Publié le 8 juin 2020 par : Mme Bagarry, Mme Batho, Mme Gaillot, Mme Wonner, Mme De Temmerman, Mme Tuffnell, M. Chiche, Mme Chapelier, M. Orphelin, M. Julien-Laferrière, Mme Yolaine de Courson.
Supprimer cet article.
L’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale a créé la CADES afin d’apurer la dette des organismes de sécurité sociale constituée du fait d’un déséquilibre existant alors entre leurs recettes et leurs dépenses.
Cette dette sociale, grâce à de l’effort significatif des organismes concernés, et en conséquence des Français en matière de dépenses sociales, devait arriver à échéance en 2024 ; l’équilibre des régimes généraux et obligatoires de sécurité sociale en passe d’être réalisé et une gestion suffisamment ambitieuse de la CADES permettait d’envisager, pour les Français, la fin du « trou de la sécu » qui a été une source d’inquiétude durable pour la pérennité des politiques sociales. Et c’était pour eux aussi la perspective d’une libération de la CRDS, qui comme ça CSG constitue une forme d’imposition minimale sur le revenu que quasi chaque français acquitte, loin des caricatures des 50 % de français non redevables de l’impôt sur le revenu des personnes physiques, plus faible en rendement d’ailleurs.
L’article 1er du projet de loi organique propose de prolonger la durée de vie de la CADES afin de lui transférer 92 Milliards euros de dette supplémentaires. Celle-ci n’est pas le fruit d’un déséquilibre de gestion des caisses de sécurité sociale, elle est le produit d’une crise conjoncturelle issue de la récession provoquée par la diffusion du virus SARS-CoV-2, une « dette Covid » comme l’a définie l’économiste Michaël Zemmour.
Pourtant, la prolongation jusqu’en 2033 de la CADES permettra de transformer cette dette covid en dette sociale alors que dans les mois et années qui viennent, la sécurité sociale pourrait voir ses recettes et ses dépenses durablement affectées par la récession, dans une société exposée au risque à minima conjoncturel de s’appauvrir ; une telle disposition semble nécessairement restreindre le champ d’action de la sécurité sociale au moment où celle-ci devra répondre à des besoins assurantiels conséquents.
Par ailleurs, une telle disposition privera le législateur de moyens substantiels pour répondre à un grand défi du XXI° siècle, pour lequel aucune réponse suffisante n’est encore apportée : le Grand âge et l’autonomie. En prolongeant ipso facto la CRDS, et une part affectée de la CSG, jusqu’en 2033 pour rembourser la « dette covid », il se prive de moyens considérables qui auraient pu être réaffectés à la création d’une cinquième branche: le rapport Libault sur le financement de l’autonomie évalue à 6,3 Mds euros les besoins de financement supplémentaires à partir de 2024, puis à 9,2 Mds euros à compter de 2030. (Rapport de Dominique Libault remis le 28 mars 2019, https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/rapport_grand_age_autonomie.pdf).
Alors que l’Etat serait en capacité de reprendre cette dette dans de biens meilleures conditions – appuyée par la politique monétaire non conventionnelle de la Banque centrale européenne – le prolongement de la CADES ne serait pas stratégique, au regard des enjeux à venir pour la sécurité sociale. Il ne serait pas justifié, au regard des missions initiales confiées à la CADES, et ce qui posera des interrogations juridiques constitutionnelles et conventionnelles, et cela aura possiblement des conséquences très lourdes pour les Français en situation de fragilité.
Pour l’ensemble de ces raisons, cet amendement appelle à tout particulièrement considérer ce transfert de dette et supprime par voie de conséquence le prolongement de la CADES.
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