Responsabilité pénale et sécurité intérieure — Texte n° 4387

Amendement N° CL270 (Non soutenu)

(6 amendements identiques : CL94 CL177 CL134 CL200 CL172 CL191 )

Publié le 10 septembre 2021 par : M. Orphelin, Mme Bagarry.

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Supprimer cet article.

Exposé sommaire :

La nouvelle infraction issue du présent article - à “caractère inédit” selon le Conseil d’Etat dans son avis, tend à pénaliser rétroactivement un comportement potentiellement constitutif d’une mise en danger d’autrui, au vu d’un résultat qui n’est pas pénalement imputable à l’auteur en raison de l’aboluition de son discernement. Elle ouvre la porte à des débats concernant la pénalisation accrue d’autres comportements à l’origine d’une irresponsabilité ou d’une non-imputabilité.

A titre d’exemple, l’individu qui prend le volant de son véhicule après avoir consommé de l’alcool ou des stupéfiants ne serait plus désormais poursuivi pour homicide involontaire aggravé mais pour homicide volontaire dès lors que la prise de toxique est intervenue en connaissance de cause des risques qu’elle générait, et ce quand bien même il s’agirait d’une ivresse pathologique.

Cela pose également des difficultés d’ordre juridique ou pratique :

- au moment de l’intoxication volontaire, tous les éléments constitutifs de l’infraction ne sont pas encore réalisés et le délai dans lequel ils doivent l’être n’est pas défini ;

- La question de l’existence d’un élément intentionnel limité au seul premier élément constitutif (l’intoxication) et non exigé lors de la survenue des autres éléments constitutifs de l’infraction. L'élément intentionnel de l’intoxication reposerait sur une fiction juridique : la nécessaire conscience qu’aurait tout individu que la prise de produits psychoactifs peut entraîner une perte de contrôle, laquelle peut inciter à commettre des violences. Or, chacun ne réagit pas de la même façon à la consommation de tels produits et ne décompense pas sur le même mode. La preuve de l’élément intentionnel fera nécessairement l’objet de discussions particulièrement soutenues par les parties et les experts.

- Le fait que l’un des éléments constitutifs de l’infraction repose sur l’existence d’une décision d’irresponsabilité pénale sans qu’il ne soit exigé que cette décision soit définitive, sauf à porter atteinte à la présomption d’innocence (dont les modalités du renforcement sont par ailleurs actuellement étudiées par la commission Guigou).

- La question ne pourra être occultée du discernement de l’auteur au moment de son intoxication volontaire, ainsi que, le cas échéant, celle de sa capacité à comparaître en justice après une déclaration d’irresponsabilité pénale le concernant.

- La difficulté tenant au fait de considérer indistinctement une précédente décision d'irresponsabilité pénale comme un premier terme de récidive, ou comme une circonstance aggravante, aboutissant clairement à sanctionner la maladie mentale, contrairement aux affirmations de l’exposé des motifs du projet.

- Le projet imposera à l’autorité de poursuite de respecter un mécanisme en deux temps et donc assez complexe : engager des poursuites sur des faits de violences, constater qu’une décision d’irresponsabilité pénale intervient (prise le plus souvent par le juge d’instruction ou la chambre de l’instruction) et enclencher alors des poursuites nouvelles en visant les infractions posées par les articles 221- 5-6 et 222-18-1 du code pénal.

Finalement, ce texte risque d’allonger la durée des procédures pénales et de renforcer les débats techniques liés à l’état de santé mentale de la personne poursuivie et ainsi, paradoxalement, renforcer le rôle et le pouvoir d’appréciation des experts psychiatres et des magistrats, lesquels ont fait l’objet de nombre de critiques dans les virulents débats qui ont suivi l’arrêt du 14 avril 2021.

Cet amendement est issu d’une proposition de l’Unité Magistrats (SMN-FO) et de l’Union syndicale des magistrats (USM).

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