Publié le 8 octobre 2019 par : M. Coquerel, Mme Autain, M. Bernalicis, M. Corbière, Mme Fiat, M. Lachaud, M. Larive, M. Mélenchon, Mme Obono, Mme Panot, M. Prud'homme, M. Quatennens, M. Ratenon, Mme Ressiguier, Mme Rubin, M. Ruffin, Mme Taurine.
Supprimer cet article.
Cet amendement vise à supprimer l’article 2 du PLF, qui propose une baisse de l’Impôt sur le Revenu (IR) de 5 milliards d’euros à partir des revenus de 2020.
En effet, alors que les écarts de richesse, les montants des dividendes versés aux actionnaires, l’évasion et la fraude fiscales s’élèvent à des niveaux jamais atteints, l’affaiblissement du seul impôt progressif par le Gouvernement met à mal la fonction redistributive de l’impôt déjà réduite à la portion congrue. Si l’on cumule l’ensemble des impôts, le système fiscal français est même d’ors et déjà régressif, donc anti-redistributif.
En effet, comme le démontre l’économiste Thomas Piketty, les prélèvements proportionnels, tels que les cotisations sociales (485 milliards d’euros) ou la CSG (99 milliards d’euros en 2017) pèsent très peu sur les revenus du capital et sur les hauts salaires, alors qu’ils pèsent proportionnellement bien plus sur les moyens et bas salaires. Il en va de même des impôts sur la consommation tels que la TVA (162 milliards d’euros) et les impôts sur les produits (essence, alcools, tabacs, etc. pour 106 milliards d’euros). En effet, du fait du caractère décroissant de la propension marginale à consommer, les contribuables les plus pauvres consomment la quasi-totalité de leur revenu, alors que les plus aisés peuvent en épargner une large part.
En accentuant le caractère régressif du système fiscal, l’exécutif s’aligne sur une position partagée par exemple par le Gouvernement de Viktor Orban, aux antipodes des valeurs républicaines.
Cette réforme, annoncée comme une réponse aux exigences en matière de justice fiscale exprimées par les citoyens lors des mobilisations hebdomadaires de ces onze derniers mois, constitue en réalité un nouveau cadeau fiscal aux contribuables aisés. Par une baisse ciblée sur les ménages situés dans les deux premières tranches d’imposition, le Gouvernement espère ainsi faire accepter la casse de l’État-providence (assurance-chômage, retraite, santé…). Mais ce cadeau fiscal est loin de bénéficier uniquement aux classes moyennes, comme le Gouvernement l’affirme. En effet, un célibataire se trouve dans la 2e tranche jusqu’à 6 700 euros par mois et un couple avec trois enfants jusqu’à 27 000 euros par mois ! Nous nous apprêtons donc à voter une baisse d’impôt qui nous touchera également nous autres, députés, alors que nous pouvons très bien nous permettre de continuer de payer le même montant d’impôt !
Les contribuables encore plus fortunés, qui se situent au-delà de la deuxième tranche d’imposition, ont quant à eux déjà largement bénéficié de la mise en place de la flat tax et de la suppression de l’ISF qui engendrent respectivement un manque à gagner pour l’État de 1,5 et de 3,2 milliards d’euros par an. Ils bénéficieront également de la suppression de la taxe d’habitation, élargie aux 20 % des contribuables les plus aisés, qui capteront à eux seuls 44,6 % des 17,6 milliards annuels amputés du budget de l’État pour financer ces baisses d’impôt, soit 8 milliards d’euros.
A l’inverse, les 57 % des ménages qui ne payent déjà pas l’impôt sur le revenu ne bénéficieront donc en aucun cas de cette mesure. En revanche, ils seront les premiers à souffrir des baisses de dépenses publiques qui entraînent le recul des services publics. De plus, en dépit des annonces initiales du Gouvernement, la réduction des niches fiscales visant à financer la réforme ne sera que de 600 millions d’euros. Un chiffre dérisoire en comparaison aux 5 milliards d’euros par an que coûteront la réforme et aux 100 milliards d’euros que coûtent chaque année ces niches fiscales.
Les contribuables les plus modestes, qui ne payaient déjà pas la taxe d’habitation avant sa suppression et qui ne payent pas l’impôt sur le revenu sont les grands perdants de de ces mesures fiscales.
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