Publié le 21 juin 2021 par : M. Ruffin, Mme Autain, M. Bernalicis, M. Coquerel, M. Corbière, Mme Fiat, M. Lachaud, M. Larive, M. Mélenchon, Mme Obono, Mme Panot, M. Prud'homme, M. Quatennens, M. Ratenon, Mme Ressiguier, Mme Rubin, Mme Taurine.
Après le premier alinéa du II de l’article L. 1 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Pour l’atteinte des finalités de la politique en faveur de l’agriculture et de l’alimentation mentionnées au I du présent article, et compte tenu de sa nature particulière, le secteur agricole bénéficie d’un traitement différencié dans le cadre des négociations commerciales internationales. Cette exception agriculturelle prend acte des différences de niveau d’information en fonction de l’origine des produits agricoles et donc des potentiels liens entre origine extra-communauté et caractéristiques des produits agricoles, notamment en matière de santé publique et de protection des consommateurs. »
Cet amendement est le fruit d’une réflexion ancienne et d’une actualité récente comme le montre la réaction de défiance quasi unanime des paysans aux négociations d’un accord commercial avec le MERCOSUR, qui risque de faire du Brésil la « ferme-usine du monde » et d’inonder encore plus nos marchés de viandes bovine.
Cette exception agriculturelle prend acte des différences de niveau d’information en fonction de l’origine des produits agricoles et donc des potentiels liens entre origine extra-communauté et caractéristiques des produits agricoles, notamment en matière de santé publique et de protection des consommateurs.
Nous en avions discuté notamment avec la Fondation pour la Nature et l’Homme, anciennement Fondation Nicolas Hulot lors de la loi EGALIM. Il est d’ailleurs intéressant de noter que le ministre de la transition écologique et solidaire de l’époque était signataire d’une tribune publiée dans Libération en 2016 qui demandait la reconnaissance d’ « une exception agri-culturelle dans les échanges internationaux. »
Cet amendement propose donc d’instaurer une exception au secteur agricole sur le modèle de l’exception culturelle. En effet, lors des négociations de l’OMC en 1992, avait été instauré une exception culturelle pour les échanges internationaux, mais pas pour les produits agricoles et alimentaires. La France et l’Union européenne ont alors copié pour la réforme de la PAC le modèle alors en vigueur aux États-Unis de marchés agricoles réglementés, exposés aux quatre vents de la concurrence internationale et donc aux dumpings sociaux et environnementaux associés. Depuis 1992, la PAC a abandonné le principe d’un prix défini au niveau européen pour accepter que les prix mondiaux dictent leur loi, notamment à la Bourse de Chicago pour les céréales. Pourtant, dans le même temps, les États-Unis d’Amérique sont depuis revenus sur leur modèle et protège leur propre agriculture avec un filet de sécurité d’environ 200 dollars la tonne de blé. Pour la Chine, le prix d’achat et de vente d’une tonne de blé ne peut être inférieure à 380 dollars. Nos paysans français et européens sont eux exposés à la volatilité des prix mondiaux, certes aujourd’hui remonté à 230 dollars la tonne.
L’agriculture sert trop souvent de monnaie d’échange dans les négociations des accords commerciaux au détriment des paysans européens, avec des effets délétères pour les paysans des pays avec lesquels sont signés ces accords commerciaux. Nous défendons au contraire le principe de souveraineté alimentaire, soit le droit des peuples à se nourrir eux-mêmes.
Et ce n’est pas le principe de « clauses miroirs » aux alouettes défendues par la France dans le cadre de négociation du MERCOSUR qui y changeront quelque chose. Car comme il a été indiqué par le ministre lui-même lors des auditions, le niveau d’information sur les produits importés extra-communautaires n’est pas le même que sur les produits français et communautaires. Et comment des services des douanes soumis à des réductions d’effectifs continues ces dernières années pourraient contrôler ce qui se passe ailleurs alors même que les règles de traçabilité sont très différentes entre pays et notamment pour les bœufs brésiliens.
Répondre aux défis climatique et alimentaire du XXIe siècle impose une révolution dans nos approches de l’économie agricole. Les échanges de productions agricoles sont bien souvent absurdes. Comment justifier qu’un légume ou un fruit fasse des milliers de kilomètres avant d’être consommé ? Il est important de diversifier la production et d’adapter notre consommation aux cycles naturels.
Enfin, la nourriture ne peut être considérée comme une marchandise comme les autres. Il s’agit de produits vitaux qui ont des impacts sur la santé et sur le dérèglement climatique. Pour toutes ces raisons nous estimons qu’il est nécessaire et urgent de reconnaître une exception agri-culturelle dans les échanges internationaux.
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