d'implantation, par 10 à 25 % de la population - soit un taux similaire au basque ou au breton dans leurs zones linguistiques respectives. Langue européenne, reconnue comme langue régionale endogène par la Fédération Wallonie-Bruxelles, le picard possède un patrimoine littéraire et une pratique d'écriture remontant au Moyen-Âge. Figurant parmi les langues considérées comme « sérieusement en danger » parmi les 6 000 langues menacées d'extinction recensées par l'UNESCO, le picard a connu un regain d'intérêt évident auprès de la jeunesse, laquelle aspire à faire vivre ce patrimoine culturel face aux mutations économiques et culturelles à l'œuvre dans la région, comme en témoigne la constitution d'un nombre croissant d'associations et spectacles patoisants depuis 2000, l'engouement pour le film « Bienvenue chez les Ch'tis » sorti en 2008, et plus récemment, le succès de la vidéo « Être Ch'ti », publiée par le youtubeur et humoriste Norman (plus de 7 millions de vues en un mois) en septembre 2017. Aussi, elle souhaite connaître sa position sur ce sujet, et sa disposition à étendre, au picard notamment, la liste des langues et cultures régionales pouvant être enseignées au titre de l'article L. 312-10 du code de l'éducation.
Le ministère de l'éducation nationale est attaché à la préservation et à la transmission des diverses formes du patrimoine linguistique et culturel des régions françaises. La circulaire n° 2017-072 du 12 avril 2017 a rappelé cet attachement ; elle contient, en outre, la liste des langues vivantes qui font l'objet d'un enseignement de langue et culture régionales de l'école primaire au lycée. L'inscription d'une langue dans cette liste n'est toutefois pas un préalable à leur présence dans le parcours scolaire des élèves, mais plutôt l'aboutissement d'une introduction progressive. Conformément à l'article L. 312-10 du code de l'éducation, qui dispose que les modalités de cet enseignement facultatif sont « définies par voie de convention entre l'État et les collectivités territoriales », ce sont les académies d'une aire linguistique concernée, en lien avec les collectivités, qui peuvent décider, dans le cadre de leur politique académique des langues vivantes, d'introduire une langue et de lui ménager telle ou telle place, sous différentes formes, dans la scolarité des élèves. La création de l'enseignement d'une langue vivante régionale nécessite, au préalable, une expertise scientifique et pédagogique. Une grande variabilité dialectale, l'absence de standardisation, de norme et de stabilité linguistiques et graphiques, ou encore la faible production de littérature contemporaine dans la langue concernée sont autant de limites pour envisager un enseignement à l'école. Cependant, la sensibilisation à la langue et à la culture picardes peut, dès à présent, trouver place à l'école à de nombreuses occasions et dans des configurations diverses. Cette sensibilisation peut ainsi intervenir en classe, durant le temps scolaire, dans le cadre de plusieurs enseignements, notamment l'histoire, les enseignements artistiques et l'histoire des arts, ou encore le français. Selon les termes de l'article L. 312-11 du code de l'éducation, les professeurs des premier et second degrés peuvent « recourir aux langues régionales, dès lors qu'ils en tirent profit pour leur enseignement. Ils peuvent également s'appuyer sur des éléments de la culture régionale pour favoriser l'acquisition du socle commun de connaissances, de compétences et de culture et des programmes scolaires ». Cette possibilité paraît particulièrement riche de potentialités en cours de français : d'une part, en raison de la proximité linguistique du picard et du français ; d'autre part, en raison de la valeur patrimoniale de la littérature en langue picarde, particulièrement de l'époque médiévale. A l'école primaire, la sensibilisation à la langue et à la culture picardes peut aussi faire l'objet d'activités éducatives et culturelles complémentaires conduites durant le temps périscolaire, en lien par exemple avec des associations locales bénéficiant d'un agrément pour intervenir en milieu scolaire.
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