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Denis Masséglia
Question N° 9367 au Ministère de l'agriculture


Question soumise le 19 juin 2018

M. Denis Masséglia appelle l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur les mesures économiques et de relance à mettre en place suite au constat national de surmortalité massive des colonies d'abeilles. Ces dernières semaines, les représentants de la filière apicole ont largement informé et interpellé le ministre de l'agriculture ainsi que celui de la transition écologique et solidaire, à propos des phénomènes de surmortalités massives de colonies d'abeilles qui touchent l'ensemble du territoire national sans aucune exception et ce, qu'il s'agisse d'apiculteurs professionnels, de petits producteurs, ou de ruchers école. Les constats sont dramatiques, tant sur le plan humain, économique et écologique et ils sont d'une telle envergure, qu'il convient, pour le Gouvernement de réagir avec des mesures efficaces tant au niveau vétérinaire, qu'environnemental, qu'économique. Ces phénomènes de surmortalité récurrents depuis de très nombreuses années, ne sont pas inconnus. Cette situation a amené le ministère de l'agriculture à mettre en place, un dispositif d'observatoire des mortalités et des affaiblissements des abeilles (OMAA) sur deux régions: Bretagne (région très fortement touchée) et Pays de la Loire. Déjà décrié par le passé en raison de ses nombreuses faiblesses, et compte tenu cette année de l'étendue du désastre, cet outil ne correspond plus en moyens humains et techniques à l'ampleur des pertes. Limité à deux régions, il est totalement insuffisant et inadapté pour répondre aux attentes des milliers d'apiculteurs sinistrés. Des enquêtes internes au sein de la filière ont été mises en place dans les départements sur l'initiative de GDS apicoles ou au niveau national par le syndicat SNA. Les résultats sont édifiants avec des taux de mortalités dépassant les 90 % chez certains producteurs. La France consomme environ 40 000 tonnes de miel et n'en produit plus aujourd'hui qu'à peine le tiers ! Pourtant, il y a vingt ans, la production française de miel dépassait les 30 000 tonnes annuelles. La filière apicole française aurait la possibilité de produire à nouveau ces milliers de tonnes de miel qu'il faut importer au détriment de l'équilibre de notre balance commerciale. Permettre et aider au retour de ce niveau de production en France créeraient rapidement plusieurs milliers d'emplois directs et induits, essentiellement positionnés dans le milieu rural et participeraient ainsi positivement à l'aménagement du territoire. Face à une telle situation, il appelle son attention sur les mesures suivantes qu'il conviendrait d'étudier sérieusement : tout d'abord, apporter un soutien financier immédiat aux apiculteurs économiquement touchés en activant toutes les mesures et dispositions possibles : ensuite de créer un fonds calamités agricoles dans les départements, compléter par des aides régionales, les fonds européens ; faciliter l'accompagnement bancaire avec des avances de trésorerie à taux zéro. Enfin, pour relancer la filière apicole, il conviendrait que l'apiculture devienne une activité classée économiquement « franche » et bénéficie ainsi des différentes mesures d'exonérations. Le budget nécessaire à ce sauvetage serait minime en regard de l'économie réalisée. Il lui demande de lui indiquer ses intentions à ce sujet.

Réponse émise le 4 décembre 2018

Plusieurs organisations apicoles ont fait état de surmortalités de colonies d'abeilles particulièrement marquées en sortie d'hiver 2017-2018 dans plusieurs régions françaises. Face à cette situation, le ministère de l'agriculture et de l'alimentation a mis en place un dispositif d'aide exceptionnel pour les apiculteurs impactés. Ce dispositif soutient le renouvellement du cheptel apicole à travers une aide forfaitaire de 80 € par essaim acheté. Les apiculteurs éligibles sont ceux ayant plus de 50 ruches, ayant subi une mortalité hivernale de plus de 30 % de leur cheptel et procédé à un traitement anti-varroa. Les demandes d'aides ont pu être réalisées en ligne sur le site de FranceAgriMer jusqu'au 7 novembre 2018. Afin de répondre au besoin de trésorerie des apiculteurs touchés, une avance sera versée pour toute demande effectuée. Les apiculteurs auront ensuite jusqu'au 30 juin 2019 pour réaliser les achats d'essaims et transmettre les factures à FranceAgriMer. Une enveloppe totale de trois millions d'euros est ainsi dédiée au dispositif. Certains conseils régionaux, ayant mis en place un dispositif d'aide exceptionnelle similaire, ont été consultés pour assurer une bonne coordination des dispositifs. Le ministère de l'agriculture et de l'alimentation a par ailleurs demandé à ses services d'organiser un état des lieux précis des mortalités sur l'ensemble du territoire national. Les premiers résultats de l'enquête menée auprès des apiculteurs français durant l'été 2018 ont été présentés le 24 octobre 2018 au comité d'experts apicole du conseil national d'orientation de la politique sanitaire animale et végétale et sont disponibles sur le site de la plateforme nationale d'épidémiosurveillance en santé animale (https://www.plateforme-esa.fr/). Le taux moyen de mortalité des colonies d'abeilles à l'échelle nationale durant l'hiver 2017-2018 est estimé à 29,4 %. Pleinement conscient des difficultés sanitaires rencontrées par la filière apicole depuis plusieurs années, le ministère de l'agriculture et de l'alimentation travaille au renforcement des dispositifs visant, par la prise en compte de tous les facteurs de stress dont les produits phytosanitaires et les biocides, à objectiver et comprendre les mortalités et affaiblissements des colonies d'abeilles : - la rénovation du dispositif de surveillance des mortalités massives aiguës des abeilles engagée depuis plusieurs mois avec la filière sera poursuivie. Une première actualisation a été opérée par note de service en juin 2018. Ce dispositif a pour objectif d'identifier d'éventuels mésusages ou effets non intentionnels de produits chimiques (produits phytopharmaceutiques, biocides, médicaments vétérinaires) ; - le déploiement dans de nouvelles régions de l'observatoire des mortalités et des affaiblissements de l'abeille mellifère, déployé en Bretagne et Pays de la Loire depuis le début de cette année, sera accéléré. La phase d'investigation sera améliorée au vu des premiers retours d'expérience. Elle bénéficiera de l'expertise d'une cellule d'appui au diagnostic. L'État financera des analyses toxicologiques quand d'autres causes manifestes des mortalités n'auront pas été mises en évidence. Ce dispositif doit notamment permettre de mieux objectiver la situation du cheptel apicole. L'amélioration sanitaire du cheptel apicole français nécessite également une lutte efficace, par tous les apiculteurs, contre le parasite varroa destructor. Le ministère de l'agriculture et de l'alimentation invite la filière apicole à définir rapidement une stratégie nationale collective de lutte qui soit à la hauteur des enjeux. En ce qui concerne la réduction de l'impact des produits chimiques et des produits phytopharmaceutiques en particulier, la loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages interdit l'utilisation des produits de la famille des néonicotinoïdes à compter du 1er septembre 2018. Toutefois des dérogations pourront être accordées jusqu'au 1er juillet 2020 par arrêté conjoint des ministres chargés de l'agriculture, de l'environnement et de la santé. Elles devront se fonder sur un bilan établi par l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) comparant les bénéfices et les risques liés aux usages des produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives néonicotinoïdes avec ceux liés aux usages de produits de substitution ou aux méthodes alternatives disponibles. L'avis et le rapport de l'Anses « risques et bénéfices relatifs des alternatives aux produits phytopharmaceutiques comportant des néonicotinoïdes » sont parus le 30 mai 2018. Les éventuelles dérogations seront décidées sur la base des conclusions de ce rapport, des évolutions et de l'encadrement de ces molécules au plan européen. En effet, des restrictions complémentaires ont été votées fin avril 2018 au niveau communautaire, visant trois néonicotinoïdes (clothianidine, imidaclopride et thiaméthoxame) et restreignant leur usage uniquement sous serre, avec application effective le 19 décembre 2018. Par ailleurs, le thiaclopride a été récemment classé reprotoxique (R1) par l'ECHA (agence européenne compétente). Enfin, le plan d'actions gouvernemental sur les produits phytopharmaceutiques et une agriculture moins dépendante aux pesticides a été présenté le 25 avril 2018. Il prévoit, parmi les mesures destinées à préserver l'environnement, un renforcement du dispositif réglementaire de protection des abeilles et autres insectes pollinisateurs. Il repose actuellement sur différentes dispositions de l'arrêté du 28 novembre 2003 relatif aux conditions d'utilisation des insecticides et acaricides à usage agricole en vue de protéger les abeilles et autres insectes pollinisateurs, de l'arrêté du 13 janvier 2009 relatif aux conditions d'enrobage et d'utilisation des semences traitées et de l'arrêté du 7 avril 2010 relatif à l'utilisation des mélanges extemporanés de produits phytopharmaceutiques. Ce dispositif transversal vient en complément des conditions d'emploi spécifiques à chaque produit, qui sont précisées dans l'autorisation de mise sur le marché délivrée à l'issue de l'évaluation des risques du produit, incluant l'évaluation des risques pour les pollinisateurs. À la lumière des nouvelles données scientifiques, l'Anses a été saisie pour formuler des propositions d'évolution de ce cadre réglementaire.

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