Publié le 17 juin 2019 par : Mme Battistel, M. Potier, M. Bouillon, M. Garot, M. Letchimy, les membres du groupe Socialistes apparentés.
I. – Le titre II du livre V du code de l’énergie est complété par un chapitre V et un article L. 525‑1 ainsi rédigés :
« Chapitre V
« L’accès régulé des consommateurs électro-intensifs à l’énergie hydroélectrique
« Art. L. 525‑1. – I. – Les consommateurs électro-intensifs visés à l’article L. 351‑1 peuvent bénéficier de conditions particulières d’approvisionnement en énergie électrique pour ceux de leurs sites, figurant sur une liste établie par arrêté du ministre chargé de l’énergie, qui consomment de l’électricité de manière hyper-intensive au sens de l’article D. 351‑3 et pour les seuls besoins des procédés industriels qui y sont mis en œuvre et qui consomment l’électricité comme matière première, ainsi indispensable au fonctionnement du procédé industriel considéré.
« II. – Afin d’assurer la liberté de choix du fournisseur d’électricité tout en faisant bénéficier de la compétitivité du parc hydroélectrique français les procédés de fabrication des consommateurs mentionnés au I, il est mis en place, à titre transitoire, un accès régulé et limité à l’électricité produite par les installations de production hydroélectrique mentionnées au III. Cet accès est ouvert à tous les opérateurs fournissant les consommateurs finals mentionnés au I résidant sur le territoire métropolitain continental, à des conditions économiques équivalentes à celles résultant, pour les concessionnaires des installations de production hydroélectrique mentionnées au III, de l’exploitation de ces mêmes installations.
« III. – La liste des installations de production hydroélectrique mentionnées au II situées sur le territoire national, mises en service avant la publication de la loi n° du 2019 relative à l’énergie et au climat et faisant l’objet d’un contrat de concession est fixée par arrêté du ministre chargé de l’énergie, sur proposition de la commission de régulation de l’énergie.
« IV. – Pendant la période définie au IX, les concessionnaires des installations de production hydroélectrique mentionnées au III cèdent l’électricité produite, pour un volume maximal et dans les conditions définies aux V et VI, aux opérateurs fournissant les consommateurs finals mentionnés au I qui en font la demande et situés sur le territoire métropolitain continental. Les conditions de vente reflètent la moyenne des coûts comptables de production d’électricité par les installations de production hydroélectrique mentionnées au III et prennent en compte le rapport entre la consommation de chaque installation du consommateur final concerné mettant en œuvre l’un des procédés de fabrication mentionnés au I et la consommation de référence dudit procédé. Les conditions de vente correspondantes ainsi que la consommation de référence des procédés concernés sont définies par arrêté du ministre chargé de l’énergie, sur proposition de la commission de régulation de l’énergie.
« V. – Le volume global maximal d’électricité produite par les installations de production hydroélectrique mentionnées au III pouvant être cédé est déterminé par arrêté des ministres chargés de l’économie et de l’énergie, après avis de la commission de régulation de l’énergie, en fonction notamment du développement de la concurrence sur les marchés de gros de la production d’électricité et des prévisions d’évolution de la consommation des consommateurs mentionnés au I. Il demeure strictement proportionné aux objectifs poursuivis et ne peut excéder 15 térawattheures par an.
« VI. – Le volume cédé à un fournisseur pour un consommateur final mentionné au I est calculé pour chaque année par la commission de régulation de l’énergie, dans le respect du V et du présent VI. Ce volume est calculé en fonction des caractéristiques et des prévisions d’évolution de la consommation des installations concernées, ainsi que des engagements en matière d’efficacité énergétique pris par ce même consommateur final en application de l’article L. 351‑1 et est notifié au fournisseur et au consommateur final.
« VII. – Les concessionnaires d’installations de production hydroélectrique mentionnés au III bénéficient, le cas échéant, d’une compensation de l’éventuel différentiel, calculé par la commission de régulation de l’énergie, entre le prix de vente de l’électricité produite par leurs installations, déterminé par référence au prix du marché de gros de l’électricité, et le prix de l’accès régulé à l’électricité produite par leurs installations.
« VIII. – Un décret en Conseil d’État, pris après avis de la commission de régulation de l’énergie, précise les conditions d’application du présent article, notamment :
« 1° Les obligations qui s’imposent aux concessionnaires des installations de production hydroélectrique mentionnées au III en application des II et IV et les méthodes d’identification et de comptabilisation des coûts comptables mentionnés au IV ;
« 2° Les conditions dans lesquelles la commission de régulation de l’énergie calcule et notifie les volumes et propose les conditions d’achat de l’électricité en application du présent article et les conditions dans lesquelles les ministres chargés de l’économie et de l’énergie arrêtent ces conditions d’achat ;
« 3° Les modalités de compensation des concessionnaires prévues au VII.
« IX. – Le dispositif transitoire d’accès régulé à l’électricité hydraulique est mis en œuvre à compter de l’entrée en vigueur du décret mentionné au VIII et jusqu’au 31 décembre 2030. »
II. – La perte de recettes résultant notamment du 3° du VIII est compensée, à due concurrence, par la majoration du taux du 1° du B du 1 de l’article 200 A du code général des impôts.
Depuis la fin des tarifs régulés d’électricité et des contrats historiques bénéficiant aux industriels, il est apparu indispensable de soutenir les sites industriels mettant en œuvre des procédés hyper électro-intensifs fortement exposés à la concurrence mondiale, sachant que les conditions d’approvisionnement en électricité sont le facteur absolument déterminant de leur compétitivité. Pour ces industries, en effet, l’électricité ne sert pas seulement de force motrice : elle est la matière première principale, sans possibilité de substitution.
En 2015, députés et sénateurs ont donc voté la mise en place d’un dispositif temporaire d’accès régulé à l’énergie hydroélectrique ciblé sur les sites hyper-électro-intensifs, dans la cadre du projet de loi pour la croissance et l’activité. Ce dispositif a finalement été retiré, en échange d’une promesse du ministre de l’Economie de l’époque, M. Emmanuel Macron, de faciliter la signature de contrats d’approvisionnement compétitifs sur le long terme ; cette piste n’a malheureusement pas abouti.
C’est pourquoi, au regard de l’urgence de la situation, le présent amendement propose de nouveau l’option de 2015. Comme pour l’ARENH, ce dispositif permettrait aux fournisseurs ne disposant pas de parc hydroélectrique historique, de s’approvisionner dans des conditions similaires à celles des concessionnaires.
Les sites industriels concernés possèdent une capacité contributive certaine à la stabilité et à l’optimisation du système électrique, notamment par la capacité d’interruptibilité immédiate qu’ils offrent. A l’instar des régimes qui prévalent dans de nombreux pays de l’Union Européenne, il importe de prévoir un cadre réglementaire pluriannuel et pérenne garantissant, dans le contexte de la transition énergétique, le maintien de cette capacité contributive pour l’avenir.
L’accès spécifique à l’énergie hydroélectrique au profit des industries hyper électro-intensives donnera lieu à contrepartie de la part des bénéficiaires, notamment la poursuite d’un objectif d’efficacité énergétique sous la forme d’un mécanisme de modulation des conditions particulières d’approvisionnement en électricité en fonction du rapport entre la consommation réelle pour un exercice donné de chaque installation mettant en œuvre un procédé concerné et la consommation de référence dudit procédé.
Le dispositif ici proposé par les députés socialistes et apparentés permettra aux industriels concernés de rétablir leur accès privilégié à une source d’énergie qu’ils ont eux-mêmes contribué à développer historiquement ; il leur permettra d’exercer leur activité sans handicap de coût d’accès à leur matière première principale par rapport à la concurrence internationale.
Il s’inscrit par ailleurs en cohérence avec le discours de politique générale prononcé par le Premier ministre le 12 juin 2019 et qui soulignait la nécessité de développer et de préserver le patrimoine hydroélectrique français.
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