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M. Véran n'est plus là. C'est dommage, car nous partageons une profession commune – ou, tout du moins, un intérêt commun pour la médecine du cerveau. Il se trouve que j'ai travaillé pendant de nombreuses années sur un sujet dont on ne parle pas ici, celui de la perception du sujet juste avant sa mort et des expériences dites extracorporelles et de mort imminente décrites par certaines personnes qui reviennent d'un arrêt cardiaque ou d'un coma. Nous sommes face à un phénomène intrigant. Nous n'avons pas les réponses, mais nous avons quelques idées. Il n'est pas exclu que ce qui se passe à l'intérieur de l'être lors des derniers instants soit tout à fait hermétique à la compréhension d'un témoi...
...jet auquel peu de monde travaille dans deux laboratoires spécialisés, j'ai de graves doutes quant à la différence entre notre projection du ressenti douloureux de l'autre et l'expérience réelle vécue par celui qui est en train de lâcher prise. J'ajouterai ensuite, sur un plan plus politique que médical, que j'ai été choqué tout à l'heure de voir des militants de ce texte se lever et applaudir la mort.
… car pour moi, la mort comme acte politique était l'apanage des terroristes islamistes !
Je voudrais également redire que la rédaction actuelle de l'article 1er conduit à considérer comme légitime la demande de fin de vie – et donc de mort – exprimée par l'un de nos concitoyens ou l'une de nos concitoyennes, et à juger que sa vie, finalement, ne mérite pas d'être poursuivie. Qui sommes-nous pour aller jusque là ? Il y a là une question de fond.
N'ayons pas peur d'appeler un chat un chat et remplaçons les mots « assistance médicalisée active à mourir » par le mot « euthanasie ». Si vous avez choisi de ne pas le faire figurer dans votre proposition de loi, c'est que vous savez fort bien qu'il n'exprimerait que trop clairement la réalité sur laquelle elle porte : le fait de provoquer délibérément la mort d'une autre personne. Rappelons qu'à la question « Souhaiteriez-vous obtenir l'euthanasie pour vous-même ? », seuls 24 % des Français répondent « oui». Que demandent-ils pour ce qui est de leur fin de vie ? Premièrement, de voir leurs douleurs soulagées ; deuxièmement, de ne pas subir d'acharnement thérapeutique ; troisièmement, d'être accompagnés par leurs proches. Toutes ces demandes correspon...
Nous vous proposons donc de faire figurer le mot « euthanasie » dans votre texte. N'ayez donc pas peur de ce que vous proposez, qui est la transgression d'un interdit consistant à provoquer délibérément la mort d'autrui.
Rappelons que cette discussion intervient à un moment très particulier de notre histoire sanitaire et médicale : il y a quelques mois, dans notre pays, des anciens dans les EPHAD ou des gens fragiles sont morts seuls. Leurs familles n'ont pas pu être présentes, elles n'ont pas pu les accompagner, elles n'ont pas pu tenir leurs mains dans leurs derniers moments. Voilà ce qui s'est passé ! C'est un scandale, convenez-en ! Pourquoi choisir précisément ce moment pour imposer votre idéologie – car ce n'est pas d'autre chose qu'il s'agit ? Eh bien, cette idéologie, nous n'en voulons pas !
...lègue Xavier Breton, qui a cité le serment d'Hippocrate, je reprendrai les termes de l'article R. 4127-38 du code de la santé publique : « Le médecin doit accompagner le mourant jusqu'à ses derniers moments, assurer par des soins et mesures appropriés la qualité d'une vie qui prend fin, sauvegarder la dignité du malade et réconforter son entourage. Il n'a pas le droit de provoquer délibérément la mort. » Vous allez devoir m'expliquer comment vous comptez faire des médecins des euthanasieurs. Voici ce qu'un collectif de médecins a écrit dans une tribune publiée dans Le Figaro il y a quelques jours : « Nous, médecins, attachés à la sagesse déontologique et morale hippocratique, disons non. Non, nous ne voulons pas abjurer notre serment professionnel. Non, nous ne transgresserons pas l'interdit....
...: « Je ne remettrai à personne du poison si on m'en demande, ni ne prendrai l'initiative d'une pareille suggestion. » Le texte actuel, revisité en 2012, est encore plus explicite : « Je ferai tout pour soulager les souffrances. Je ne prolongerai pas abusivement les agonies. » – l'acharnement thérapeutique et l'obstination déraisonnable sont donc exclus. Il poursuit : « Je ne provoquerai jamais la mort délibérément. » C'est écrit ! Je suis pour le moins gêné d'entendre que des milliers de personnes souffrent dans nos services hospitaliers. Certains de ces cas existent, bien évidemment, mais rendons surtout hommage à tous ceux qui, dans les unités de soins palliatifs, s'efforcent de faire le maximum avec des moyens limités. Aussi attendons-nous beaucoup du prochain plan de développement des soin...
...ne supposée logique de progrès et d'une mode de l'euthanasie, vous êtes en train de l'abolir. Notre système a une autre vertu : il a introduit le principe de la personne de confiance, grâce auquel un tiers, membre de la famille ou non, peut accompagner un patient en détresse, lui tenir la main, le conseiller et l'aider. Un colloque singulier doit ainsi avoir lieu entre la personne qui envisage sa mort et le tiers de confiance. C'est un apport fondamental de la loi Claeys-Leonetti de 2016, fruit d'un important travail qui, à l'époque, n'avait rien d'évident. Puisque le tiers de confiance existe, il convient de le mettre dans la boucle. Donnons au moins la possibilité à une personne qui envisage sa mort, et qui songe peut-être à l'euthanasie, d'échanger avec un tiers de confiance.
Vous considérez au contraire qu'on pourrait assister les suicides. Vous invoquez la compassion, comme s'il n'y avait d'autre solution, pour certains patients, que de précipiter leur mort. Nous voyons de surcroît apparaître une expression incroyable : l'euthanasie palliative. On ose ainsi prétendre que l'euthanasie ferait elle-même partie des soins palliatifs ! Ces deux pratiques sont pourtant antinomiques : elles n'ont rien à voir l'une avec l'autre, et entrent même en contradiction. En cherchant à amalgamer les soins palliatifs avec l'euthanasie, on les dénature au plus profond,...
Je veux prolonger les propos de notre collègue Hetzel sur les statistiques qu'a pu fournir la Société française d'accompagnement et de soins palliatifs. Depuis que le système belge applique la loi sur l'euthanasie, seulement 2 % des personnes ont recours aux soins palliatifs, tout le monde se dirigeant immédiatement vers la mort. Il se trouve qu'en France, nous avons fait un choix de société radicalement différent depuis 2016 avec la loi Claeys-Leonetti, celui de l'accompagnement à la mort sans souffrance physique ni psychique avec le système de sédation profonde et continue. Nous craignons qu'en légalisant l'euthanasie, vous ne fassiez fuir les personnes de ce système pourtant beaucoup plus éthique et moral.
...us proposons d'insérer l'alinéa suivant : « La personne de confiance ne doit pas abuser de son influence pour obtenir un mandat ou contracter à titre onéreux dans des conditions qui leur seraient anormalement favorables. » Ce sous-amendement ne va pas à l'encontre de votre logique, cher collègue Chiche : c'est simplement un élément de précision permettant d'éviter que certains aient intérêt à la mort d'un tiers. C'est cela qui nous préoccupe et qui devrait nous rassembler. Si nous ne l'inscrivons pas dans la loi, toutes les dérives seront possibles. On connaît les dérives qui existent en Belgique, aux Pays-Bas et peut-être demain en Espagne. En tout état de cause, nous devons nous prémunir contre ce risque. Nous avons un système exemplaire, qui a fait l'objet à l'époque d'un consensus. Vous n...
Tout cela n'a pas été préparé et n'est pas satisfaisant. Il nous faudrait beaucoup plus de temps pour examiner ce texte. On consacre trois semaines à l'examen du projet de loi Pompili sur le climat, et hier on a consacré deux heures aux voitures de collection et deux heures et demie aux moulins. La mort exige plus de réflexion, plus de temps, plus de travail. C'est ce qu'on vous propose, et cela me paraît de bon sens.
Le problème de fond est de savoir si une loi supplémentaire pourrait garantir une mort apaisée. Qui pourrait le dire ? D'autres collègues sont d'ailleurs allés dans cette direction tout à l'heure. Car qui est revenu pour nous le dire ? Et que dire de ceux qui restent, les proches et les médecins ? Apparemment, les médecins que l'on interroge et qui ont pratiqué ce droit à l'euthanasie ne sortent jamais indemnes d'une pareille transgression, qui pose une question de fond par rapport...
...le signait une tribune dans Le Monde pour défendre le choix de la France d'écarter la légalisation de l'euthanasie et du suicide assisté. Sa décision de partir a sans doute été le fruit d'une longue réflexion personnelle sur le sens de la vie. Elle a demandé à ses proches qu'ils témoignent de son choix et de sa conviction qu'il fallait changer la loi. Pourquoi endurer une cruelle agonie quand la mort peut vous délivrer d'une vie qui n'est devenue qu'une survie douloureuse et sans espoir de guérison ? Ces questions existentielles, nous sommes tous amenés à nous les poser un jour, pour nous-mêmes ou pour nos proches. La crise sanitaire que nous traversons depuis plus d'un an a encore approfondi cette réflexion chez une grande partie de nos concitoyens. En quoi serait-il inopportun pour nous, r...
...ulation étant contradictoire dans les termes puisque l'assistance médicalisée, c'est du soin, alors qu'aider à mourir, ça n'en est pas. J'aimerais bien, monsieur le rapporteur, que vous nous précisiez enfin comment vous allez vous accommoder de cette incohérence, qui est aussi juridique puisque cela revient à demander au médecin, qui compte dans ses missions la prévention du suicide, de donner la mort, sans parler du fait que la loi sanctionne l'abus de faiblesse sur une personne en état dépressif ou souffrant d'un affaiblissement sénile, l'omission de porter secours à une personne en danger et l'incitation au suicide.
...ue signifie concrètement ce mot d'« active » ? On voit bien qu'en fait, on tourne autour du pot. Nous vous proposons donc de les remplacer par les termes soit d'euthanasie, soit de suicide assisté, montrant ainsi que vous êtes disposés à revendiquer leur inscription dans notre législation. Pour notre part, nous nous y opposons parce que nous considérons qu'on ne peut pas provoquer délibérément la mort, mais puisque vous êtes des tenants de la transgression de cet interdit, eh bien écrivez-le noir sur blanc dans la loi.
...mbiguïtés et imprécisions. L'amendement vise à supprimer le mot « médicalisé » parce que les médecins refusent très majoritairement de pratiquer l'euthanasie. Quelques-uns, par conviction philosophique, sont des militants de l'euthanasie, mais tous ceux qui respectent le serment d'Hippocrate et l'article R. 4127-38 du code de déontologie médicale, qui interdit au médecin de donner délibérément la mort, ne veulent pas des schémas mortifères que vous voulez leur imposer. Le mot « médicalisé » pose vraiment un problème. C'est la raison pour laquelle nous proposons sa suppression.
...ut être apaisée ». En l'état de la médecine, selon les médecins, les douleurs sont soulagées dans la quasi-totalité des cas par les moyens thérapeutiques actuellement disponibles. L'angoisse au moment de la fin de vie est considérablement apaisée par un accompagnement rassurant et la peur est surtout celle de se sentir abandonné. Ainsi, le soulagement de la douleur ne peut pas être apporté par la mort.