COMMISSION D'ENQUÊTE CHARGÉE D'ÉVALUER LES RECHERCHES, LA PRÉVENTION ET LES POLITIQUES PUBLIQUES À MENER CONTRE LA PROPAGATION DES MOUSTIQUES AEDES ET DES MALADIES VECTORIELLES
Jeudi 18 juin 2020
La séance est ouverte à quatorze heures.
(Présidence de Mme Sereine Mauborgne, vice-présidente de la commission d'enquête)
La commission d'enquête chargée d'évaluer les recherches, la prévention et les politiques publiques à mener contre la propagation des moustiques Aedes et des maladies vectorielles procède à l'audition de M. Charles Giusti, adjoint au directeur général des Outre‑Mer.
Mes chers collègues, nous achevons aujourd'hui notre session d'audition de la commission d'enquête chargée d'évaluer les recherches, la prévention et les politiques publiques à mener contre la propagation des moustiques Aedes et des maladies vectorielles.
Nous allons entendre M. Charles Giusti, adjoint au directeur général des Outre-Mer, qui remplace le directeur général des Outre-Mer, qui a eu une indisponibilité.
Pendant cinquante ans, nous avons vécu dans l'illusion que les maladies causées par les moustiques étaient le problème des seuls territoires ultramarins. Cependant, l'épidémie de dengue en cours aux Antilles, à La Réunion et à Mayotte montre que les maladies vectorielles restent d'abord un enjeu de santé publique dans ces territoires.
Monsieur le directeur général, je vous souhaite la bienvenue et je vous remercie de prendre le temps de répondre à notre invitation au nom de la direction générale des Outre-Mer (DGOM).
Je vais vous passer la parole pour une intervention liminaire d'une dizaine de minutes qui précédera notre échange sous forme de questions et réponses. Je vous remercie également de nous déclarer tout intérêt public ou privé de nature à influencer vos déclarations.
Auparavant, je vous rappelle que l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires impose aux personnes auditionnées par une commission d'enquête de prêter serment.
M. Giusti prête serment.
Je voulais commencer mon propos liminaire en indiquant que la direction générale des outre-mer (DGOM) n'a pas de compétence particulière en matière de santé et de salubrité dans les territoires ultramarins.
Il y a un ministère sectoriel compétent, celui des Solidarités et de la Santé, et nous n'avons pas créé, au sein de la direction générale des Outre-Mer, une compétence-miroir qui serait totalement adaptée aux outre-mer.
Cela ne veut pas dire que la DGOM ne s'intéresse pas aux questions sanitaires. Si je dois résumer en quatre axes ce que fait la DGOM sur ce champ, il s'agit d'abord d'un suivi de la situation sanitaire des territoires ultramarins, en liaison avec le ministère de la Santé et des Solidarités, notamment en participant à la réunion hebdomadaire de sécurité sanitaire. Nous suivons la situation des différents territoires, ne serait-ce que pour pouvoir éventuellement intervenir et agir pour que les moyens nécessaires puissent être alloués aux territoires concernés.
Le deuxième axe, qui vaut pour la santé, mais aussi de manière générale pour l'action de la DGOM, consiste à veiller à ce que les problématiques ultramarines soient prises en compte par les ministères sectoriels. En l'occurrence, nous prenons garde à ce que la situation spécifique de ces territoires, la situation épidémiologique et les pathologies qui peuvent exister dans certains territoires soient bien prises en compte dans les politiques de santé.
Pour ce qui est du troisième axe, nous accompagnons certains dispositifs permettant de réduire les risques sanitaires. Je ferai un focus sur ce point-là, sur le plan véhicules hors d'usage, que nous accompagnons en liaison avec le ministère de la Transition écologique et solidaire.
Enfin, tout en étant rattachés au ministère des outre-mer, sur lequel nous avons un regard particulier, nous validons les interventions du service militaire adapté (SMA) dans les territoires. Ils sont assez régulièrement appelés en renfort pour intervenir et porter assistance aux populations, mais plus spécifiquement dans la lutte anti-vectorielle.
Pour évoquer plus spécifiquement le rôle du SMA, je commencerai par la fin.
En interne, une organisation structurelle existe dans chaque région, c'est le comité de lutte anti moustique, constitué sous l'autorité du commandant en second de chaque régiment, avec le médecin et les représentants de chaque unité du régiment. Cette organisation mène des actions de prévention, avec l'information des personnels et de leurs familles, d'identification et d'élimination des zones de gîtes larvaires au sein des emprises de chaque régiment, ainsi que de traitement chimique des zones à risque. Des séances d'information peuvent aussi être conduites sur les protections individuelles à adopter.
Il s'agit de l'action sectorielle des régiments du service militaire adapté.
Ils sont donc régulièrement mobilisés sur des demandes de concours. En 2018, trente‑trois militaires ont été mobilisés à La Réunion sous la coordination de l'agence régionale de santé (ARS) pendant deux mois ; en 2019, quarante militaires et une dizaine de véhicules ont été mobilisés sur deux mois, toujours à La Réunion et en 2020, il y a eu deux interventions, l'une de trente militaires mobilisés pour la destruction de gîtes larvaires sur la commune de Mtsamboro à Mayotte et l'autre de vingt militaires mobilisés pendant deux semaines en appui de l'ARS de la Guadeloupe, toujours pour une campagne de lutte anti-vectorielle en Grande-Terre et à Marie-Galante.
Voilà pour ce qui est de l'intervention du SMA.
Cela me permet d'évoquer un point qui figure dans le questionnaire qui m'a été adressé, à savoir comment assurer une sensibilisation des populations. Effectivement, dans certains territoires, il est important de pouvoir s'adapter à la culture et éventuellement aux langues qui sont parlées usuellement dans le cercle familial, pour pouvoir passer des messages de sensibilisation.
Le SMA, ne serait-ce que par l'intermédiaire de ces volontaires stagiaires qui sont vraiment issus de la population, peut assurer ces fonctions de communication. La formation des jeunes stagiaires comprend des actions de prévention, que ce soit en matière de conduites sexuelles ou d'addictions, mais aussi de santé. Ce qui permet non seulement d'informer ces jeunes, mais aussi de les sensibiliser pour que cela puisse être diffusé dans le cercle familial.
Plus récemment, lors de la crise du Covid-19, les volontaires stagiaires ont été renvoyés chez eux pour le confinement, mais avec une formation préalable pour pouvoir sensibiliser le cercle familial aux gestes barrières et aux mesures de protection individuelle.
À Mayotte, nous avons constitué des patrouilles d'information avec de jeunes volontaires techniciens qui pouvaient aller dans les villages et dans les villes, pour communiquer sur les gestes barrières.
Je vais faire un focus sur le plan véhicule hors d'usage. Je ne sais pas si, lors de vos auditions, vous avez eu l'occasion d'avoir des informations sur le sujet.
En 2016, les constructeurs automobiles ont proposé un plan d'action volontaire en outre-mer pour pouvoir traiter le sujet des véhicules hors d'usage (VHU) dans les territoires. C'est une obligation de gestion de leur part. Il s'agissait à l'époque de traiter un objectif d'environ 72 000 véhicules hors d'usage.
Je cite cela parce que ce sont typiquement des objets qui peuvent constituer des gîtes larvaires.
En 2016, cette initiative des constructeurs a été accompagnée sous le pilotage du ministère de la Transition écologique et solidaire (MTES). Un accord-cadre a été signé en octobre 2018 avec les vingt et un plus grands constructeurs automobiles mondiaux, avec des objectifs assez volontaristes puisqu'ils voulaient traiter 23 000 véhicules en 2019. La réalité est moins importante que cela puisque seuls 3 800 véhicules ont pu être traités, principalement en Guadeloupe et en Martinique.
Pour le moment, nous avons des résultats limités. Il faut réimpulser une vraie dynamique pour cette initiative, en lien avec le MTES. Nous voyons bien qu'il y a certains freins, notamment parce que les procédures administratives relèvent des maires qui sont parfois réticents face à la lourdeur administrative, voire à ces actions individualisées envers leurs administrés. D'autres problématiques sont beaucoup plus terre à terre ou financières comme le prix de la ferraille, puisque la valorisation de ces VHU correspond à une vente de ferraille.
C'est un sujet que nous suivons, en lien avec le MTES. Nous essayons de redynamiser la volonté qui avait été initiée par le MTES en mars, juste avant le confinement, de pouvoir évacuer un certain nombre de véhicules dans une zone de stockage en Guyane. C'est un des territoires qui font un effort très particulier sur le sujet.
Voilà sur cette initiative qui permet d'améliorer la lutte anti-vectorielle.
La DGOM n'a pas d'engagement financier spécifique sur la lutte anti-vectorielle. En revanche, le SMA, qui est financé par le ministère des outre-mer, a des interventions en nature : ce sont des demandes de concours qui ne font l'objet d'aucune demande de financement.
Par ailleurs, et cela répond aussi à une question sur l'enlèvement des ordures, nous pouvons financer des actions dans le cadre du fonds exceptionnel d'investissement. Nous avons notamment financé du matériel d'enlèvement des ordures à Wallis-et-Futuna et nous sommes intervenus pour le financement de déchetteries en Guadeloupe et en Martinique.
C'est une modalité directe du ministère des Outre-Mer. Localement, l'État peut intervenir dans le cadre des financements de la dotation des équipements des territoires ruraux (DETR), qui peut aussi constituer un mode de financement et d'accompagnement des collectivités dans leurs responsabilités en la matière.
Merci, monsieur le directeur, pour vos propos liminaires clairs et précis par rapport à vos compétences.
J'ai bien compris que vous participez aux réunions au niveau du ministère de la Santé, mais que cela ne relève pas de vous.
Néanmoins, nous avons quand même quelques questions, puisque nous aimerions bien savoir comment pouvoir adapter ce qui se fait sur le plan national, dans les différents territoires ultramarins.
Vous avez parlé tout à l'heure du ramassage des ordures. Avec la crise du Covid-19, la situation, notamment à Mayotte, a été aggravée par les défaillances de l'organisation du ramassage des ordures et l'interdiction préfectorale du ramassage des ordures plus de deux fois par semaine.
La DGOM et les préfectures ont-elles eu une action pour améliorer l'exercice de cette compétence locale outre-mer ?
En ce qui concerne l'action vis-à-vis des préfectures, nous pouvons évidemment intervenir auprès des préfets lorsque nous sommes informés de potentielles difficultés. Les préfets ont pleine compétence pour mettre en place des mesures qu'ils estiment adaptées à la situation locale.
Sur le volet investissement, c'est ce que je souhaitais évoquer avec cette notion d'accompagnement des collectivités et le financement ou la contribution au financement d'équipements, si nécessaire, de ramassage des ordures.
Mayotte, La Réunion et la Martinique ont dû gérer en même temps l'épidémie de dengue et celle de la Covid-19. Comment la gestion de ces deux crises sanitaires a-t-elle été suivie au niveau du ministère des outre-mer ? A-t-on tiré des conséquences de ces épidémies ? Quelles leçons tirées de la crise du Covid-19 vous semblent utiles pour la lutte contre les arboviroses ?
Nous avons assuré un double suivi.
Nous avons assuré un premier suivi, pour les questions hors Covid-19, dans le cadre de la réunion de sécurité sanitaire à laquelle nous continuons à participer, en suivant notamment la problématique de l'épidémie de dengue. Puis, dans le cadre de la cellule interministérielle de crise de Beauvau – et non celle de crise sanitaire, pour laquelle nous n'étions pas mobilisés – le ministère des Outre-Mer a souhaité être mobilisé et pouvoir intervenir dans le suivi de la crise et dans la définition d'actions spécifiques.
Je pense qu'il est trop tôt pour tirer des enseignements approfondis sur la crise et qu'un retour d'expérience sera nécessaire.
L'enjeu principal auquel nous avons été attentifs tout au long de la crise est celui des capacités sanitaires des territoires et de la possibilité de montée en puissance, que ce soit en termes de lits de réanimation, de capacités d'hospitalisation ou d'envoi de moyens humains liés à la réserve sanitaire.
Dans les territoires ultramarins, nous avons eu de gros problèmes quant à la continuité aérienne qu'il a fallu gérer au plus juste pour protéger les territoires, en limitant les arrivées de passagers tout en maintenant la capacité d'envoi de fret. C'était l'un de nos principaux enjeux.
Sur la question des envois de personnel, le sujet de la réserve sanitaire était particulièrement prégnant, tout comme l'envoi de moyens matériels et de capacité de tests. Un travail a été fait sur l'augmentation des automates pour pouvoir procéder aux tests, avec les personnels.
Des moyens de continuité aérienne ont été mobilisés, notamment par le biais d'affrètement, puisque des avions ont été affrétés entre La Réunion et Mayotte, par exemple ou par l'envoi de moyens militaires qui ont aussi contribué à l'acheminement des matériels.
Un autre aspect qui ressort de cette crise est celui du maintien nécessaire de la capacité de procéder à des évacuations sanitaires (Evasan) pour pouvoir soulager les structures hospitalières dans les territoires les plus concernés. Nous l'avons fait dans presque tous les territoires. À Mayotte, nous nous sommes beaucoup appuyés sur La Réunion. En ce moment, avec la crise épidémique qui progresse en Guyane, puisque nous n'avons pas atteint le pic épidémique, ce sont les Antilles qui servent de point d'accueil pour soulager les capacités hospitalières.
Je pense que cette crise a montré la nécessité de pouvoir doter les territoires, dans la priorité, des moyens nécessaires et de pouvoir adapter ces moyens aux mesures qui sont prises, par exemple, dans le cadre de ce que nous appelons « le déconfinement externe ». Il faut certes rouvrir l'accès aux territoires, mais en leur donnant les moyens de tests, d'hospitalisation, etc., pour pouvoir gérer une recrudescence éventuelle de l'épidémie.
Quel bilan tirez-vous du dispositif de mise en quarantaine mis en place dans les territoires ultramarins dans le cadre du confinement ? En quoi cette expérience pourrait-elle être utile pour de futures épidémies ?
Je ne prononcerai pas du point de vue sanitaire.
La quarantaine peut-elle être une réponse adaptée pour éviter la propagation ? Pour la Covid-19, nous étions clairement dans une contamination d'homme à homme ; pour la dengue par exemple, c'est via le vecteur moustique. Les mesures d'isolement qui pourraient être imaginées en la matière nécessiteraient sans doute d'être adaptées.
D'un point de vue pratique, nous avons bien vu la difficulté de ces mises en quarantaine dans des structures dédiées, avec des accompagnements qu'il faut mettre en place. Les questions de la durée pertinente d'une mise en quarantaine ainsi que celle de l'isolement géographique par rapport à des sites de présence de moustiques se poseront.
Il y a, je pense, un besoin de définir l'intérêt de ces quarantaines qui sont des modes d'action extrêmement contraignants. Nous l'avons vu pendant la crise de la Covid-19.
Le 8 avril dernier, la ministre des outre-mer a lancé la Trajectoire outre-mer 5.0. Ce plan contient-il des actions relatives à l'amélioration de la salubrité publique, à la lutte anti-vectorielle, à la prévention des épidémies ? Si oui, laquelle de ces actions ?
D'abord, il s'agit d'une trajectoire. La Trajectoire 5.0 est une sorte de filtre dans lequel nous allons passer les actions qui peuvent être conduites. Ce n'est pas un plan traditionnel avec un calendrier des financements et des projets que nous pourrions porter.
La Trajectoire 5.0 porte sur la mise en place des projets du fonds exceptionnel d'investissement, sur les futurs avenants des contrats de convergence et de transformation. Il s'agit de passer les projets au crible du 5.0 pour ne financer que des actions qui sont compatibles avec les objectifs du développement durable.
Dans les cinq zéros, nous pouvons mettre l'action du plan véhicules hors d'usage (VHU) sous le zéro déchet. Ce plan cherche à mettre en place des filières de gestion des déchets. Nous voyons bien que le VHU, dans le champ de la lutte anti-vectorielle est un élément essentiel.
L'organisation de la lutte anti-vectorielle en France dépend aujourd'hui d'un partage de compétences entre les ARS, les préfectures, les conseils départementaux et les communes.
Jugez-vous suffisamment bien définie cette répartition de compétences ?
Le décret du 29 mars 2019 a justement cherché à répondre à cette question de la répartition des compétences. Le rapport de l'Inspection générale de l'administration (IGA) et de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS), qui vous a été communiqué par le ministère des Solidarités et de la Santé, je crois, pointe peut-être des compléments de clarification à apporter dans cette organisation, notamment du point de vue législatif. Je ne vais pas redétailler ces points parce qu'il s'agit vraiment d'un sujet porté par le ministère des Solidarités et de la Santé.
Du point de vue de l'administration territoriale, notamment des préfets, je pense que la clarification a été apportée sur cette planification, notamment sur la mise en place de dispositions spécifiques des plans organisation de la réponse de sécurité civile (Orsec) lutte anti-vectorielle.
Par ailleurs, au niveau des communes, il y a aussi eu dans la gestion de la crise l'intégration dans les plans communaux de sauvegarde d'une partie lutte anti-vectorielle.
Je ne me prononcerai pas sur la partie prévention et actions, mais sur la partie gestion de crise, je pense que la clarification a été faite.
Pouvez-vous nous décrire, pour chaque département ou collectivité unique d'outre-mer, la répartition des compétences, les modes de financement et les moyens d'action mis en œuvre dans la lutte anti-vectorielle ? Pourquoi existe-t-il tant de disparités ? Est-ce le fruit de l'Histoire ou d'une adaptation aux conditions locales ?
Je ne vais pas rentrer dans ce détail puisque nous sommes dans une organisation relevant purement de la santé. Nous voyons bien que dans ces différents territoires, la mobilisation des collectivités qui a pu avoir lieu depuis plusieurs années a influé sur l'organisation locale, notamment avec le maintien d'une compétence au sein de l'État, malgré la loi du 13 août 2004 qui prévoyait le basculement de certaines compétences.
Selon les territoires, des ajustements ont été opérés sur la mobilisation respective de l'État ou des collectivités. Dans ces deux territoires de Guyane et de Martinique, cette répartition pose difficulté à l'heure actuelle, puisqu'il a fallu nous donner ces trois années pour clarifier les choses.
Quelles sont les normes d'urbanisme spécifiques applicables aux territoires ultramarins pour éviter le développement des gîtes larvaires ? Avez-vous connaissance d'une prise en compte du risque vectoriel dans ces normes ? Dans le cas contraire, faut-il envisager d'adapter les normes d'urbanisme et de construction à ce risque ?
Il n'y a pas de norme spécifique en la matière qui puisse imposer des mesures physiques ou matérielles de lutte anti-vectorielle.
Je pense que le mode d'action que nous pourrions envisager se situe dans l'orientation qui peut être donnée par les collectivités sur les fonds d'aménagements pour limiter les eaux stagnantes. Des normes ou des orientations pourraient être fixées en la matière, notamment avec le support des plans d'aménagement et de développement durable qui sont mis en place par les collectivités. Un accompagnement pourrait être envisagé en la matière, mais à ce stade, il n'y a rien.
Il pourrait aussi être envisagé d'interdire les toits-terrasses.
Il faudrait donner des orientations pour permettre de limiter ces zones où l'eau pourrait stagner et où nous pourrions donc avoir des développements de gîtes larvaires.
Le dispositif de surveillance entomologique comprend un outil de collecte de signalements de moustiques par des particuliers en métropole. Faudrait-il également le déployer en outre-mer ?
J'avoue ne pas connaître ce dispositif.
Ce qui est bon pour la métropole pourrait tout aussi bien l'être pour les outre-mer. Après, c'est une question de faisabilité, mais, a priori, toute initiative serait bonne à prendre.
Qui organise la surveillance entomologique au niveau des points d'entrée dans les territoires ultramarins ? Est-il nécessaire, du fait du caractère insulaire de la plupart des territoires, d'avoir une surveillance entomologique spécifique ?
Nous sommes vraiment dans une compétence pleine et entière du ministère des Solidarités et de la Santé.
Concernant la recherche et l'expertise contre les vecteurs et les arboviroses, le ministère des outre-mer participe-t-il également au financement de la recherche sur les vecteurs et les maladies vectorielles ? Quel partenariat avez-vous avec le ministère de la Recherche et le ministère de la Santé sur ces questions ?
Nous n'avons aucun partenariat ou financement spécifique en la matière. Nous sommes encore pleinement dans le champ de ces deux ministères sectoriels, celui de la Santé en articulation avec les actions de recherche du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche.
Pensez-vous qu'il faille envisager la création d'une agence dédiée à la lutte contre les vecteurs et/ou les arboviroses ? Quelles missions devraient lui être confiées ?
Je suis désolé, mais je vais encore renvoyer ce sujet au ministère des Solidarités et de la Santé. Je n'ai pas d'avis particulier en la matière.
Ils comportent des dispositions générales et des dispositions spécifiques, les dispositions générales ayant vocation à couvrir environ 90 % des risques de sécurité pour les populations.
Le plan Orsec est un document et une planification qui identifie les risques et les moyens qu'il faudrait pour les traiter, mais aussi l'organisation à mettre en place au niveau de l'État, mais aussi les acteurs qui doivent être mobilisés dans la gestion de crise et le secours aux populations, que ce soient des acteurs publics de l'État, les sapeurs-pompiers, les forces de sécurité intérieure, les collectivités et les opérateurs divers et variés. Il s'agit d'avoir une idée claire de l'implication des différents acteurs et de leurs moyens. Enfin, il analyse les modalités de préparation de ce dispositif, par exemple une politique d'exercice.
Le plan Orsec « dispositions générales » a vocation à donner une architecture solide et elle l'est, puisque c'est une planification locale éprouvée.
Il existe deux niveaux de plans Orsec : le plan Orsec départemental et le plan Orsec zonal. Les plans communaux de sauvegarde mis en place par les maires se rattachent au concept de planification locale.
Les dispositions spécifiques permettent de venir greffer, sur ces dispositions générales, des éléments particuliers pour faire face à certains risques, comme les cyclones. Comment déclenche-t-on les différents stades d'alerte ? Quelles sont les mesures mises en œuvre à chacun de ces stades ?
Le décret du 29 mars 2019 prévoit que des dispositions spécifiques relatives à la lutte anti-vectorielle soient mises en place, notamment pour les questions d'actions spécifiques à entreprendre pour l'éradication, dans certaines zones, des vecteurs de maladies.
Où se situent les différents territoires ultramarins dans l'architecture des plans Orsec ? Comment les plans Orsec sont-ils adaptés aux situations locales ?
Dans les départements et régions d'outre-mer (DROM), les plans Orsec sont totalement identiques à ce que nous pouvons trouver dans l'Hexagone. Il n'y a pas de document adapté pour les outre-mer. En revanche, c'est bien un document de planification locale : sa vocation est bien de se territorialiser en identifiant les risques, l'organisation et les moyens adaptés à chaque territoire.
C'est vrai pour les DROM où nous sommes, encore une fois, dans une identité de planification.
Pour les collectivités d'outre-mer du Pacifique, la compétence sécurité civile relève des gouvernements locaux. Nous déléguons donc quelques crédits en la matière pour que les hauts commissaires puissent accompagner certaines politiques.
Aucun, puisque c'est vraiment un document de planification locale.
Comment coopèrent les préfectures et les ARS en cas de crise épidémique dans les territoires ultramarins ? La répartition des tâches est-elle efficace ? Comment le fonctionnement pourrait-il être amélioré ?
D'une manière générale, la coopération entre les préfectures et les ARS a été fortement sollicitée à l'occasion de la crise de la Covid-19. Nous verrons le retour d'expérience en la matière.
Globalement, nous pouvons constater que c'est un caractère bicéphale qui a plutôt bien fonctionné.
Des sujets d'interface peuvent évidemment se poser, mais globalement, l'organisation et l'articulation entre la préfecture et les ARS fonctionnent. À ce stade, nous n'avons pas identifié de sujets particuliers à traiter, ou tout au moins à rapporter dans cette commission.
Dans l'océan Indien, le réseau de surveillance des épidémies et de gestion des alertes (SEGA) organise une coopération régionale pour le contrôle des épidémies.
La DGOM ou les préfectures suivent-elles ces travaux, les financent-elles ?
Faudrait-il mettre en place une telle coopération régionale dans les Antilles et dans le Pacifique ?
La DGOM ne suit pas particulièrement ces réseaux qui, une fois de plus, présentent indubitablement un intérêt, mais relèvent de la compétence des autorités en charge de la santé.
Je ne suis pas le mieux placé pour vous répondre sur ce point.
Comment bien associer les populations ultramarines à la démarche de prévention ? Y a-t-il des spécificités locales à prendre en compte dans certains territoires ?
Oui, c'est ce que j'évoquais tout à l'heure en corollaire de ce que je présentais de l'action du SMA : il est nécessaire de pouvoir faire de la pédagogie et de la sensibilisation qui soient totalement adaptées aux populations.
Il peut y avoir des ressorts culturels et de manière plus précise, des sujets de langue et de compréhension qui nécessitent que nous puissions tenir des messages de prévention et de sensibilisation adaptés à chacune des populations.
C'est ce à quoi les préfets s'attachent. Cela a été fait pendant cette crise de la Covid-19.
Nous l'avions aussi fait au moment de la crise de l'ouragan Irma, je le cite parce que c'est un élément important. Nous nous sommes rendu compte qu'il était pertinent de pouvoir diffuser des messages d'information, de sensibilisation, non seulement en français, mais aussi en anglais – puisque c'est une langue qui est largement répandue à Saint-Martin – ou en créole. Nous avons pu mobiliser des ressources, notamment en interne, pour pouvoir enregistrer des messages adaptés aux populations.
En matière de prévention et de sensibilisation des populations, il est essentiel de pouvoir adapter le message et la communication à chacune des populations concernées.
La proposition de loi adoptée par le Sénat prévoit notamment la possibilité pour le préfet, après avis du Haut Conseil de la santé publique, d'autoriser sur le territoire du département, la mise en œuvre, à titre expérimental, de nouvelles techniques de lutte contre les vecteurs. Disposez-vous d'informations sur l'expérimentation de l'insecte stérile récemment mise en œuvre à La Réunion et en Polynésie ?
Non, je n'ai pas d'informations.
Non. J'ai essayé de répondre du mieux possible à vos différentes questions en espérant que cela puisse apporter quelques éléments de plus-value dans vos travaux.
J'avais juste une toute petite question.
En dehors des moyens pour lesquels vous vous assurez qu'ils soient alloués à cette mission qui relève essentiellement des ARS, nous l'avons bien compris, j'imagine que vous êtes prêts, en cas de crise majeure, à accompagner les dispositifs déjà en place et que vous avez quand même un système de surveillance très régulier qui vous permet de faire face et d'en discuter ? Des campagnes sont-elles prévues sur des médias locaux ?
Je pense que cela rejoint ce que nous évoquions précédemment.
Les préfets ont mis en place une communication adaptée en étant extrêmement présents dans les médias.
Je citerai par exemple le cas de la Guyane. Il y a tous les jours un Covid info qui donne des éléments sur l'évolution de l'épidémie.
Un important travail a été mené au niveau de chaque préfecture et en coopération avec les ARS, pour pouvoir adapter la communication.
Merci beaucoup.
C'était notre dernière audition.
La prochaine réunion, qui sera convoquée la dernière semaine de juillet, sera consacrée à l'examen du rapport.
La réunion s'achève à quatorze heures cinquante.
Membres présents ou excusés
Commission d'enquête chargée d'évaluer les recherches, la prévention et les politiques publiques à mener contre la propagation des moustiques Aedes et des maladies vectorielles
Réunion du jeudi 18 juin 2020 à 14 heures
Présents. – Mme Ramlati Ali, Mme Sereine Mauborgne
Excusés. – Mme Ericka Bareigts, Mme Françoise Dumas, M. Jean-Philippe Nilor, M. Jean-Hugues Ratenon