Publié le 15 septembre 2018 par : Mme Rubin, Mme Autain, M. Bernalicis, M. Coquerel, M. Corbière, Mme Fiat, M. Lachaud, M. Larive, M. Mélenchon, Mme Obono, Mme Panot, M. Prud'homme, M. Quatennens, M. Ratenon, Mme Ressiguier, M. Ruffin, Mme Taurine.
I. – Au début desb etc de l'article 1729 du code général des impôts, le taux : « 80 % » est remplacé par le taux : « 150 % ».
II. – Au premier alinéa de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, les mots : « n'ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui » sont remplacés par les mots : « ont été principalement inspirés par le motif ».
Cet amendement tend à renforcer la lutte contre la fraude et l'évasion fiscales.
L'abus de droit consiste à utiliser un texte juridique à l'encontre des objectifs réellement poursuivis par les auteurs du texte, dans le but d'éluder une charge fiscale qui aurait été normalement due. Dans la loi actuelle, l'administration peut rejeter certains montages pour abus de droit, seulement si l'abus de droit a eu lieu pour motif « exclusivement fiscal ». Cette forte restriction limite grandement son application, alors que l'abus de droit pourrait souvent concerner les grands groupes qui ont des pratiques dans la zone grise de la loi pour échapper à l'impôt.
Ce critère n'apparaît plus en phase avec la réalité de la fraude globalisée, et même en-deçà de certaines exigences supranationales : le Parlement européen en particulier a appelé à considérer comme abusive et partant potentiellement frauduleuse l'optimisation « organisée à des fins fiscales dominantes voire exclusives ».
L'abus de droit fiscal constitue une violation du civisme fiscal incombant à tout citoyen, grève lourdement les recettes de l'État et se traduitin fine par une inégalité des citoyens devant la loi, minant par là même le socle qui fonde notre République, conformément aux articles 13 et 14 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du citoyen.
Selon le juge constitutionnel, le refus de se soumettre à l'obligation imposable ne saurait se justifier au nom de la liberté individuelle. Mais les droits et libertés individuels ne peuvent pas non plus être remis en cause au nom du principe de nécessité de l'impôt (article 89 de la loi de finances pour 1984, décision du Conseil constitutionnel du 29 décembre 1983). Il n'en reste pas moins que la contribution commune « à hauteur des capacités contributives » est nécessaire à une vie en communauté.
Or, au regard de cette subordination de l'intérêt général à des intérêts particuliers que représente l'abus de droit fiscal, il règne en la matière un vif sentiment d'impunité que renforce encore le faible montant des peines encourues et le flou juridique encadrant cette pratique.
C'est pourquoi le présent amendement entend porter à 150 % la pénalité de majoration des droits frappant les individus qui s'essaieraient à des manœuvres frauduleuses à l'encontre de l'administration fiscale, mesure permettant d'en accentuer le caractère réellement dissuasif. Le taux en cas d'abus de droits serait ainsi aligné sur celui prévu jusqu'en 2005 en cas d'opposition à un contrôle fiscal.
De plus, cet amendement vise à modifier la notion même d'abus de droit afin d'en renforcer la portée et le champ d'application.
Nous proposons que l'abus de droit, conformément aux orientations européennes, soit reconnu dès qu'est établie l'intention « principale », et non plus exclusive, du contribuable d'amoindrir les charges fiscales qui lui incombent en sa qualité de citoyen par un détournement conscient du sens initial de la loi.
Des individus qui poussent l'absence de scrupules et de sens civique jusqu'à l'évitement délibéré de l'assujettissement à l'impôt ne manqueraient pas en effet de s'abriter derrière ce caractère actuellement « exclusif » encadrant l'abus de droit pour faire valoir d'autres motivations annexes afin d'échapper, une fois de plus, aux devoirs qui sont pourtant les leurs.
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