Publié le 12 février 2018 par : Mme Karamanli, Mme Untermaier, M. Saulignac, M. David Habib, les membres du groupe Nouvelle Gauche.
Après l'alinéa 20, insérer les cinq alinéas suivants :
« c) Après le même alinéa, sont insérés quatre alinéas ainsi rédigés :
« L'article 11 de la directive n° 2013/33/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant des normes pour l'accueil des personnes demandant la protection internationale est garanti pour les personnes faisant l'objet des mesures prévues au présent article et notamment par le fait que :
« 1° Les mineurs ne peuvent être placés en rétention qu'à titre de mesure de dernier ressort et qu'après qu'il ait été établi que d'autres mesures moins coercitives ne peuvent être appliquées efficacement. Les pouvoirs publics doivent tout mettre en œuvre pour libérer les mineurs placés en rétention et les placer dans des lieux d'hébergement appropriés pour mineurs ;
« 2° Les mineurs non accompagnés ne peuvent être placés en rétention que dans des circonstances exceptionnelles ;
« 3° Les familles placées en rétention disposent d'un lieu d'hébergement séparé qui leur garantit une intimité suffisante ; ».
La directive 2013/33/CE et notamment son article 11 relatif au placement en rétention de personnes vulnérables et de demandeurs ayant des besoins particuliers en matière d'accueil doivent être dûment respectées. Ces mesures ont trait notamment aux droits garantis pour les mineurs et les familles dans le cadre des procédures de rétention administrative.
Nous attirons l'attention de la représentation nationale sur le fait que dans ce cadre des risques existent que ne soient pas pleinement respectés les droits des étrangers, notamment les droits spécifiques liés aux situations des mineurs et des familles. Cet amendement vise à prévenir ces risques.
Rappelons qu'en France un mineur étranger peut séjourner sur le territoire sans titre de séjour. Il est fondé à demander l'asile.
Par ailleurs le rappel du caractère exceptionnel de la rétention des mineurs auquel procède cet amendement n'est pas inutile ou superfétatoire. En effet, la France s'est vu condamnée par cinq arrêts de la CEDH le 12 juillet 2016 au titre de l'article 3, qui prohibe les traitements inhumains et dégradants (dans les cinq arrêts), de l'article 5 qui proclame le droit à la liberté et à la sureté (dans quatre d'entre eux) et de l'article 8 qui consacre le droit à une vie familiale normale.
La Cour à cette occasion a réaffirmé clairement que la rétention n'est conventionnelle « qu'à la condition que les autorités internes établissent qu'elles ont recouru à cette mesure ultime seulement après avoir vérifié concrètement qu'aucune autre moins attentatoire à la liberté ne pouvait être mise en œuvre ».
Appliquant ce principe aux espèces, la Cour conclut à la violation de l'article 5§1 dans trois cas sur cinq.
Par ailleurs, la Cour a affirmé les conditions que doit remplir une mesure de rétention pour que, compte tenu de l'intérêt supérieur de l'enfant, l'ingérence dans la vie familiale soit être proportionnée au but poursuivi. Il s'agit du risque particulier de fuite nécessitant la détention, de la recherche d'alternative à la détention et de la mise en œuvre rapide de la mesure d'expulsion pour limiter le temps d'enfermement. Dans les deuxième et quatrième affaires, ce sont l'ensemble des conditions précitées qui font défaut selon la Cour, qui conclut donc à la violation de l'article 8.
Ainsi, en élargissant la notion de risque de fuite comme le fait la présente proposition de loi, on étend également par conséquent le cadre des circonstances exceptionnelles dans lesquelles peuvent être mis en rétention des mineurs. Ceci revient une fois de plus à autoriser une extension tout à fait dommageable des mesures privatives de liberté, au détriment des principaux concernés.
Ainsi, l'objet de cet amendement qui procède à un rappel du droit n'est pas sans avoir son utilité pour informer la représentation nationale de la réalité des pratiques sur le terrain.
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