Publié le 19 juin 2020 par : M. Diard, Mme Louwagie, Mme Duby-Muller, M. Cattin, M. Di Filippo, M. Masson.
Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Le chapitre III du titre XIX du livre IV est ainsi modifié :
a) Après le deuxième alinéa de l’article 706‑53‑13, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Il en est de même pour les personnes présentant une particulière dangerosité caractérisée par une probabilité très élevée de récidive parce qu’elles font l’objet d’une radicalisation violente, à la condition qu’elles aient été condamnées à une peine de réclusion criminelle pour les crimes en lien avec une entreprise terroriste. » ;
b) Après le 1° de l’article 706‑53‑14, il est inséré un 1°bis ainsi rédigé :
« 1°bis Les obligations résultant de l’inscription dans le fichier judiciaire automatisé des auteurs d’infractions terroristes, ainsi que les obligations résultant d’une injonction de soins ou d’un placement sous surveillance électronique mobile, susceptibles d’être prononcés dans le cadre d’un suivi socio-judiciaire ou d’une surveillance judiciaire, apparaissent insuffisantes pour prévenir la commission des crimes mentionnés à l’article 706‑53‑13 ; »
c) Le premier alinéa de l’article 706‑53‑15 est complété par deux phrases ainsi rédigées :
« Elle s’appuie sur un collège d’experts composé de psychiatres et de membres du service du renseignement pénitentiaire. La composition précise du collège est fixée par un arrêté du garde des sceaux. » ;
2° Le livre V est ainsi modifié :
a) À l’article 717‑1, les mots : « troisième et quatrième » sont remplacés par les mots : « et troisième » ;
b) Aux articles 723‑37, 723‑38 et 763‑8, les mots : « dans les conditions prévues par l’article 706‑53‑13 pour l’une des infractions visées par cet article » sont remplacés par mots : « d’une durée égale ou supérieure à quinze ans pour l’une des infractions visées à l’article 706‑53‑13 » ;
c) Après le 1° de l’article 723‑37, il est inséré un 1°bis ainsi rédigé :
« 1°bis Les obligations résultant de l’inscription dans le fichier judiciaire automatisé des auteurs d’infractions terroristes, ainsi que les obligations résultant d’une injonction de soins ou d’un placement sous surveillance électronique mobile, susceptibles d’être prononcés dans le cadre d’un suivi socio-judiciaire ou d’une surveillance judiciaire, apparaissent insuffisantes pour prévenir la commission des crimes mentionnés à l’article 706‑53‑13 ; ».
Cet amendement vise à compléter la présente proposition de loi en prévoyant l'instauration d'une rétention de sûreté aux détenus condamnés pour terrorisme en étendant le dispositif mis en place par la loi du 25 février 2008.
En effet, si les mesures proposées par le texte que nous sommes en train de discuter paraissent nécessaire, elles restent néanmoins insuffisantes pour lutter contre la menace terroriste à laquelle nous faisons face.
Le 26 juillet 2016, Adel Kermiche, sous contrôle judiciaire et bracelet électronique pour avoir tenté de rejoindre la Syrie à plusieurs reprises, a commis un attentat en l'église de Saint-Etienne-du-Rouvray dans laquelle le père Jacques Hamel a tragiquement perdu la vie.
Amedy Coulibaly, qui avait participé à la vague d'attentats de janvier 2015, à Montrouge et dans l'Hypercasher, avait été emprisonné pour avoir tenté de faire évader un terroriste.
Enfin, le 29 novembre dernier, une attaque terroriste a fait deux morts en plein cœur de Londres et dont l'auteur avait été libéré en 2018, alors qu'il avait été condamné, en 2012, à 16 ans de prison pour préparation d'un acte terroriste.
Ces événements rappellent la dangerosité que représentent les détenus terroristes pour la société, malgré tous les efforts qui sont fournis, notamment par les services de renseignements, pour les empêcher de récidiver ou de passer à l'acte.
Le procureur général près la Cour de cassation, François Molins, reconnait que l’on « court un risque majeur […] de voir sortir de prison à l’issue de leur peine des gens qui ne seront pas du tout repentis, qui risque même d’être encore plus endurcis » par leur passage en prison. Du fait de ces sorties à venir, l’ancien juge antiterroriste Marc Trévidic a confié « [ne pas être sûr] que nos services de renseignement aient la capacité de traiter autant de sorties à la fois ».
En effet, aux libérations de détenus terroristes se rajouteront celles de plus de 400 détenus de droit commun radicalisés. L’inquiétude liée à ces chiffres a conduit le Premier ministre à lancer une cellule spécifique chargée de suivre les détenus terroristes ou radicalisés à leur sortie de prison. Malgré cela, il est à prévoir une surcharge des services de renseignements, qui doivent déjà faire face à une activité toujours plus importante.
Dans la continuité de l'objectif de cette proposition de loi, il ne s'agit pas de remettre en cause le principe fondamental selon lequel nul ne peut être condamné deux fois pour le même acte. Il est cependant nécessaire d'étendre les mesures de sûreté afin de protéger la société des individus les plus dangereux qui ont été condamnés pour terrorisme.
Pour cela, cet amendement propose de s'appuyer sur la rétention de sûreté, qui existe déjà pour les personnes condamnées pour des crimes sexuels et violents représentant un risque particulièrement élevé de récidive. Il s'agit donc de conserver le même dispositif et de l'étendre aux détenus condamnés pour des faits en lien avec une entreprise terroriste, tout en respectant l'objectif énoncé dans l'avis du Conseil d'État de prévoir un dispositif distinct pour la rétention de sûreté des personnes condamnées pour des faits de terrorisme.
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