M. Bernard Perrut attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale sur la tentation de la radicalisation religieuse chez les lycéens issus des quartiers populaires au moment où une étude du CNRS observe une inquiétante tentation pour la radicalité notamment chez les jeunes de confession musulmane. En effet, avec ses 7 000 lycéens de 14 à 16 ans interrogés, cette enquête démontre une adhésion de ces jeunes français aux idées radicales dans des proportions inquiétantes. Selon cette étude, un quart des lycéens ne condamne pas totalement les attentats contre Charlie Hebdo et le Bataclan, 80 % estiment qu'on ne doit pas se moquer des religions, un tiers pense qu'il est légitime de s'engager dans une action violente pour défendre son point de vue. Aussi il semble nécessaire qu'un véritable dialogue soit engagé dans les établissements scolaires afin de lutter contre la prégnance des idées radicales chez les jeunes issus de milieux modestes, et il lui demande les actions qu'il entend mettre en place, dans le respect de la religion de chacun, pour promouvoir la laïcité et les valeurs de la République dans les écoles, collèges et lycées.
Le ministère de l'Education nationale met en place une prévention renforcée de la radicalisation, dans le cadre d'une politique interministérielle pilotée par le secrétariat général du comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (SG-CIPDR). Le rôle de l'École a été réaffirmé dans la nouvelle phase de prévention de la radicalisation initiée par le plan d'action contre la radicalisation et le terrorisme (PNPR) « Prévenir pour protéger », présenté par le Premier ministre le 23 février 2018. Ce plan se déploie autour de mesures, qui associent pleinement les acteurs de l'éducation nationale concernés par la prévention primaire en milieu scolaire et contribuent à « renforcer les défenses des élèves », à « défendre les valeurs de l'École républicaine » et à « renforcer le contrôle de la scolarisation en établissements d'enseignement hors contrat et de l'instruction dans la famille ». D'autres mesures portent sur la prévention secondaire et favorisent la « fluidification de la détection dans l'ensemble des établissements scolaires ». Au sein des territoires, les référents académiques et départementaux de prévention de la radicalisation mettent en œuvre cette politique, qui se décline à travers quatre axes : la prévention primaire, le repérage et le signalement, le suivi et la formation des personnels. En janvier 2015, un livret « prévenir la radicalisation des jeunes » a été diffusé aux recteurs d'académie. Il présente les signaux d'engagement dans l'extrémisme violent et les procédures de signalement aux autorités compétentes. Il a été diffusé à tous les chefs d'établissement en novembre 2015. Une version actualisée sera diffusée au premier trimestre de l'année 2018-2019, en rappelant une attention particulière aux trajectoires d'élèves en voie de radicalisation ou en risque de l'être. Au sein de l'établissement scolaire, conformément au guide interministériel de prévention de la radicalisation, le chef d'établissement préside une cellule de veille pluricatégorielle, qui a vocation à déterminer les situations qui doivent être transmises à la cellule préfectorale de prévention et d'accompagnement des familles (CPRAF). Les enseignements constituent des leviers essentiels pour contrer la propagande des groupes de radicalisation violente : - l'enseignement moral et civique (EMC) qui pose les règles de vie fondamentales dans un État de droit ; - l'éducation aux médias et à l'information (ÉMI), qui participe au développement de la construction de la pensée critique ; - l'approche de l'histoire des idées et des faits religieux, qui permet d'appréhender la complexité du monde, en particulier les enjeux géopolitiques. Le développement des plans « devoirs faits » et « mercredi », plus particulièrement dans les quartiers sensibles, permettent de mieux accompagner les élèves dans leurs apprentissages sur les temps scolaires et périscolaires. Enfin, pour accompagner les personnels d'encadrement face à ce phénomène complexe et multifactoriel, le ministère a construit un plan national de formation : - le premier séminaire (mars 2015) avait pour objet de prendre en compte tous les aspects de la prévention de la radicalisation et de présenter le cadre interministériel ; - le deuxième séminaire (novembre 2015) a axé son contenu sur la prévention de la radicalisation et des dérives sectaires, avec l'éducation comme levier de prévention ; - le troisième séminaire (janvier 2016) a porté sur le contexte géopolitique, l'utilisation des indicateurs pour le repérage des jeunes vulnérables et la construction des formations en académie ; - le quatrième séminaire (novembre 2016) avait pour objectifs de renforcer la coordination des acteurs (institutionnels, associatifs) et la synergie entre le secteur de la santé et l'éducation nationale pour une prise en charge globale du jeune. Ces séminaires ont fait l'objet de déclinaisons académiques. Enfin, quatre séminaires interacadémiques se sont tenus pour l'année 2017-2018. Leur objectif est de renforcer l'opérationnalité de la prise en charge partenariale des situations de jeunes radicalisés ou en risque de l'être en milieu scolaire. Par ailleurs, le site « les valeurs de la République » de Réseau Canopé, à destination des personnels enseignants et d'éducation, mis en ligne depuis avril 2017, propose des clés de compréhension du phénomène et des pistes de développement de l'esprit critique. L'ensemble des axes de cette politique de prévention de la radicalisation violente est présenté sur la page dédiée du portail Eduscol, qui offre également un aperçu global des ressources pédagogiques et éducatives à destination des enseignants. En matière de laïcité, afin d'assurer un soutien à chaque personnel constatant une difficulté d'application de la laïcité, le ministère de l'éducation nationale s'est doté d'un nouveau dispositif. Organisé en trois niveaux, ce dispositif mobilise au service des écoles et des établissements des expertises complémentaires aux niveaux national et académique. Le Ministre a renforcé le dispositif avec la création, cette année, d'un conseil des sages de la laïcité, composé d'experts et placé auprès du Ministre, qui précise une doctrine claire et commune pour l'institution scolaire en matière de laïcité et de fait religieux. Ce conseil des sages est chargé de répondre aux sollicitations de l'équipe nationale « laïcité et fait religieux ». L'équipe nationale laïcité et fait religieux, placée sous l'autorité de la secrétaire générale du ministère, regroupe les directions du ministère. Elle met en œuvre la doctrine, anime et soutient le réseau des coordonnateurs des équipes académiques laïcité et fait religieux. Dans chaque académie, une équipe laïcité et fait religieux placée sous la responsabilité du recteur est chargée d'accompagner les écoles et établissements en leur apportant une réponse concrète en cas d'atteinte au principe de laïcité. L'équipe académique laïcité et fait religieux réunit des expertises disciplinaire, éducative, et juridique. Autour du référent académique laïcité, elle compte parmi ses membres le conseiller technique de recteur pour les établissements et la vie scolaire, le chef du service juridique et le directeur des ressources humaines notamment. Proposant une expertise des situations, l'équipe intervient à la demande du chef d'établissement ou du directeur d'école en appui des équipes éducatives, que ce soit en situation d'urgence ou en accompagnement à plus long terme. Elle définit au niveau académique une stratégie d'intervention et de formation auprès des personnels à l'échelle de l'établissement et du territoire académique. Un cahier des charges des équipes académiques laïcité et fait religieux définit les principes, les objectifs, les missions et le fonctionnement des équipes, pour gérer les situations urgentes, prévenir les atteintes à la laïcité, recenser et analyser les situations rencontrées. Un vade-mecum « La laïcité à l'école » a été diffusé en juin 2018. Il constitue un référentiel de situations pour les équipes académiques et les établissements. Elaboré conjointement par les directions du ministère de l'Education nationale, il présente des fiches pratiques qui abordent le respect de la laïcité par les élèves, les personnels, les parents d'élèves et les intervenants extérieurs et proposent une analyse juridique et des conseils éducatifs et pédagogiques pour une application unifiée du principe de laïcité. Une boîte aux lettres « atteinte à la laïcité » a été mise en place, également en juin 2018, à l'attention des personnels qui désirent faire part d'une situation ou d'une difficulté d'application de la laïcité. Ils seront mis en contact si besoin avec l'équipe académique « laïcité et fait religieux ».
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