Publié le 18 décembre 2018 par : M. Cordier, M. Cinieri.
Supprimer cet article.
Cet amendement supprime le présent article qui vise, à titre expérimental et pour une durée de trois ans à compter de l'entrée en vigueur du décret en Conseil d'Etat prévu pour sa mise en œuvre, à confier aux organismes débiteurs des prestations familiales la délivrance de titres exécutoires portant exclusivement sur la modification du montant d'une contribution à l'entretien et à l'éducation des enfants.
Cet article comporte en effet un certain nombre de risques.
D'abord, les organismes débiteurs des prestations familiales, à savoir les CAF, sont des personnes de droit privé qui n'offrent aucune garantie en termes d'indépendance et de respect des droits des parties. Or, le droit européen précise que seule une autorité indépendante peut régler des questions relatives aux obligations alimentaires en matière familiale. Le juge, indépendant et garant de l'intérêt supérieur de l'enfant, doit ainsi être seule habilité à fixer le montant de la pension alimentaire.
Par ailleurs, l'indépendance de la justice judiciaire est exigée par le premier alinéa de l'article 64 de la Constitution du 4 octobre 1958 et l'indépendance de la justice administrative par le principe fondamental reconnu par les lois de la République au sein de la loi du 24 mai 187 relative au Conseil d'État. Le Conseil constitutionnel considère, au-delà, que les principes d'indépendance et d'impartialité qui résultent de l'article 16 de la Déclaration de 1789 sont applicables à toutes les juridictions, ce qui comprend les autorités administratives ou les organismes privés chargés d'une mission de service public. Or, lorsque la CAF est amenée à statuer sur une demande de révision de pension alimentaire, elle exerce un pouvoir juridictionnel.
De plus, la barémisation des pensions alimentaires prévue par le texte risque de conduire à une automatisation de la procédure sans prise en compte de la diversité et de la complexité des situations personnelles. En présence de revenus complexes (dirigeants de société, revenus de patrimoine) et de situations disparates (crédits, mise à disposition gratuite du logement) la fixation de ce montant peut s'avérer compliquée et les barèmes inadaptés. Surtout, une révision du montant de la pension alimentaire n'est rarement qu'une question d'argent et résulte souvent d'un changement de vie pour l'une ou l'autre des parties. En supprimant le recours au juge, on prive ainsi les parents d'un espace de discussion pourtant indispensable.
Pour finir, il existe un réel risque de non-respect du principe de neutralité. Les CAF ont en effet le pouvoir de distribuer des prestations sociales mais aussi celui de sanctionner les bénéficiaires ou encore, dans le cas des pensions alimentaires, de se substituer au débiteur en cas de non-paiement. Le directeur de la CAF, disposant de l'ensemble de ces informations sensibles, seraient ainsi à tout à la fois juge et partie, ordonnateur et payeur dans certaines situations.
Les garanties d'indépendance et d'impartialité ne sont donc pas respectées.
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