M. Philippe Latombe interroge M. le ministre des solidarités et de la santé sur l'annulation des décrets des actes exclusifs IBODE par le Conseil d'État. Près de quatre ans et demi après l'attribution de l'exclusivité de la réalisation de certains actes par les infirmiers de bloc opératoire (IBODE), le Conseil d'État vient d'annuler dans une décision du 30 décembre 2021, les textes successifs organisant ce dispositif. Annulés au motif d'un « excès de pouvoir », ces décrets portaient sur diverses mesures relatives aux actes des IDE de bloc opératoire, ainsi qu'au retrait d'enregistrement d'organismes ou structures de DPC des professions de santé. La saisine avait été faite en parallèle par la FMF et le SML, ainsi que par la FHP-MCO, l'UCDF et le Bloc. Cette décision enjoint également au Premier ministre « d'adopter les mesures transitoires permettant d'assurer le bon fonctionnement des services de chirurgie jusqu'à ce que le nombre de titulaires du diplôme d'État d'infirmier de bloc opératoire soit suffisant et, à tout le moins, jusqu'au 31 décembre 2025 ». Le Conseil d'État souligne par ailleurs l'insuffisance du dispositif transitoire qui avait été mis en place et qui n'a permis ni de prévenir le risque d'atteinte au bon fonctionnement des blocs opératoires et aux conditions d'exercice en bloc opératoire des IDE, ni de préserver les professionnels du risque juridique. Il annule donc les mesures transitoires en vigueur et demande au Gouvernement leur réécriture dans un délai de 4 mois pour assurer la sécurité juridique d'exercice des IDE et la continuité de soins au bloc opératoire. Les mesures transitoires devaient permettre la formation par les employeurs depuis 2015, date d'entrée en vigueur des actes exclusifs, d'un grand nombre d'IBODE favorisant l'application pleine et entière des actes, afin d'optimiser la sécurité et la qualité des soins pour les patients au bloc opératoire. Or ni la FHP, ni les chirurgiens libéraux adhérents de l'UCDF n'ont tenu leurs engagements comme le rappelle le Conseil d'État dans son avis. Bien au contraire, leur objectif semblait plutôt de faire abroger le décret sous prétexte du manque d'IBODE dans les blocs opératoires, cette stratégie d'économie permettant d'utiliser du personnel infirmier non diplômé IBODE, donc à moindre coût et de les emprisonner dans un statut professionnel sans possibilité d'évolution. De son côté, le Collectif Inter Blocs propose d'instaurer une formation diplômante en alternance pour les IDE de bloc opératoire dans le cadre des mesures transitoires. Elle n'aurait pas pour objectif de se substituer à la formation classique déjà en place mais de faciliter l'accès à la formation à la spécialisation IBODE aux IDE éligibles aux MT, sans mettre en difficulté les employeurs. Cette proposition répond à l'injonction faite au Premier ministre par le Conseil d'État et entrerait dans le cadre de la formation continue avec possibilité d'utiliser le compte personnel de formation (CPF) (conformément à la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel). Elle est adaptée aux IDE en fonction de leur expérience au bloc opératoire et personnalisée afin qu'ils puissent tous bénéficier à terme d'une formation complète portant au moins sur les chirurgies socles détaillées dans cette proposition. Les stages seraient effectués dans des structures privées ou publiques. Dans un contexte où il est vivement reproché à la politique de santé de ces trente dernières années d'avoir privilégié une approche strictement comptable de la santé au détriment de l'intérêt des malades, il souhaite savoir comment le Gouvernement envisage de se conformer à l'avis du Conseil d'État.
Pour rappel, les travaux du Ségur de la Santé portant sur les rémunérations se sont concrétisés avec la mise en œuvre du complément de traitement indiciaire en 2020, permettant une augmentation des rémunérations de 183 euros net chaque mois, ainsi que la finalisation des travaux de refonte des grilles indiciaires. Les infirmiers de blocs opératoires diplômés d'Etat (IBODE) ont ainsi été reclassés dans une nouvelle grille le 1er octobre 2021 et ont bénéficié d'un gain moyen de 79 euros brut par mois et d'un déroulement de carrière plus intéressant. A titre d'illustration, à terme, ces évolutions représentent un gain de 577 euros net chaque mois pour un IBODE en fin de carrière ou 250 euros net pour un IBODE avec 5 ans d'ancienneté. Le ministre des solidarités et de la santé a réuni les représentants des IBODE le 10 janvier 2022 pour partager les conclusions du rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) sur le bilan de la mise en œuvre de la pratique avancée, des protocoles de coopération et les pistes d'évolution envisageables. La question de l'élargissement des compétences des IBODE nécessite un travail de fond qui doit être engagé avec l'ensemble des acteurs dans les prochains mois. Le ministre a réaffirmé l'engagement qui a déjà été pris de revoir la formation IBODE pour la porter au niveau Master et de finaliser les travaux qui sont déjà en cours pour aller vers l'universitarisation de la formation en préservant néanmoins les spécificités de la formation aujourd'hui délivrée dans les écoles de formation. Ce temps d'échange a été l'occasion de revenir sur la décision du Conseil d'Etat du 30 décembre 2021 qui a décidé d'une annulation partielle et a fait injonction au Gouvernement d'adopter, dans un délai de quatre mois, de nouvelles dispositions réglementaires transitoires en vue de permettre l'accomplissement des actes relevant de la compétence exclusive des IBODE par un nombre suffisant d'infirmiers diplômés d'Etat exerçant au sein des blocs opératoires et le bon fonctionnement de ceux-ci dans des conditions qu'il lui revient de déterminer, pour assurer le respect du principe de sécurité juridique. Il convient de préciser que les autorisations d'exercice délivrées restent valides. Néanmoins, le ministère des solidarités et de la santé devra autoriser l'exercice des 10 actes exclusifs et, d'autre part, ouvrir une nouvelle fenêtre de dépôt des dossiers de candidatures pour régulariser la situation des faisant fonction IBODE (FFIBODE). A la demande du ministre, la direction générale de l'offre de soins a mis en place des concertations avec l'ensemble des acteurs concernés pour déterminer un dispositif opérationnel et consensuel, dans le calendrier déterminé par le Conseil d'Etat. Un groupe de travail sera réuni très prochainement pour partager les contributions de l'ensemble des parties prenantes et construire les modalités de la reconnaissance des actes exclusifs des IBODE. En outre, le ministre des solidarités et de la santé a annoncé à la profession l'octroi aux IBODE d'une nouvelle bonification indiciaire de 13 points (49 euros nets) aujourd'hui réservée aux infirmiers en soins généraux aux blocs opératoires. La spécificité et technicité de l'exercice des IBODE doivent en effet être reconnues au travers de cette bonification. Ces travaux traduisent l'engagement du Gouvernement pour la reconnaissance de cette profession majeure dans notre système de santé.
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