Publié le 9 septembre 2021 par : Mme Untermaier, Mme Lamia El Aaraje, Mme Karamanli, M. Saulignac, les membres du groupe Socialistes et apparentés.
La première phrase du dernier alinéa de l’article L. 632‑7 du code de l’éducation est complétée par les mots : « avant le 31 décembre 2021 ».
Le présent amendement du groupe socialistes et apparentés vise à mettre en place un système de bourses pour attirer les internes de médecine psychiatrique vers l’activité d’expertise judiciaire afin de pallier la carence d’experts en la matière.
L’état de la psychiatrie en France est en effet préoccupant. La démographie des psychiatres est en chute libre. Depuis 2012 en moyenne, 4% des postes d’internes sont non pourvus. Ce phénomène s’est accentué ces dernières années : en 2019, 17 % des places d’internes en psychiatrie sont restées vacantes, 11 % en 2020. Sur l’année scolaire 2020-2021, la psychiatrie a été l’une des spécialités les moins attractives des futurs internes : sur 44 spécialités, cette dernière arrive 40ème.
Plus spécifiquement, il est constaté une diminution drastique des psychiatres inscrits sur la liste des cours d’appel, et ce, dès le début des années 2010. Le nombre de psychiatres inscrits sur la liste des cours d’appel est passé de 537 en 2011 à 338 en 2017. Paradoxalement, dans le même temps, la demande d’expertise s’est accrue. Le nombre d’expertises psychiatriques réalisées sur les auteurs d’infractions pénales entre 2002 et 2009, pour un nombre constant d’experts psychiatres, a augmenté de 149%. Alors qu’en 2002, le ratio était de 61 expertises par expert psychiatre par an, celui-ci a été porté en 2009 à 151.
La psychiatrie souffre d’un problème d’attractivité car trop peu valorisée et considérée. Les autres spécialités jugées plus nobles sont préférées, à l’instar de la cardiologie ou la chirurgie. De nombreux préjugés entourent ce domaine, ceux-ci découlent du regard que la société porte sur la maladie mentale, encore stigmatisée. Enfin, la psychiatrie reste le parent pauvre de la médecine et constitue une variable d’ajustement budgétaire dans les hôpitaux. Peu de moyens y sont alloués. Plus de 30 000 lits ont été supprimés en service psychiatrique entre 1993 et 2018. Le manque d’enseignants est également patent : en 2017, un professeur pour 25 étudiants contre un pour quatre en cardiologie. Enfin, le manque d’attractivité s’explique par une faible rémunération, qui est peu évolutive, en deçà des autres professions libérales médicales et d’autant plus pour l’expertise pénale : une expertise pénale est moins rémunérée qu’une expertise psychiatrique au civil.
Les conséquences de cette carence en experts sont nombreuses : des longs délais de dépôt des rapports, impactant la durée des détentions provisoires et des informations judiciaires, une organisation de dualité d’experts rendue difficile et des computations chronophages.
La mise en place d’un système de bourses permettant de rendre la profession plus attractive était prévue par l’article 9 de la loi n° 2012-409 du 27 mars 2012 de programmation relative à l’exécution des peines. Celui-ci prévoyait en effet la signature par les étudiants d’un contrat d’engagement « relatif à la prise en charge psychiatrique de personnes sur décision de justice, ouvrant droit à une allocation en contrepartie, d’une part, du suivi d’une formation en sciences criminelles, en psychiatrie légale ou en psychologie légale, relative à l’expertise judiciaire ou à la prévention de la récidive et, d’autre part, de leur inscription, une fois leurs études terminées, pour une durée minimale de deux ans sur une des listes d’experts judiciaires près les cours d’appel, lorsque le nombre des experts judiciaires y figurant est insuffisant ».
Toutefois, le décret en Conseil d’Etat nécessaire à l’instauration de cette mesure et prévu par l’alinéa 6 dudit article n’a jamais été promulgué. Aussi, le présent amendement rend cette disposition obligatoire et de ce fait, contraint le Conseil d’Etat à publier un décret avant le 31 décembre 2021.
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