Amendement N° 66 (Rejeté)

L’argument mis en avant pour justifier cet allongement des délais est que des femmes dépasseraient le délai légal et seraient alors « contraintes » d’aller avorter à l’étranger. Le chiffre avancé, de 3 000 et 5 000 femmes chaque année est identique à celui annoncé, lors de l’allongement des délais de 10 à 12 semaines de grossesse en 2001. Cela repose également sur la supposition que des femmes auraient eu des difficultés d’accès à l’avortement pendant le confinement, sans pour autant apporter de preuves.

En réalité, nous ne disposons d’aucune analyse fiable ni sur les chiffres ni sur les raisons pour lesquelles un certain nombre de femmes iraient à l’étranger. Ces données pourraient éclairer sur les carences éventuelles des politiques publiques et les politiques de prévention à conduire.

Avorter tardivement à plus de trois mois de grossesse est très violent pour les femmes, d’autant que sur un plan médical, l’IVG est rendue plus complexe compte tenu de la plus grande taille du fœtus.

D’où vient la limite de 14 semaines qui est avancée au lieu de 12 ? La réponse nous a été donnée par notre collègue Elsa Faucillon, lors de notre dernier débat sur l’évaluation des politiques publiques en matière d’accès à l’IVG. Je la cite:

“L’allongement de ce délai se cale sur la technique d’avortement utilisée. A 12 ou 14 semaines de grossesse, il est encore possible de procéder à un avortement par aspiration.”

Qu’est-ce qu’un enfant à quatorze semaines, et qu’est-ce qu’un avortement par aspiration ?

A 14 semaines, le bébé mesure presque 14 cm pour près de 100 g. Si c’est un garçon, le gland et le prépuce se forment. Les proportions de son corps s’harmonisent, le squelette se solidifie.Il peut plier les doigts, serrer les poings ou sucer son pouce. Il commence également à donner quelques coups, trop faibles encore pour être ressentis.

L’avortement par aspiration est une opération intégralement réalisée sous anesthésie générale, elle consiste à le déchiqueter et à aspirer les restes. Souvent, la paroi de l'utérus est « contrôlée » avec une curette, c’est à dire un instrument en forme d'une petite cuillère, et d'éventuels résidus du fœtus sont évacués.

Ce n'est donc pas une intervention anodine, et elle peut avoir des conséquences, y compris psychologiques, sur les femmes qui y ont recours.

C'est pourquoi il convient de faire preuve de sagesse et de prudence, en ne repoussant pas le délai d'IVG au delà de sa limite légale actuelle.

Tel est le sens de cet amendement.