Publié le 2 mars 2021 par : M. Potier, M. Leseul, M. Garot, Mme Jourdan, Mme Battistel, M. Jean-Louis Bricout, M. Juanico, M. Letchimy, Mme Manin, M. Naillet, Mme Untermaier.
I. – Au plus tard vingt-quatre mois après la promulgation de la présente loi, un comité scientifique, dont les membres exercent à titre bénévole, évalue l’impact environnemental et social des dispositions des articles 16, 17 et 18 de la présente loi relatives à l’adaptation de l’emploi à la transition écologique et d’éventuelles nouvelles mesures relatives à l’emploi et à l’organisation des entreprises, telle qu’une limitation des écarts de rémunération.
II. – Un décret en Conseil d’État définit les modalités d’application du présent article.
Cet amendement du Groupe Socialistes et apparentés vise à instaurer un comité scientifique évaluant l’impact environnemental et social de différentes mesures relatives à l’emploi et à l’organisation des entreprises, notamment des mesures de ce projet de loi, mais aussi d’éventuelles nouvelles mesures telle qu’une limitation des écarts de salaires prévue par la proposition de loi « pour une limite décente des écarts de revenus » portée par Dominique POTIER et l’ensemble des députés de notre groupe.
La démesure de certaines rémunérations entraîne des modes de vie incompatibles avec un développement soutenable de l’économie. Citant une étude canadienne, Gaël Giraud et Cécile Renouard précisent que « l’empreinte écologique augmente nettement avec les revenus. [...] La hausse la plus nette en termes d’empreinte écologique se situe entre le neuvième décile et le dernier décile » [1].
Plusieurs études récentes montrent que les écarts de rémunération actuels auraient un effet néfaste sur la préservation des écosystèmes. Les 1 % les plus riches – soit environ 63 millions de personnes – émettaient deux fois plus de CO2 que la moitié la plus pauvre de l’humanité entre 1990 et 2015 [2]. Selon les économistes Thomas Piketty et Lucas Chancel, les 10 % des ménages les plus émetteurs sont responsables d’environ 40 % des émissions de gaz à effet de serre en 2015 tandis que les 40 % les moins émetteurs représentent moins de 8 % des émissions [3].
Par ailleurs, une telle réallocation des ressources donnerait aux salariés dont les revenus sont situés dans les premiers déciles la capacité à participer et à bénéficier de la transition sociale et écologique dans les champs de l’alimentation, du logement ou encore de la mobilité. La justice sociale est le levier le plus efficace de la lutte contre le changement climatique et de prévention en santé publique.
Limiter les écarts de salaire est donc constitutif du contrat social, mais aussi de notre dessein économique et écologique commun. La démesure dans la concentration des richesses génère des modes de vie incompatibles avec un développement soutenable dans un monde aux ressources limitées : l’appât du gain et le consumérisme mimétique nous enferment dans une normalité marchande qui épuise nos vies et la planète. À l’inverse, poser une limite à la possession matérielle ouvre la voie à un rééquilibrage avec d’autres sphères de l’existence.
Cet amendement contribue à l’atteinte de l’objectif « - de carbone + de justice » porté par les députés Socialistes et apparentés.
[1] H. Mackenzie, H. Messinger, R. Smith, Size Matters. Canada’s Ecological Footprint, by Income, étude du Canadian Center for Policy Alternatives, juin 2008.
[2] Oxfam, « Combattre les inégalités des émissions de CO2 », 21 septembre 2020.
[3] L. Chancel et T. Piketty, Carbon and Inequality : From Kyoto to Paris. Trends in the Global Inegality of Carbon Emissions (1998‑2013) & Prospects for an Equitable Adaptation Fund, Paris School of Economics.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cet amendement.