Publié le 7 novembre 2017 par : Mme Fiat, M. Coquerel, Mme Taurine, Mme Rubin, Mme Ressiguier, M. Ratenon, M. Prud'homme, Mme Obono, Mme Panot, M. Mélenchon, M. Lachaud, M. Larive, M. Corbière, M. Quatennens, M. Ruffin, M. Bernalicis, Mme Autain.
Supprimer l'alinéa 3.
Cet amendement supprime l'ordonnance relative à la nouvelle organisation du mal nommé “dialogue social”, puisqu'elle le met à mal, et dévalorisant et réduisant les responsabilités syndicales, puisqu'elle rend la négociation possible sans syndicats. Cette ordonnance fusionne des instances représentatives du personnel qui sont le résultat de longues évolutions historiques et de combat du mouvement ouvrier pour que les salariés obtiennent une part de souveraineté sur leur travail.
Ce n'était pas par goût pour la complexité que Délégué du Personnel, Comité d'Entreprise et Comité d'Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail étaient séparés, mais bien parce que ces trois instances remplissent des missions bien différentes et qui se devaient d'être distinctes car elles suivent des logiques différentes qui requieraient une sensibilité et une expertise spécifique. Désormais, celles et ceux qui étaient chargés de se concentrer sur la sécurité et la santé des salariés seront aussi associé aux réflexions sur la situation financière de l'entreprise.
Rien ne garantit que les salariés soient bien représentés par ce nouveau Conseil Social et Économique, dans la mesure où les heures de délégations seront fixées par décrets.
Ce qui est certain, c'est que la mission de proximité des délégués du personnel et des élus du CHSCT, les plus proches des sites et des salariés, sera gommée dans cette instance unique.
Ensuite, en ayant face à lui un seul interlocuteur que plusieurs instances, le patronat sera renforcé dans un rapport de force qui ne correspond certainement pas au “dialogue social” que l'ordonnance prétend promouvoir.
Les moyens en temps et en argent des instances seront réduits dans cette instance unique, puisque l'on passe d'un minimum légal de 12 réunions du CE et 4 réunions du CHSCT annuelles à 12 réunions annuelles pour le CSE qu'instaure cette ordonnance.
Les moyens financiers du CSE seront inférieures à celui des instances jusqu'alors existantes, puisque 20 % du budget d'une expertise ne sera plus assuré par l'employeur. Depuis 1982, le Comité d'Entreprise disposait d'un budget de fonctionnement d'un montant annuel correspondant à 0,20 % de la masse salariale, auquel s'ajoutait une contribution destinée aux activités sociales et culturelles, mise en place depuis 1945 et négociable au sein de l'entreprise. Le CHSCT, quant à lui, devait se voir fournir par l'employeur “les moyens nécessaires à la préparation et à l'organisation des réunions et aux déplacements imposés par les enquêtes ou inspections” (Article L. 4614‑9 du Code du travail) mais aussi la prise en charge complète des frais d'expertise qu'il pouvait déclencher en cas de soupçon de menace sur la santé et la sécurité des salariés.
Le CSE qui combine les fonctions du CHSCT et du CE devra prendre en charge l'expertise à hauteur de 20 %, sur son budget de fonctionnement, qui ne sera pas augmenté par la transition, sauf pour les entreprises de plus de 2000 salariés dont l'instance réunie verra son budget augmenter de … 0,02 %. Les élus vont donc devoir opérer des choix et renoncer à des expertises, notamment dans les entreprises moyennes qui ne voient pas leur budget augmenter. Le CSE est donc une instance paralysée par une asphyxie financière.
L'égalité professionnelle est également menacée par la fusion des instances représentatives. C'est ce qu'explique le Conseil Supérieur de l'Égalité Professionnelle dans son avis rendu publique le 8 septembre dernier : “ Les femmes seront particulièrement pénalisées par la fusion des IRP et la disparition du CHSCT.
Des attributions d'actions n'apparaissent plus dans le texte (consultations, pouvoir d'enquête, etc.) et les moyens sont minorés (droit à l'expertise indépendante, budget). Or le CHSCT permet de mettre en place des actions de prévention et de protection , notamment dans les cas de harcèlement et violences sexuelles , et son expertise s'est considérablement renforcée, notamment sur les risques « invisibles » auxquels sont exposés les métiers à prédominance féminine (RPS, TMS). Ceci est d'autant plus dommageable pour les femmes que la sous-évaluation des risques professionnels auxquelles elles sont confrontées avait enfin été reconnue par la loi du 4 août 2014 qui prévoit l'évaluation sexuée des risques.”
Enfin, les auteurs de cet amendement attirent l'attention de la représentation nationale sur le fait que l'ordonnance n°2 ne correspond à aucun besoin dans les entreprises : Depuis la loi Rebsamen de 2013 instaurant la possibilité, par accord d'entreprise, de fusionner les instances en une Délégation Unique du Personnel (DUP), une douzaine d'accords seulement ont été signés. Pourquoi instaurer de façon autoritaire une mesure qui n'a pas été choisie par le terrain ? Pour renforcer l'employeur dans ses prérogative et réduire la souveraineté des salariés. C'est l'inverse du dialogue social. Ce sont les conditions d'un monologue patronal que cette ordonnance instaure.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cet amendement.