Notre commission d'enquête s'intéresse à la lutte contre la fraude à la fois aux prestations et aux cotisations. Il ne s'agit pas de viser la « fraude des pauvres », mais de faire la lumière sur une réalité qui est indéniable. Comme vous l'avez dit, la lutte contre la fraude est une obligation pour garantir l'égalité des droits entre nos concitoyens. Vous n'avez pas à vous excuser de cette lutte, tout comme notre commission d'enquête n'a pas à s'excuser de vouloir faire la lumière sur cette fraude, sur sa réalité et sur ses évolutions. Il nous revient de pointer les faiblesses qui peuvent exister dans les dispositifs de lutte ainsi que les améliorations possibles pour mettre fin à certains fantasmes, polémiques ou discours qui peuvent nourrir des objectifs politiques qui ne sont pas les nôtres.
Tout d'abord, nous observons que la fraude organisée ressort assez précisément parmi les enjeux de la fraude sociale. La Cour des comptes a pointé un retard sur ce sujet au sein de la CNAF. Parmi les chiffres que vous avez évoqués, j'en ai noté deux : 18 % de fraude à l'isolement et 13 % de situations de faux, voire d'escroqueries, ce qui tend à nous ramener à la fraude en bande organisée. J'ai aussi noté les exemples de fraude organisée que vous avez cités.
Même si vous n'en êtes qu'au début d'une réflexion stratégique, qu'envisagez-vous pour mieux appréhender les conséquences de la fraude documentaire ? Lors de son audition, la direction centrale de la police aux frontières (DCPAF) a mis en exergue la tendance à passer d'une fraude au faux à une fraude au vrai document utilisé de manière frauduleuse. En d'autres termes, l'achat d'un passeport sur le darknet permet l'utilisation frauduleuse d'une identité, qui donne droit à de vrais papiers et à de vrais droits à prestations. Est-ce un sujet d'ores et déjà identifié dans votre caisse ?
S'agissant des collaborations avec d'autres administrations ou caisses dans cette lutte, quelles en sont les perspectives en matière de fraude en bande organisée ?
Enfin, vous avez mentionné une possible évolution de doctrine pour les contrôles sur place : peut-être le syndrome de la brosse à dents et du rasoir a-t-il vécu. De mon point de vue, ces contrôles peuvent avoir un effet dissuasif sur la fraude ou sur sa récidive. Ils peuvent aussi décrire par faisceau d'indices la réalité d'une situation isolée. En cas d'évolution de doctrine, comment vos contrôleurs pourraient-ils établir, par exemple, une situation de faux isolement ? J'ajoute que cela peut aussi constituer un lien vers de la fraude organisée.