Publié le 18 juin 2019 par : M. Potier, Mme Battistel, M. Bouillon, M. Garot, M. Letchimy, les membres du groupe Socialistes apparentés.
Dans un délai d’un an à compter de la publication de la présente loi, le Gouvernement remet un rapport au Parlement formulant des propositions en matière de renforcement de la réglementation et des contrôles sur les procédés de méthanisation agricole et le respect des équilibres économiques et écologiques, notamment vis-à-vis de l’élevage, ainsi que des limites en matière de production végétale méthanisable. Le rapport étudiera également l’opportunité de mettre en place une labellisation « méthanisation verte ».
La méthanisation agricole a initialement été conçue comme une contribution positive à la transition énergétique et les lois et règlements adoptés ces dernières années ont visé, en lien avec les parties prenantes, à encadrer des projets afin de garantir leur ancrage territorial, leur dimension circulaire, l’équilibre agronomique et notre souveraineté alimentaire. Malgré ces efforts, la méthanisation agricole fait aujourd’hui l’objet de nombreuses controverses : risque de fragilisation de l’activité d’élevage, bilan écologique incertain des pratiques agricoles induites... Que l’échelle des désordres pressentis soit l’écosystème territorial ou celui de l’équilibre planétaire, les questions ainsi posées méritent d’être examinées avec sérénité dans le débat public.
Les sources des conflits latents tels que nous les observons sont de deux ordres.
Le premier est évidemment l’autorisation donnée entre 2011 et 2015 à quelques entreprises qui, profitant du vide juridique, ont mobilisé l’essentiel des ressources végétales vers la méthanisation plutôt que vers l’alimentation humaine et animale. Au regard des effets déstructurants au niveau local, notamment sur le marché foncier, il convient d’étudier toutes les limites envisageables pour arrêter le plus rapidement possible ces pratiques dévoyées.
La seconde dérive concerne la nouvelle génération de méthaniseurs à partir de 2017. Elle est plus systémique et se traduit de multiples façons :
- Les acteurs qui émergent sur ce marché sont les plus puissants sur le plan économique. La programmation pluriannuelle de l’énergie prévoit une baisse de plus de 30 % des tarifs d’achat du biométhane en injection, ce qui risque d’entraîner une massification de la production sur quelques structures pour réduire les charges de production. Ce type de structures concentre beaucoup de financements publics, laissant peu de disponibilité budgétaire aux projets plus intégrés ;
- La carte des réalisations et des projets correspond ainsi davantage à la sociologie des acteurs qu’à celle des ressources territoriales, notamment en effluents d’élevage ;
- La limite fixée en matière de production végétale méthanisable n’est pas respectée par certains opérateurs, faute d’un contrôle effectif. Ainsi le décret du 7 juillet 2016 fixant le seuil maximal des cultures alimentaires et énergétiques cultivées à titre principal et incorporées dans les méthaniseurs à 15 % est très facilement contournable ;
- L’effet inflationniste sur les matières premières végétales exacerbe les tensions avec le monde de l’élevage, notamment dans le cas des pénuries de fourrage liées aux épisodes de sécheresse ;
- Les pratiques d’épandage sur certains bassins versants peuvent induire des pollutions significatives faute de contrôles efficaces.
Ainsi, la méthanisation telle qu’elle est pratiquée aujourd’hui ne semble pas garantir systématiquement une compatibilité avec l’équilibre alimentaire et l’écologie, tant par les intrants que par l’épandage, du fait de contournements de la réglementation ou de manque de contrôles effectifs. Un véritable développement de la méthanisation à la ferme ne peut s’envisager qu’à travers la mise en place d’un tarif de rachat de l’énergie supérieur pour les petites unités, afin que celle-ci soient plus compétitives et puissent ainsi plus facilement se financer.
Il est devenu urgent de poser à nouveau les termes du débat en tirant parti des leçons de l’expérience allemande et de ses excès. Par ailleurs, il conviendrait de s’inspirer d’initiatives telles que la charte des bonnes pratiques en méthanisation à travers laquelle les Agriculteurs Méthaniseurs de France confirment leur engagement mutuel pour un développement vertueux, raisonné et harmonieux de la filière.
Le présent amendement demande donc au Gouvernement de rendre un rapport au Parlement formulant des propositions concrètes en matière de prévention et de sanction en cas de non-respect des équilibres attendus sur les plans économiques et environnementaux et sur l’opportunité de la mise en place d’un label « méthanisation verte » qui permettrait aux autorités compétentes de se prononcer en toute connaissance de cause sur les attributions d’urbanisme et d’aides publiques pour les projets de méthanisation.
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