Publié le 2 mars 2021 par : M. Orphelin, Mme Batho, Mme Bagarry, Mme Cariou, M. Chiche, Mme Forteza, Mme Gaillot, M. Julien-Laferrière, Mme Valérie Petit, M. Villani.
Après l’article L. 211‑20 du code de l’organisation judiciaire, il est inséré un article L. 211‑21 ainsi rédigé :
« Art. L. 211‑21. – Un ou plusieurs tribunaux judiciaires spécialement désignés connaissent des actions relatives au devoir de vigilance fondées sur les articles L. 225‑102‑4 et L. 225‑102‑5 du code de commerce. »
Cet amendement a pour objet de permettre d’attribuer compétence à un ou plusieurs tribunaux judiciaires qui seront désignés par décret pour connaître des actions fondées sur les articles L. 225- 102-4 et L. 225-102-5 du code de commerce, relatifs au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre, instauré par la loi n°2017-399 du 27 mars 2017.
Ce devoir de vigilance se matérialise par l’obligation de réaliser un plan de vigilance permettant d’identifier les risques et de prévenir les atteintes graves à l’environnement mais aussi envers les droits humains et les libertés fondamentales, la santé et la sécurité des personnes, par l’obligation de le mettre en œuvre de manière effective et de le publier. Il n’est pas souhaitable d’étendre la compétence des pôles civils environnementaux prévus par l’article 8 bis A de ce projet de loi, dès lors que le devoir de vigilance excède la seule matière environnementale et que le caractère à la fois restreint en volume et très spécifique de ce contentieux ne justifie pas la spécialisation d’une juridiction par cour d’appel.
Une clarification de la compétence juridictionnelle pour ce contentieux qui touche à l’environnement est néanmoins nécessaire. En effet, conformément à l’article 1Er de la loi n°2017-399, la mise en demeure infructueuse d’une société de respecter les obligations prévues au I de cet article peut donner lieu à la saisine d’une juridiction à la demande de toute personne justifiant d'un intérêt à agir. Le président du tribunal, statuant en référé, peut être saisi aux mêmes fins. En outre, conformément à l’article 2 de la loi n°2017-399, la responsabilité des auteurs de manquements au devoir de vigilance peut être engagée dans les conditions de la responsabilité civile extracontractuelle, telles que prévues aux articles 1240 et 1241 du code civil. Cependant, les premières actions judiciaires en cours soulignent l’existence d’une incertitude entre compétence du tribunal judiciaire et compétence du tribunal de commerce.
Cet amendement permet de lever cette incertitude. La volumétrie de ce contentieux complexe est nécessairement limitée dès lors que cette obligation ne concerne que les entreprises d’une certaine dimension, ce qui justifie pleinement la spécialisation d’un ou plusieurs tribunaux judiciaires. Par ailleurs, la forte technicité de ce contentieux justifie qu’il soit confié à des magistrats particulièrement spécialisés. Cet amendement est issu d'un travail conjoint avec le cabinet du garde des Sceaux et le député Dominique Potier, rapporteur de la loi sur le devoir de vigilance en 2017.
Cet amendement est issu d'une proposition de l'UICN portée par Matthieu Orphelin en Commission des Lois au Projet de loi Parquet européen et Justice Pénale Spécialisée et qui a été retravaillée avec les acteurs cités pour parvenir à cette écriture.
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