Publié le 22 janvier 2019 par : Mme Karamanli, Mme Untermaier, M. David Habib, M. Saulignac, Mme Pau-Langevin.
Supprimer cet article.
Cet amendement vise à supprimer la mesure d'interdiction administrative individuelle de manifester. En effet, existant actuellement à titre de peine complémentaire, l'interdiction de manifester est déjà un outil à la disposition des autorités judiciaires, qui reste cependant très peu utilisé. Seulement 32 condamnations assorties d'une peine d'interdiction de manifester ont été prononcées de 1995 à 2017. Il n'appartient qu'au juge de s'en saisir plus souvent le cas échéant. Il n'est donc nul besoin en droit de rajouter un dispositif supplémentaire et superfétatoire.
Plusieurs raisons plaident également en défaveur de l'actuel dispositif introduit par la PPL. Dans la pratique, le dispositif d'interdiction administrative de manifester se heurtera à des obstacles pratiques. S'il est possible d'interdire l'accès d'un stade, donc d'un lieu clos, à une personne, il est beaucoup plus difficile d'interdire à quelqu'un de se joindre à une manifestation, a fortiori dans une ville comme Paris. Un stade n'est pas une manifestation. Limiter l'accès à un lieu clos n'est pas limiter l'accès à une portion d'espace public, étendue et mouvante. Et le droit d'assister à un match n'est pas une liberté fondamentale, contrairement à celui de manifester. Une mesure de cet ordre se traduirait par ailleurs par une charge de travail supplémentaire pour les forces de police, surtout si l'interdiction vise plusieurs personnes.
Plutôt qu'un travail ponctuel limité au jour de la manifestation ou aux jours précédents qui serait de ce fait soumis à de forts aléas opérationnels, il serait préférable de cibler l'action des forces de l'ordre sur des tâches en amont des manifestations via un travail de renseignement et de démantèlement des individus les plus radicaux afin de les interpeller sur réquisition du procureur de la République avant leur arrivée sur les lieux de la manifestation. Il existe déjà dans le droit existant un délit d'association de malfaiteur spéciale qui permet de répondre à cet impératif.
Enfin, la mesure préconisée par l'article 2 est disproportionnée car elle conduit, de fait, à transposer dans le droit commun l'interdiction administrative de séjour de l'état d'urgence, concentrée aux manifestations sur la voie publique. La conciliation qui appartient au législateur « entre d'une part, l'exercice de ces libertés constitutionnellement garanties et d'autre part, la prévention des atteintes à l'ordre public » n'est plus assurée si elle conduit à faire entrer dans le droit commun une mesure réservée à des circonstances exceptionnelles.
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