Projet de loi N° 2488 relatif à la communication audiovisuelle et à la souveraineté culturelle à l'ère numérique

Amendement N° AC673 (Rejeté)

Publié le 28 février 2020 par : Mme Ressiguier, Mme Autain, M. Bernalicis, M. Coquerel, M. Corbière, Mme Fiat, M. Lachaud, M. Larive, M. Mélenchon, Mme Obono, Mme Panot, M. Prud'homme, M. Quatennens, M. Ratenon, Mme Rubin, M. Ruffin, Mme Taurine.

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Compléter cet article par l’alinéa suivant :

« Le contenu des communications commerciales audiovisuelles ne peut être fonction d’un traitement automatisé de données à caractère personnel. »

Exposé sommaire :

Par cet amendement nous nous opposons au projet d’autorisation de la publicité dite « segmentée » par décret annoncé par le ministre de la culture M. Riester lors d’une interview donnée à France Inter le 13 février dernier.

La publicité segmentée est la possibilité de réaliser une publicité « ciblée », en fonction de critères particuliers (la localisation, mais aussi le niveau de revenu, la composition du foyer, etc.) à destination des téléspectateurs via une télévision connectée ou une box.

Nous refusons ce nouveau type de publicité pour deux raisons .

D’abord, tout comme l’Association Répression à l’Agression Publicitaire (RAP), nous pensons que la présence de la publicité est un facteur d’homogénéisation des programmes et nuit gravement au pluralisme. « Les chaînes qui vivent exclusivement de la publicité ont tendance à programmer des émissions propices à rendre disponibles les cerveaux aux messages commerciaux » écrit l’association. C’est en effet le fameux « temps de cerveau disponible » mis en avant sur TF1. L’association cite à ce sujet le rapport du Conseil des droits de l’homme, publié le 8 août 2014 et présenté à l’Assemblée Générale des Nations Unies le 28 octobre 2014 : « Pour attirer les publicitaires, les chaînes doivent capter l’attention des publics ciblés par les entreprises commerciales. Des études ont montré l’influence de la publicité sur le contenu des émissions, certaines chaînes ne proposant aucune émission aux groupes cibles ayant un faible pouvoir d’achat ». Ouvrir la possibilité de la publicité ciblée à la télévision accentuera encore ce phénomène : pourquoi ne pas adapter les programmes au public cible le plus rentable ?

Ensuite, le développement de la publicité ciblée sur internet s’est accompagné de la violation des droits à la vie privée de millions de personnes en France. On ne rappellera jamais assez que le modèle ici proposé à la télévision française est celui de Google qui a été condamné par la CNIL à une amende de 50 millions d’euros en raison de la gravité des manquements constatés aux principes essentiels du RGPD : la transparence, l’information et le consentement. A nouveau, le rapport des Nations Unies cité par l’association RAP est éclairant : « on prétend souvent que le consommateur renonce à sa vie privée et consent à devenir la cible de messages publicitaires, en particulier dans la sphère numérique, pour pouvoir obtenir des produits et des services à des prix plus avantageux. La rapporteuse spéciale note toutefois que dans bien des cas, consommateurs et citoyens ne sont pas pleinement conscients que leur vie privée est en train d’être violée, ni dans quelle mesure elle l’est, et de ce que cela implique sur le plan de leur liberté de pensée et d’opinion. »

M. Riester assure qu’un cadre protecteur de la vie privée sera posé. Nous venons de montrer que cela n’est pas possible.

M. Riester ajoute dans cette même interview que grâce à de dispositif, les chaînes de télévision auront la possibilité d’avoir « les mêmes outils modernes de publicité pour augmenter leur volume de publicité, pérenniser leur modèle économique. […] On a besoin de ces acteurs français. » Nous affirmons que nous avons en effet besoin de chaînes de télévision françaises puissantes, mais que notre modèle ne peut être celui qui bafoue les droits des citoyens à avoir une vie privée, ni celui d’un paysage audiovisuel aux ordres des grandes entreprises privées.

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