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Stéphane Demilly
Question N° 8014 au Secrétariat d'état aux personnes handicapées


Question soumise le 1er mai 2018

M. Stéphane Demilly attire l'attention de Mme la secrétaire d'État, auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées, sur l'inquiétude des responsables d'établissements en charge de l'emploi durable des personnes en situation de handicap en France. Ils dénoncent les rapports publiés ces dernières années ainsi que les déclarations des pouvoirs publics considérant leur action comme « insuffisamment inclusive ». Ils considèrent en effet que le Gouvernement exerce une pression trop forte pour accélérer l'inclusion en milieu ordinaire et que cette « inclusion à marche forcée » comporte des risques : une mauvaise prise en compte des besoins des personnes, une perte de leurs droits et de leurs acquis en termes de vie sociale et de statut. Par ailleurs, depuis quatre ans, aucune place nouvelle n'a été créée dans les ESAT - établissements et services d'aide par le travail, ce qui est de nature à renforcer les inquiétudes. Pourtant, ces établissements, qui n'ont cessé de se réformer, permettent d'offrir un accès à la citoyenneté et à la vie sociale. Ils sont aujourd'hui bien insérés dans le secteur médico-social et représentent des solutions efficaces à l'insertion, ou à la réinsertion professionnelle des personnes en situation de handicap. Pour que la société soit la plus équitable possible, elle doit être en mesure de moduler ses actions en tenant compte de la situation de chaque individu. L'ensemble des acteurs agissant pour l'emploi des personnes en situation de handicap sont ainsi des leviers fondamentaux qui concourent à la co-construction d'une société inclusive. Il lui demande donc les mesures qu'elle entend prendre afin de soutenir le travail mené par les ESAT et entreprises adaptées.

Réponse émise le 20 novembre 2018

En ce qui concerne les établissements et services d'aide par le travail (ESAT), les réflexions et travaux en cours visent en effet à rendre le travail protégé plus inclusif. Cet objectif d'inclusion des personnes handicapées, notamment par le travail, est prescrit par la convention de l'ONU sur les droits des personnes handicapées. Il induit une réflexion autour de la transformation de l'offre médico-sociale sans toutefois remettre en cause la mission originelle des ESAT d'accompagnement de personnes souvent très éloignées de l'emploi, ni le statut sui generis de ces personnes : « travailleurs » au sens du droit de l'Union européenne, (CJUE 26 mars 2015 Affaire FENOLL), « usagers et non salariées » au sens du droit français (confirmation dans la même affaire FENOLL par la chambre sociale de la Cour de cassation le 16 décembre 2015), mais bénéficiant de droits issus du code du travail et adaptés à leur propre situation, en particulier en matière de formation afin de favoriser leur inclusion et de les préparer à des mobilités professionnelles. La politique publique concernant les ESAT s'inscrit pleinement dans la stratégie quinquennale de l'évolution de l'offre médico-sociale pour les personnes en situation de handicap (2017-2021), précisée par le Comité interministériel du handicap du 2 décembre 2016, dans le cadre de la démarche « une réponse accompagnée pour tous ». La rénovation engagée par les pouvoirs publics repose sur six principes : partir des besoins et des attentes des personnes handicapées et de leurs aidants, promouvoir leurs capacités et leur participation, favoriser une vie en milieu ordinaire lorsque cela est possible et conforme aux souhaits de la personne, répondre à la logique d'un « parcours » global alliant précocité des interventions et renforcement de l'inclusion sociale, répondre à des besoins spécifiques et parfois complexes, en fonction du type de handicap, et enfin, anticiper, prévenir et gérer les ruptures de parcours. La construction d'un parcours professionnel cohérent, fluide, sans rupture et au plus près des souhaits et des capacités de la personne handicapée suppose un décloisonnement du milieu ordinaire et du milieu protégé de travail et, dans cette perspective, les ESAT sont un des leviers de l'inclusion. Pour les usagers qui le peuvent, l'admission dans ce type d'établissement doit être regardée comme une étape d'un parcours professionnel inclusif, c'est-à-dire un parcours favorisant à terme une insertion durable en milieu ordinaire de travail. C'est dans cette perspective que le dispositif d'emploi accompagné a été introduit dans le code du travail par l'article 52 de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnel. Ouvert aux travailleurs handicapés d'ESAT, ce dispositif comporte un accompagnement médico-social et un soutien à l'insertion professionnelle. Les actions mises en œuvre sont développées en complémentarité et en articulation avec les actions existantes pour l'emploi des personnes handicapées sur les territoires desquels ils sont implantés (actions des Cap emploi-Sameth, de l'Agefiph, du FIPHFP…). L'ensemble s'inscrit dans le cadre du plan régional d'insertion des travailleurs handicapés (PRITH). Cet accompagnement présente trois grandes évolutions par rapport aux dispositifs déjà existants. En premier lieu, il bénéficie à la personne en situation de handicap tout au long de son parcours professionnel, au moment de sa recherche d'emploi mais également lorsqu'elle est en poste. Ensuite, il bénéficie à la fois à la personne en situation de handicap et à son employeur, lorsque elle est en poste. Enfin, il associe les acteurs du médico-social et les acteurs de l'emploi, que ce soit au niveau de la mise en œuvre du dispositif (l'organisme gestionnaire doit signer une convention avec un organisme médico-social et un opérateur du service public de l'emploi) ou de son pilotage (dispositif piloté par les Agences régionales de santé, en lien étroit avec l'État, l'Agefiph et le FIPHFP). A ce jour, 53 structures ont été retenus dans les appels à candidatures lancés par les ARS fin 2017, 18 sont des ESAT. Ce dispositif contribuera à favoriser la sortie d'ESAT pour les usagers qui le peuvent et devrait, en conséquence, avoir une incidence sur le taux de sortie aujourd'hui inférieur à 5 % notamment par défaut d'accompagnement durable. Les places ainsi libérées permettront d'accompagner un nombre plus important d'adultes en situation de handicap. Enfin, depuis le mois de février 2018, le gouvernement a engagé un chantier de rénovation de la politique de l'emploi des travailleurs handicapés dont le second cycle de concertation engagé au mois de juillet dernier a pour objectif l'amélioration de la lisibilité de l'offre de service pour les bénéficiaires, la meilleure articulation entre dispositifs de droit commun et dispositifs spécifiques et l'instauration d'une logique d'accompagnement à long terme. Une nouvelle feuille de route sur les ESAT va être définie dans ce contexte, avec la volonté de mobiliser des leviers susceptibles de soutenir une dynamique de développement et d'adaptation de l'offre existante dans une approche plus souple et plus inclusive, qui tienne compte des savoirs-faire et de l'expertise du réseau des ESAT, afin de mieux répondre aux besoins des personnes et de leurs proches. D'ores et déjà, l'article 1er de la loi "Pour la liberté de choisir son avenir professionnel" du 5 septembre 2018 renforce le régime juridique et financier du compte personnel de formation des travailleurs handicapés en ESAT qui entrera en application à compter du 1er janvier 2019. Par ailleurs, le Gouvernement soutient pleinement les entreprises adaptées qui jouent un rôle essentiel pour les personnes handicapées les plus éloignées de l'emploi. Ainsi, le jeudi 12 juillet dernier, a été signé, l'engagement national « Cap vers l'entreprise inclusive 2018-2022 » avec l'union nationale des entreprises adaptées (UNEA), l'APF handicap et l'UNAPEI. L'objectif de cet engagement est de promouvoir un véritable changement d'échelle des entreprises adaptées et de renforcer leur cadre d'intervention, dans une optique toujours plus inclusive. L'Etat et ses co-signataires s'engagent réciproquement à : - créer 40 000 emplois supplémentaires pour les personnes en situation de handicap d'ici 2022 ; - moderniser le modèle des Entreprises Adaptées : une optique plus inclusive, un accroissement de la performance économique et une moindre dépendance aux aides de l'Etat ; - déployer "Cap vers l'entreprise inclusive" via plusieurs expérimentations pour faciliter les trajectoires professionnelles, les passerelles entre entreprises adaptées et autres employeurs publics et privés ; - accompagner la transformation par un effort budgétaire sans précédent : les différentes aides publiques seront portées à 500 millions d'euros par an d'ici à 2022. Le nouveau cadre juridique permettant la mise en oeuvre de cet engagement est porté par la loi "pour la liberté de choisir son avenir professionnel" qui a été publiée le 5 septembre 2018.

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