M. Stéphane Demilly interroge M. le ministre de l'économie et des finances sur le statut des baux commerciaux, inadapté aux problématiques des commerçants en milieu rural. Les petits commerçants notamment en milieu rural ont des difficultés à avoir un chiffre d'affaires qui leur permette de couvrir toutes leurs charges y compris les achats de marchandises, les charges fiscales, sociales, le loyer et percevoir une rémunération. Certains de ces commerces n'ont pas de visibilité à trois ans sur leurs perspectives commerciales. Cela s'accentue avec les nouvelles concurrences du e-commerce, des super et hyper-marchés en zone rurale ou périphérique, des actes d'achat proche du lieu de travail des consommateurs. Les commerçants ont souvent signé un bail commercial qui les lie au propriétaire du local sur une période de 3, 6, 9 ans avec possibilité de dénonciation tous les 3 ans moyennant un délai de prévenance de 6 mois en respectant un certain formalisme. À l'issue de la période triennale le locataire commerçant n'a pas le choix, soit il a dénoncé le bail commercial 6 mois avant le début de la période triennale, soit il est engagé de nouveau pour une durée de 3 ans. Dans la pratique, la situation financière de l'entreprise peut se détériorer et l'entrepreneur peut ne plus pouvoir se rémunérer. Il est cependant contraint de poursuivre son activité jusqu'à la fin de la période triennale afin de payer le loyer à son propriétaire, ou d'attendre d'accumuler les dettes pour déclarer son état de cessation de paiement et liquidation judiciaire. Certains propriétaires de murs commerciaux acceptent une rupture anticipée à l'amiable mais il faut l'accord des deux parties : locataire et propriétaire du local. Il lui demande donc d'étudier la possibilité d'une rupture anticipée pour tous les commerçants pour raison économique avant la fin de la période triennale.
Le statut du bail commercial est protecteur du locataire commerçant ou artisan. La loi n° 2014-826 du 18 juin 2014 relative à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises a introduit plusieurs dispositions visant à rééquilibrer les relations entre bailleurs et locataires et à favoriser la pérennité des commerces de proximité. L'évolution des loyers des baux commerciaux et la possibilité de transférer certaines charges incombant normalement au bailleur vers le locataire ont été encadrées de manière renforcée. Alors que le bail commercial a une durée égale ou supérieure à neuf ans et peut prendre fin de façon anticipée par résiliation à l'expiration de chaque période triennale, il existe des régimes plus souples qui permettent de déroger au statut des baux commerciaux, le bail de courte durée et la convention d'occupation temporaire. La loi n° 2014-826 du 18 juin 2014 précitée a assoupli le régime du bail de courte durée en allongeant sa durée maximale de deux à trois ans. Le bail de courte durée permet aux parties d'organiser librement leurs relations locatives, à l'exception de la durée du bail qui ne peut être supérieure à trois ans. Le bail de courte durée est souvent présenté comme « un bail à l'essai ». Le locataire peut ainsi éviter de s'engager à long terme et tester la rentabilité d'une activité, ce qui présente un intérêt, tout particulièrement dans la période actuelle d'incertitude pour le commerce. Rien n'interdit aux parties de prévoir des clauses de rupture anticipée du bail en fonction de certaines circonstances. A l'expiration du bail (initial ou renouvelé), le locataire n'a aucun droit au renouvellement et il doit quitter les lieux sans pouvoir prétendre à une quelconque indemnité, sauf si les parties décident de prolonger le bail au-delà de la période légale de trois ans, auquel cas le nouveau bail est soumis au statut des baux commerciaux. Cette faculté permet ainsi aux parties de transformer une période probatoire en période durable. La convention d'occupation temporaire échappe également au statut des baux commerciaux. Sa durée et son terme sont déterminés par une cause indépendante de la seule volonté des parties. Les outils à la disposition des locataires et bailleurs sont donc suffisamment nombreux et souples. C'est la raison pour laquelle la proposition d'introduire dans le statut des baux commerciaux une faculté générale de rupture anticipée d'un bail pour raison économique avant la fin de la période triennale ne paraît ni nécessaire ni souhaitable. Ce nouveau cas de rupture pourrait au demeurant être source de contentieux et d'insécurité dans les relations entre les bailleurs et les locataires.
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