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Madame la ministre de la culture, je suppose que vous reviendrez tout à l'heure en détail sur les dispositions contenues dans les deux textes que nous examinons. Dès lors, permettez-moi de commencer mon intervention en précisant qu'il ne s'agit en aucun cas ici de parler des « fake news », tout simplement parce que cette expression a été inventée et popularisée par le président des États-Unis d'Amérique, Donald Trump, notamment pour s'attaquer aux informations diffusées par des journalistes. Il me semble important de parler plutôt de « fausses informations » et, au-delà, de « manipulation de l'information », non seulement parce que l'usage de la langue française est inscrit dans la Constitution, mais aussi parce qu'il est h...
...s, monsieur le président et rapporteur de la commission des affaires culturelles et de l'éducation, mes chers collègues, la rumeur a existé de tout temps. C'est certainement le plus vieux média du monde. Elle a toujours accompagné les moments forts de l'histoire dans le débat public, parce qu'elle représente un fragment libre de l'opinion. En cela, elle est l'une des incarnations de la liberté d'expression. Condorcet y associait l'émergence d'un débat d'idées ouvert, synonyme de progrès de la connaissance, de consécration de la vérité et de la raison. Mais « la rumeur est aussi la fumée du bruit », écrivait Victor Hugo. C'est même, pour compléter modestement ce propos, une fumée qui agit comme un poison : poison pour nos démocraties, devenues les cibles d'affabulateurs cherchant à en saper les fon...
...er cette motion de rejet préalable de la proposition de loi. Elles découlent de la réponse à deux simples questions : est-il vraiment nécessaire de légiférer encore et encore, au prétexte de lutter contre la manipulation de l'information et contre la désinformation en ligne ? Est-il raisonnable, sous ce même prétexte, d'entamer, ne serait-ce que partiellement, la liberté d'opinion et la liberté d'expression ? À ces deux questions, nous répondons clairement et fermement : non ! Non, il n'est pas nécessaire de rajouter de la législation à la législation existante. Non, il n'est pas raisonnable, il n'est pas souhaitable, il n'est pas responsable de prendre le risque de porter une quelconque atteinte à la liberté d'opinion et à la liberté d'expression. Or tel est bien le risque que nous voyons poindre...
Comment ne pas voir se faufiler la menace d'une « police de la pensée », qui dicterait ce qui est vrai et ce qui est faux, qui trierait le bon grain de l'opinion correcte, vraie et recevable, de l'ivraie de l'opinion incorrecte, non vérifiée, inexacte, irrecevable et donc condamnable et sanctionnable ? Le risque, même minime, d'atteinte à la liberté d'opinion et à la liberté d'expression, ne saurait être pris. « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la loi ». Ou encore « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas dét...
...ons pas le risque de la censure ou, pire, de l'autocensure. Éduquons, formons, donnons aux jeunes générations, en vue d'en faire des citoyens libres et informés, à même de prendre leurs décisions, notamment politiques, les clés leur permettant de décrypter et d'analyser des informations provenant de sources pluralistes, dans un cadre respectant totalement la diversité des opinions et la liberté d'expression. C'est pourquoi je vous invite à voter la motion de rejet préalable, pour nous permettre de repartir, je le répète, sur d'autres bases qu'un texte mal fichu, qui a plus d'inconvénients qu'il n'apporte de solutions et qui, au vu de toutes les précautions et les prudences de Sioux qui ont été déployées à chaque étape, et compte tenu des amendements qui visent encore à le resserrer, se révélera, au...
Madame Le Grip, je partage ce que vous avez dit au tout début de votre intervention – ce sera notre seul point commun – , à savoir que l'expression des citoyens est libre, sauf abus. Nous sommes d'accord. La fausse information est une dérive, un abus de la liberté d'expression : tel est le fondement de ce texte. En revanche, vous avez tenu de nombreux propos inexacts.
...l'est, évidemment, puisque ce texte a pour objet de protéger la démocratie en disant « stop ! » à tous ceux qui voudraient déstabiliser le pays. Oui, c'est une loi nécessaire. Vous avez également affirmé que le texte ne serait pas raisonnable. Or il l'est. Si j'ai bien compris votre intervention, la proposition de loi serait liberticide par principe parce qu'elle serait en lien avec la liberté d'expression. C'est une caricature.
J'aurai l'occasion de revenir sur le sujet pour vous répondre avec des arguments de fond sur le dispositif qui est prévu. Le fil rouge que les rapporteurs ont suivi, tout au long de l'élaboration du texte, a bien été de maintenir l'équilibre entre le droit pour tous les citoyens d'accéder à une information transparente et loyale, et la préservation effective de la liberté d'expression. Il était nécessaire de donner une définition de la fausse information : elle a été réclamée par tous ceux que nous avons auditionnés, parce que le texte concerne la liberté d'expression et que, pour ne pas y porter atteinte de manière disproportionnée, il faut poser un cadre en donnant des définitions. La fausse information pose un grand nombre de questions : est-elle délibérée, est-elle une er...
... avec les acteurs concernés : les journalistes, les plateformes, le CSA, les éditeurs de presse, les annonceurs, les acteurs de l'éducation, les universitaires et bien d'autres. Cet effort de concertation nous a permis d'aboutir à un texte équilibré sur deux points essentiels, sur lesquels nous ne voulions aucune ambiguïté. Il préserve, d'une part, nos libertés fondamentales que sont la liberté d'expression et la liberté de la presse – il ne touche pas à la loi de 1881. Il protège, d'autre part, notre démocratie de l'emprise des fausses informations lors des élections. Ces deux points nous permettent de proclamer haut et fort dans l'hémicycle que nous ne touchons pas à la liberté d'expression, car les informations contre lesquelles nous voulons lutter sont de fausses informations massives, automati...
...à un juge de déterminer, en quelques minutes ou quelques heures, dans la précipitation, si quelque chose est vrai ou non, alors que, pour certains faits historiques, on peut encore se disputer trente, quarante ou cinquante ans plus tard sur la manière de les analyser. On voit bien que l'objet de cette proposition de loi n'est pas tant de lutter contre les fausses nouvelles – on utilise souvent l'expression anglaise, importée des États-Unis, ce qui montre d'ailleurs que le problème n'est pas né chez nous – , que de viser certains opérateurs. Nommons-les : ce sont les opérateurs russes qui sont pointés du doigt. Il est de très mauvaise politique de faire la loi pour un phénomène particulier. Pour ma part, je crois qu'il faut faire confiance à l'éducation, éduquer nos concitoyens à filtrer l'informati...
...us de 150 000 morts. « C'est par des informations étendues et exactes que nous voudrions donner à toutes les intelligences libres le moyen de comprendre et de juger elles-mêmes les événements du monde. » Voilà ce que Jean Jaurès déclarait lors du lancement du journal L'Humanité, le 18 avril 1904. C'est de cela que la représentation nationale devrait d'abord se préoccuper : renforcer la liberté d'expression au travers de la liberté de la presse et accorder à cette dernière, par le renforcement d'une éthique journalistique, tout le crédit que nous voulons lui reconnaître. Voilà qui donnerait du sens à notre action au service de notre démocratie.
...oints de vue ? Ce qui est certain, c'est que des cas de manipulation existent. Ces manoeuvres prennent la forme de discours tronqués et de choix opérés dans la sélection des images et dans la présentation des faits. Il nous faut admettre ce constat que le pluralisme des médias n'est pas un fait établi et que, dans l'ensemble, nous vivons en état d'« insécurité informationnelle », pour reprendre l'expression d'Ignacio Ramonet. L'information-spectacle prend souvent le pas sur le récit et l'analyse rigoureuse des événements. La mise en scène et le soin apporté à l'image remplacent alors l'authenticité et l'exactitude des faits rapportés. Nous devrions tous déplorer que la marchandisation de l'information se soit opérée au détriment de sa fonction civique. Était-ce si invraisemblable que personne n'ait...
...es sources des journalistes, très largement insuffisante dans notre pays. Car « s'il n'y a pas de protection des sources, les sources se tarissent, et donc il n'y a pas d'information », selon Louis-Marie Horeau, rédacteur en chef du Canard enchaîné. Vous désirez l'extension des pouvoirs accordés au Conseil supérieur de l'audiovisuel, ce qui peut s'apparenter à une atteinte directe à la liberté d'expression. Cette entité, ainsi renforcée, pourrait désormais décider quelles sont les « vraies » informations et les « fausses », définies dans votre projet de loi comme « toute allégation ou imputation d'un fait dépourvue d'éléments vérifiables, de nature à la rendre vraisemblable ». Cette définition nous paraît suffisamment large pour que toute référence artistique, par essence subjective, puissent être ...
Vous voulez manifestement me punir d'user de ma liberté d'expression en période électorale. Malgré tout, je crois que je continuerai à le faire !
...le erreur avais-je commis ! Reprendre la formule des Canadiens, dont chacun sait combien ils sont sanguinaires, qu'ils n'ont à l'esprit que la répression de toute écriture et le contrôle de la conformité absolue de ce qui se raconte avec l'intérêt des gouvernants ! Ces pauvres Canadiens ont appelé cela le tribunal ! Quelqu'un aura-t-il ici le front de me dire que ce tribunal a réduit la liberté d'expression au Canada ? Personne ! Encore heureux, parce que ce n'est pas le cas. Combien d'autres pays ont-ils fait de même ? Je vais vous régaler de la liste des conseils de déontologie. Je me suis trompé : il existe non une vingtaine, mais une quarantaine de conseils de presse et de déontologie dans le monde.
... d'arbitraire. D'ailleurs, comment l'appliquer ? Je souhaite bien du courage au juge qui devra vérifier toutes les fake news ! On le rend responsable de dire la vérité, et en urgence. Trop d'incertitudes, trop d'interprétations possibles, bref, c'est le flou artistique. On aurait certainement pu en faire l'économie, car, vous le savez, il existe déjà près de 400 textes qui encadrent la liberté d'expression et, depuis 1850, un délit de fausse nouvelle. Alors pourquoi persévérer et vouloir toujours plus de lois ? Vous qui vous targuez de vouloir simplifier, vous ne faites que créer de la confusion. Enfin, je crois sincèrement que voter cette loi, c'est inciter chacun à l'autocensure, et c'est ce qui est le plus grave. C'est mettre fin, de manière insidieuse, à la liberté d'expression, car à partir d...
... sommes dans la mauvaise foi de la diffamation, en aucun cas ! C'est une procédure spécifique. Vous souhaitez supprimer cet alinéa, mais, si nous avons voulu introduire une définition, c'est parce que toutes les personnes que nous avons auditionnées nous ont fait part de leur souhait de savoir ce qu'était une fausse information, de savoir ce sur quoi on légiférait. Ce texte concerne la liberté d'expression, qui est une liberté sacrée, reconnue par les plus hautes autorités. Lorsqu'on légifère sur ce sujet, il faut le faire avec précaution. Or la définition permet de fixer un cadre précis et de savoir de quoi on parle. La première définition ayant suscité des critiques et des inquiétudes, je vous proposerai dans un instant de l'affiner un peu. Mais je répète que la commission a émis un avis défavor...
Et si, chères collègues ! Nous débattons de la liberté d'expression. Qu'un député non inscrit du Rassemblement national s'exprime n'a rien de scandaleux, c'est même ce pour quoi nous avons été élus !
...siste donc pas à citer, non pas Socrate ou Platon, comme vous l'avez fait, mais… Jean-Luc Mélenchon. Je me suis replongé, monsieur Mélenchon, sur ce que vous avez écrit sur votre blog il y a quelques semaines au sujet de la presse et des journalistes : vous avez écrit que la haine des médias et de ceux qui les animent était juste et saine et que la presse était la première ennemie de la liberté d'expression. Et vous venez ensuite nous dire ici que nous voudrions la mettre à mal et que vous soutenez les journalistes ? Ce n'est pas sérieux, et nous voterons contre cette motion.
Ne faites pas semblant de confondre fausse information et liberté d'expression pour défendre la possibilité de dire tout et n'importe quoi. L'amendement no 162 vise à préciser la définition de la fausse information, et surtout à y associer le caractère intentionnel de sa diffusion. En effet, on peut parfaitement diffuser une fausse information que l'on a reçue sans avoir connaissance de son caractère de fausseté, de bonne foi.