Intervention de Charles de la Verpillière

Réunion du mercredi 23 février 2022 à 9h05
Commission de la défense nationale et des forces armées

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCharles de la Verpillière, co-rapporteur :

Dès lors, jusqu'où Vladimir Poutine veut-il aller ? Souhaite-t-il annexer l'intégralité du Donbass, voire d'autres régions ukrainiennes ? Vise-t-il un changement de régime à Kiev, voire une vassalisation complète de l'Ukraine à la manière de la Biélorussie ? Enhardi par des succès trop faciles, visera-t-il, demain, d'autres États non-membres de l'OTAN tels que la Moldavie, la Bosnie-Herzégovine, voire la Finlande ? Plus improbable, mais difficile à exclure totalement, pourrait-il envisager de s'en prendre à des États membres de l'OTAN, à commencer par les pays baltes et la Pologne ? Ces questions ne sont pas illégitimes.

Par conséquent, au terme de nos travaux, nous en sommes parvenus aux conclusions suivantes :

– s'agissant de nos relations bilatérales avec les États polo-baltes, il convient de les renforcer tant au niveau bilatéral qu'au sein de l'Union européenne et de l'OTAN. En particulier, la France doit approfondir tous les domaines de coopération avec l'Estonie, partenaire privilégié, avec lequel la France gagnerait à s'investir davantage, tant dans le domaine de la défense que dans le domaine cyber. La France gagnerait également à approfondir ses relations avec la Pologne, puissance régionale avec laquelle elle peut avoir de nombreuses convergences de vues dans le domaine de la sécurité européenne, tout en ayant un discours ferme sur l'État de droit et les valeurs européennes ;

– s'agissant de notre relation avec la Roumanie, nous ne pouvons que nous féliciter de l'annonce du président de la République relative au déploiement de troupes françaises dans le cadre de l'OTAN. La France n'a que des avantages à tirer de cette coopération, en particulier en tant que nation-cadre. Elle devra toutefois veiller, d'une part, à ce que ce projet soit bien mené à son terme, et d'autre part à s'entourer des États avec lesquels elle pourra coopérer utilement en matière de mutualisation des équipements ;

– s'agissant du dispositif de présence avancée renforcée en Estonie et en Lituanie, le format actuel donne satisfaction. Toutefois, il pourrait être envisagé de muscler le dispositif, à la faveur de la réduction des effectifs dédiés à l'opération Barkhane. Il y a clairement une opportunité à saisir car l'Estonie est très favorable à la présence française sur son territoire. Si la France faisait un tel choix, elle devrait envisager une permanence des troupes et un renforcement au niveau tactique, afin notamment de se préparer plus efficacement à la haute intensité ;

– s'agissant de la politique de sécurité et de défense communes, tout en ayant pleinement conscience de la primauté accordée à l'OTAN par les États polo-baltes, la France gagnerait à persévérer dans ce domaine, notamment en proposant des coopérations adaptées à la taille des États partenaires. De ce point de vue, la coopération structurée permanente et le Fonds européen de la défense sont des exemples à suivre. Le renforcement de la posture de l'OTAN à l'est, synonyme de solidarité pour les États membres du B9, contribue à maintenir l'adhésion et la dynamique autour d'une Europe de la défense ambitieuse ;

– s'agissant du futur concept stratégique de l'OTAN, dont le contenu sera arrêté lors du sommet de Madrid en juin 2022, il est indispensable de veiller au recentrage de l'OTAN sur l'Europe. L'Alliance s'est excessivement concentrée sur la menace représentée par la Chine ces dernières années, au détriment de l'Europe, qui constitue le cœur historique de son action. Si la vigilance de l'Alliance vis-à-vis des desseins de la Chine est pleinement justifiée, l'attaque russe sur le territoire ukrainien rappelle de manière tragique que l'Europe est toujours menacée par le spectre de la guerre, ce que l'OTAN doit clairement acter à l'occasion de la révision de son concept stratégique ;

– s'agissant de la Biélorussie, nous sommes particulièrement inquiets de l'évolution de la situation des droits humains et de l'intégration militaire grandissante avec la Russie. Cette menace directe pour la sécurité de l'Europe devrait être pleinement intégrée dans les réflexions de la boussole stratégique et du futur concept stratégique de l'OTAN. Les leçons de la crise migratoire orchestrée par la Biélorussie devront également figurer dans ces deux documents ;

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.