M. Patrick Mignola attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur les difficultés rencontrées par les élus de Savoie face à l'occupation illégale de terrains publics et privés par les gens du voyage. La loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage impose aux communes de plus de 5 000 habitants et aux établissements publics de coopération intercommunale exerçant la compétence d'aménagement, d'entretien et de gestion des aires d'accueil une obligation d'organisation de l'accueil des gens du voyage sur leurs terrains respectifs. Malgré la mise à disposition de camps familiaux, d'aires de passage et d'aires de grands passages sur les agglomérations d'Aix-les-Bains et de Chambéry, de plus en plus de communes de la région de Savoie se retrouvent confrontés à la recrudescence d'installations illégales de campements de gens du voyage. Les situations se répètent et ne manquent pas de susciter de vifs mécontentements, notamment chez les agriculteurs qui ont récemment organisé des manifestations pour lutter contre ces occupations illégales. Les élus ne disposent pas systématiquement du concours de la force publique pour faire évacuer les lieux. Il lui demande donc de prendre toutes les mesures de nature à seconder efficacement les collectivités territoriales concernées lorsqu'elles sollicitent la mise en œuvre de la procédure d'évacuation des terrains illégalement occupés.
L'évacuation d'un campement illicite de gens du voyage, sur un terrain public ou privé, est strictement encadrée par la loi. Elle relève soit de la procédure administrative, soit de la procédure juridictionnelle. Dans l'une ou l'autre des procédures, l'autorisation ou le refus du concours de la force publique revient, in fine, au préfet. La procédure administrative consiste, une fois l'occupation illicite constatée (sous réserve du respect du schéma départemental par la commune ou l'établissement public de coopération intercommunale, de la prise d'un arrêté général d'interdiction de stationnement en dehors des aires aménagées et du constat d'un risque d'atteinte à la salubrité, sécurité ou tranquillité publiques), à informer le préfet qui, dans un délai minimum de 24 heures, délivre aux occupants une mise en demeure de quitter les lieux. Les occupants ont un délai de 24 heures à compter de la notification de la mise en demeure pour faire un recours auprès du juge administratif. Ce recours a un caractère suspensif. Le juge administratif dispose alors d'un délai de 48 heures pour statuer. Ainsi, en l'absence de recours des occupants, l'évacuation forcée peut avoir lieu dans le meilleur des cas sous 48 heures. Si les conditions légales de la procédure administrative ne sont pas remplies, la procédure juridictionnelle peut être mise en œuvre auprès du juge des référés (administratif ou judiciaire selon qu'il s'agisse d'un terrain public ou privé). Le juge des référés est alors saisi par la collectivité ou le propriétaire privé. Après avoir désigné un huissier qui relève les identités, il statue dans les meilleurs délais (laissé à l'appréciation du juge). Une fois l'ordonnance d'expulsion prise, l'huissier saisit le préfet en vue d'obtenir le concours de la force publique. L'évacuation forcée peut donc prendre plusieurs jours, voire plusieurs semaines. En parallèle de l'évacuation, l'article 322-4-1 du code pénal permet à la collectivité ou le propriétaire privé de déposer plainte dans une brigade de gendarmerie ou un commissariat de police pour l'occupation illicite. En effet, ce texte sanctionne « le fait de s'installer en réunion, en vue d'y établir une habitation, même temporaire sur un terrain appartenant soit à une commune qui s'est conformée aux obligations lui incombant du fait du schéma départemental d'accueil des gens du voyage ou qui n'est pas inscrite à ce schéma, soit à tout propriétaire autre qu'une commune, sans être en mesure de justifier de son autorisation ou celle dutitulaire du droit d'usage du terrain ». Cette disposition du code pénal ne permet pas l'évacuation du campement illicite mais offre la possibilité à l'officier de police judiciaire, sous le contrôle du procureur de la République, de saisir les véhicules automobiles utilisés pour commettre l'infraction, à l'exception des véhicules destinés à l'habitation, en vue de leur confiscation par la juridiction pénale. Ainsi, en l'état actuel du droit, les forces de sécurité intérieure ne sauraient légalement procéder d'initiative à l'évacuation d'un campement illicite de gens du voyage, même à la demande des élus. Néanmoins, avant même que la procédure soit initiée, la gendarmerie sur sa zone de compétence (ZGN) reste un partenaire privilégié des élus et de la population pour les conseiller dans la procédure à suivre. Concernant le cas du département de la Savoie, les aires d'accueil, complétées par les sites réquisitionnés, permettent de répondre globalement au besoin, notamment sur le bassin de Chambéry qui est de loin le plus impacté en période estivale. En effet, le schéma d'accueil des gens du voyage 2012-2018 a été révisé le 9 juillet 2015 pour la période 2015-2018. Quatre aires de grands passages sont nécessaires au lieu de deux dans le précédent schéma. Elles sont de taille plus réduite, mais offrent une plus grand diversité d'installation, plus en rapport avec la fréquentation, la taille des groupes et les contraintes foncières constatées. En outre, il existe deux aires de grands passages temporaires alors que plusieurs terrains sont réquisitionnés chaque année en période estivale sur 3 communes. L'engagement de la gendarmerie est systématique à chaque étape : prise de contact, rédaction du renseignement administratif constatant le trouble à l'ordre public, notification de l'arrêté de mise en demeure ou accompagnement de l'huissier selon le type de procédure engagée, notification de la décision du tribunal administratif, intervention. Pour que la procédure aboutisse effectivement à l'emploi de la force publique, il faut cependant réunir les conditions suivantes : - que toutes les voies de recours engagées soient épuisées ; - qu'une unité de force mobile soit disponible ; - que le site soit encore occupé au moment de l'engagement. Ainsi entre février et août 2017 en ZGN, l'emploi de la force n'a pas été rendu nécessaire, les gens du voyage quittant systématiquement les lieux occupés, parfois même la veille de l'intervention. Il est malgré tout constaté une augmentation de près de 70 % du nombre des interventions par rapport à l'année précédente (39 contre 23). Cela démontre que les forces de sécurité intérieure sont aux côtés des élus et des particuliers ou exploitants concernés.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.