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...rience allemande qui a servi de point de départ à nos travaux – travaux auxquels ont contribué MM. Gil Taïeb et Karim Amellal. La loi allemande pouvait, en effet, générer une sur-censure. Pour éviter cette sur-censure, je propose plusieurs mesures, dont certaines seront abordées plus tard au cours de cette séance. La responsabilité contractuelle nous permet déjà d'engager la responsabilité d'une plateforme qui retirerait des contenus de manière injustifiée au titre de ses conditions générales d'utilisation. Il ne faut pas oublier cela : le juge peut intervenir quand le retrait discriminatoire de ces contenus représente une infraction à la loi. Par ailleurs, je proposerai tout à l'heure un amendement qui obligera les plateformes à mettre en oeuvre tous les moyens nécessaires pour empêcher les retra...
Je souhaite revenir sur la distinction que vous avez opérée, madame la rapporteure, entre les contenus gris et les contenus manifestement illicites. Les plateformes recevront des signalements de la part de particuliers ou d'associations, peu importe. Or, qui décidera que les signalements opérés par ces personnes physiques ou morales visent des contenus manifestement illicites, alors que d'autres pourraient juger que ces contenus relèvent de la zone grise ? La plateforme, puisque c'est elle qui aura l'obligation de supprimer un contenu illicite. Or il est év...
...ure et le secrétaire d'État aient reconnu que cette proposition de loi n'invente rien. Je l'ai rappelé à la suite de certaines interventions : à les en croire, avant ce texte, il n'existait aucun dispositif. Aussi fallait-il aller très vite pour mettre fin à ce qui se passe sur internet. Or il existe déjà des dispositifs. Cette proposition de loi ne crée donc pas des injonctions en direction des plateformes : il renforce leur pouvoir, et c'est là que le bât blesse. Ce n'est pas en suivant cette voie que nous réglerons mieux les problèmes identifiés. En effet, ce n'est pas le manque de pouvoir des plateformes, non plus que le nombre des modérateurs, qui sont en cause aujourd'hui : c'est l'écosystème d'internet, car, même avec plusieurs dizaines de milliers de modérateurs supplémentaires, la modérati...
Il s'inscrit dans la même logique que celui de M. Latombe. J'ai précisé la rédaction de l'amendement que j'avais défendu en commission des lois. Il convient d'élargir le spectre des opérateurs susceptibles d'être concernés par le dispositif prévu à l'article 1er aux plateformes de financement participatif, dites de « crowdfunding », ou appelées « cagnottes ». Par exemple, en décembre dernier, la plateforme PHAROS a poursuivi pour incitation à commettre un crime une cagnotte dont l'objet était le financement d'un tueur à gage pour éliminer le Président de la République. Sans notre proposition de loi, on pourrait donc poursuivre ce type d'agissements et de plateformes. ...
...cle 1er s'applique bien aux moteurs de recherche, puisqu'il vise les services de communication ayant pour activité le classement ou le référencement de contenus, ce qui est la définition des moteurs de recherche. En ce qui concerne le champ d'application de l'article 1er, la rédaction initiale portait uniquement sur ce qu'on appelle communément les réseaux sociaux, c'est-à-dire les opérateurs de plateforme ayant pour fonction le partage de contenus publics. Dans le cadre de nos discussions avec le Conseil d'État, il a été demandé d'étendre le champ d'application du dispositif aux moteurs de recherche, car leurs activités ont, in fine, les mêmes conséquences que les réseaux sociaux en matière d'exposition des contenus. C'est la raison pour laquelle le champ d'application du texte leur a été étendu. ...
...istinction entre immoralité et illégalité, il revient à la justice de trancher. Tout l'enjeu est de permettre au juge de se positionner sur un certain nombre de sujets. Il reste que les cagnottes, qui sont pour la plupart importées de pays étrangers, sont des moyens de promouvoir la haine sur internet, et indirectement sur les réseaux sociaux. On ne parle pas simplement des forums en ligne de ces plateformes de crowdfunding.
...nce dans l'économie numérique (LCEN), qui transposait une directive de 2000, la directive « e-commerce », notre cadre juridique n'est plus adapté : tout cela était avant Facebook, Twitter, Snapchat, les stories, les lives, les hashtags… avant tout. Ce régime repose sur une dichotomie obsolète entre des éditeurs, à forte responsabilité, et les hébergeurs, régime sous lequel sont placées toutes les plateformes que nous connaissons aujourd'hui et qui ne sont jamais inquiétées. Et si les objectifs de la directive « e-commerce » restent d'actualité, elle n'a jamais visé à mettre en place un système permettant la libre circulation de la haine via les services de communication en ligne. Il est donc de notre devoir de ne plus laisser ce secteur en proie à une autorégulation qui s'essouffle et d'assumer plei...
... d'une évolution inquiétante que le législateur doit prendre à sa juste mesure. C'est tout l'objet de la proposition de loi qui vous est aujourd'hui soumise par notre collègue Laetitia Avia, dont la commission des Affaires culturelles et de l'éducation a souhaité se saisir pour avis. Elle tend à pallier l'impunité quasi-totale dans laquelle évoluent aujourd'hui les auteurs de tels propos sur les plateformes, dont le zèle à combattre les contenus haineux est pour l'heure limité à ce que la loi française rend obligatoire. Dont acte : la proposition de loi rendra obligatoire leur retrait en vingt-quatre heures ! Il est grand temps d'établir une législation efficace pour assurer le respect, par des plateformes virtuelles, de lois conçues pour le monde réel. Se retranchant systématiquement derrière leur...
...es responsabiliser enfin. Et si l'obligation de vingt-quatre heures est le coeur, le signalement est le poumon. Cette procédure de notification se devait donc d'être accessible et simple : c'est le fameux bouton uniformisé qui se présenterait partout de la même façon pour que, d'un réseau social à un moteur de recherche, on retrouve le même design. C'est ensuite le CSA qui régulera. Il aidera les plateformes internet à lutter contre les contenus haineux. Il vérifiera que tout est mis en oeuvre pour atteindre les objectifs. Le cas échéant, il sanctionnera. L'échelle des sanctions ira de la mise en demeure jusqu'à l'amende de 4 % du chiffre d'affaires annuel mondial des plateformes. Par ses amendements, le groupe La République en Marche tentera justement de parfaire le dispositif de notification afin...
...rteure, dans votre projet de rapport, il n'y a pas de fatalité en la matière. Je crois qu'il ne faut plus, désormais, masquer les petits renoncements derrière de grandes critiques des nouvelles technologies et des nouveaux modes de communication. Ce texte propose précisément de sortir des ambages habituelles et vient compléter l'arsenal juridique disponible pour les utilisateurs quotidiens de ces plateformes. L'angle adopté est intéressant car il s'agit ici d'envisager les plateformes comme étant des catalyseurs de contenus afin de mieux les réguler en les responsabilisant et en responsabilisant les utilisateurs ; c'est là un point d'équilibre qui garantit la protection de la liberté d'expression et empêche ceux qui voudraient la détourner de ses fondements de s'en prévaloir. Bien sûr, certains élém...
... de dispositions –, légiférer n'est pas tout. Il faudra des moyens financiers et humains extrêmement importants, pour la justice, pour la police, pour l'éducation ; c'est même le coeur du sujet. Par ailleurs, il est assez étonnant de constater que vous avez laissé de côté, dans le texte initial, la justice de la République, alors qu'il y va des libertés publiques, à valeur constitutionnelle. Les plateformes et les autorités administratives ne sont pas garantes du droit et de la justice. Les sanctions et les divergences d'interprétation que peuvent susciter certains propos appellent absolument l'intervention du juge judiciaire. Je pense que nous avons encore à y travailler, nonobstant les amendements que vous avez pu déposer.
...t, pris dans cette effervescence, nous n'avons pas anticipé les dérives et nous subissons aujourd'hui une fuite en avant de cet instrument utilisé à mauvais escient par certains. Pour lutter contre ces contenus illicites qui portent atteinte à la dignité et abusent de la liberté d'expression, nous avons pourtant déjà beaucoup légiféré : en 2004, avec la LCEN ; en 2009, avec la mise en place de la Plateforme d'harmonisation, d'analyse, de recoupement et d'orientation des signalements (PHAROS) ; en 2016, avec la loi pour une République numérique ; en 2018, pour lutter contre le cyberharcèlement. S'ajoutent plusieurs directives européennes. Force est de constater que les difficultés demeurent, que les discours de haine sont exacerbés et peu sanctionnés. Les attaques en raison des origines, de la relig...
...t la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 en son article 11 protègent la liberté d'opinion et la liberté d'expression qui en découle. La Cour européenne des droits humains exige une prévisibilité et une proportionnalité des blocages, et une protection renforcée de la parole à visée politique et militante. Or le texte actuel ne prévoit pas les garanties nécessaires. Le champ des plateformes visées est bien trop large. Ainsi, La Quadrature du Net souligne que l'exigence de retrait de contenus en moins de vingt-quatre heures fait peser une obligation disproportionnée sur les plateformes non commerciales que beaucoup de personnes consultent, comme Wikipedia, qui n'a pas les moyens de Facebook. Ce défaut du texte initial est aggravé par l'amendement CL90 de la rapporteure, qui élargit...
...s amendements de dernière minute qui vont faire tomber ceux des parlementaires. Sur le fond, l'article 1er de la proposition de loi s'inspire beaucoup de la législation allemande qui est en vigueur depuis un an et peut donc faire l'objet d'une première évaluation. En fait, son bilan est assez mitigé. Les observateurs allemands font état de l'excès de zèle que l'on pouvait redouter de la part des plateformes : pour éviter de laisser passer un contenu illicite, elles sont tentées de filtrer très largement au point que 80 % des contenus retirés ne sont finalement pas réellement illicites. Quelle place ce texte réserve-t-il au juge ? Dans un État de droit, personne n'est mieux placé que le juge pour dire ce qui est légal ou illégal, licite ou illicite. Au cours de cette législature, ce n'est pas la pr...
...de faire tomber tous les nôtres et de supprimer le débat. Madame la présidente, nous autoriserez-vous à défendre nos amendements qui risquent de tomber pour que nous puissions au moins en débattre ? Je le demande gentiment, sans polémique aucune. Cela se fait dans toutes les commissions, mais je pose quand même la question. J'en arrive maintenant à la vraie question : peut-on faire confiance aux plateformes pour effectuer le travail qu'on leur demande ? Au vu d'expériences passées, je ne suis pas sûr que les sanctions prévues les feront trembler. N'aurons-nous pas intérêt à renforcer le pouvoir du juge judiciaire pour que nous puissions créer une sanction réellement efficace contre la diffusion de tels propos ? Quoi qu'il en soit, nous participerons activement et avec beaucoup d'intérêt au débat s...
...hacune des auditions, je rendais compte des échanges que nous avions avec le Conseil d'État et des évolutions prévisibles du texte, afin que chacun puisse s'y préparer. Je pense avoir fait le maximum possible en la matière. Que l'on appelle cela de l'impréparation, je ne peux que m'en désoler. Sur le fond, il est important de rappeler un principe de base contenu dans l'article 6 de la LCEN : les plateformes ont d'ores et déjà une obligation de prompt retrait des contenus manifestement illicites. Nous ne créons pas cette obligation mais nous indiquons dans quel délai ce retrait doit être opéré. Le caractère manifestement illicite résulte d'une réserve d'interprétation du Conseil constitutionnel. En combinant ces deux éléments, nous prévoyons que les plateformes devront retirer les contenus manifeste...
...eut évidemment pas fermer les yeux sur la propagation – et même la généralisation – des propos haineux sur la toile. Votre texte est le bienvenu pour agir en ce sens, même si je ne suis pas absolument convaincue de la nécessité de passer par le vecteur législatif pour ce faire. Ce qui est problématique, en revanche, c'est l'article 1er de votre proposition de loi. Vous demandez aux opérateurs de plateforme en ligne d'être davantage responsables en les obligeant à retirer les contenus haineux sous vingt-quatre heures maximum. Très bien. Mais dans l'absolu, cela pose une question difficile à trancher : ces opérateurs sont-ils les mieux placés pour exercer cette mission a priori quand il est déjà parfois si difficile pour les juges de le faire a posteriori ? Quelle légitimité auront ces opérateurs à l...
...cation a été faite sur un réseau social ou sur internet, elle laisse toujours une trace même si elle a été retirée dans des délais très brefs. Les dispositions que vous proposez dans votre texte sur le plan technique, qui consistent à mettre en évidence un bouton sur lequel on va pouvoir appuyer pour faire retirer la publication, n'abordent pas ce sujet. À mon avis, il faut forcer les différentes plateformes à trouver les moyens techniques de faire complètement disparaître toute trace des contenus condamnés et retirés.
...ntisémites ou négationnistes. Ce n'est pas une question de liberté d'expression. La loi de 1972 contre le racisme était efficace mais elle est devenue quasiment inopérante sur internet en raison de la multiplication de messages en tout genre et de l'importance d'aspects techniques que les associations et même les parquets ne maîtrisent pas. Nous avons tenté d'y remédier en 2004, en obligeant les plateformes à retirer les contenus odieux, mais cette loi n'est pas suffisamment efficace compte tenu de l'absence de sanctions. Nous sommes très favorables à l'idée d'accroître l'efficacité de la lutte contre ce déferlement de haine. Nous pensons d'ailleurs qu'il était urgent de se saisir du problème et d'essayer d'avancer. Le texte n'est pas abouti et il est en train de se peaufiner. C'est une bonne idé...
Nous aurons l'occasion de débattre sur chacun des articles mais je vais répondre aux questions très concrètes qui m'ont été posées. Quel sera le rôle du CSA ? Il interviendra tout le temps, en fait. En amont, il émettra des recommandations, tracera des lignes directrices, préconisera de bonnes pratiques. Les grandes plateformes ont un recueil de jurisprudences puisqu'elles ont déjà une obligation de retrait des contenus manifestement illicites. Le CSA prendra ses responsabilités en transmettant ses recommandations aux plateformes pour qu'elles sachent ce qu'elles ont à retirer. Il aura aussi un rôle de supervision des plateformes. Il sera l'interlocuteur référent sur le territoire national et il sera en lien avec les p...