COMMISSION D'ENQUÊTE RELATIVE A LA LUTTE CONTRE LES FRAUDES AUX PRESTATIONS SOCIALES
Mardi 23 juin 2020
La séance est ouverte à dix-sept heures.
Présidence de M. Patrick Hetzel, président
La commission d'enquête relative à la lutte contre les fraudes aux prestations sociales procède à l'audition de M. Vincent Mazauric, directeur général de la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF), de M. Matthieu Arzel, responsable du département de lutte contre la fraude, de Mme Agnès Basso-Fattori, directrice du réseau, et de Mme Patricia Chantin, directrice de cabinet adjointe, responsable des relations parlementaires.
Nous accueillons les représentants de la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) : M. Vincent Mazauric, son directeur général, M. Mathieu Arzel, responsable du département de lutte contre la fraude, Mme Agnès Basso-Fattori, directrice du réseau des caisses d'allocations familiales (CAF), et Mme Patricia Chantin, directrice de cabinet adjointe, responsable des relations parlementaires.
Après avoir auditionné ce mois-ci la Caisse nationale d'assurances vieillesse (CNAV) et la Caisse nationale d'assurance maladie (CNAM), nous serons heureux de vous entendre, à votre tour, sur l'ensemble des sujets de fraude auxquels la CNAF est confrontée, la typologie des fraudes selon les prestations versées, les publics concernés, les montants en jeu et les dispositifs de détection et de sanction que vous mettez en œuvre, tant au niveau central qu'au niveau du réseau des caisses.
Je vous rappelle que l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires impose aux personnes auditionnées par une commission d'enquête de prêter le serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Je vous invite donc tous les quatre à lever la main droite et à dire : « Je le jure. »
(M. Mazauric, M. Arzel, Mme Basso-Fattori et Mme Chantin prêtent successivement serment.)
La lutte contre la fraude est pour nous une action importante, structurée, qui doit être cohérente avec un ensemble. Elle a ses réussites. Je soulignerai également quelques perspectives de progrès.
C'est un fait indéniable : de la fraude existe. Il ne faut pas la surestimer ni conclure que le système de prestations sociales dont la branche famille de la sécurité sociale a la charge est avant tout un champ d'abus, mais il faut la prouver.
Depuis dix ans, à l'invitation de notre certificateur, la Cour des comptes, la CNAF procède chaque année à une enquête suivant une méthode rigoureuse, notamment dans le but d'estimer le risque de fraude. Selon le dernier résultat disponible, pour l'ensemble des prestations payées par la branche, soit environ 90 milliards d'euros, la fraude est estimée entre 1,9 et 2,6 milliards d'euros. Ce montant augmente par rapport à l'enquête relative à 2018, notamment du fait de l'augmentation des montants payés au titre de la prime d'activité, à la suite de la décision prise par les pouvoirs publics fin 2018, et aussi du fait de l'affinement des méthodes d'enquête.
Disposer d'un tel chiffre est hardi, car il faut mesurer et accepter l'écart entre une estimation statistique et une action. On ne retrouvera jamais par l'action ce que donne l'estimation. Mais cela justifie la mobilisation de nos efforts pour rechercher en permanence l'équilibre entre la plus grande justice et la plus grande efficacité.
Pour l'année 2019, les résultats de la lutte contre la fraude relative aux prestations sociales délivrées par la branche révèlent environ 49 000 fraudes caractérisées à l'issue d'opérations de contrôle, en augmentation de près de 9 % par rapport à 2018, soit : 22 400 dossiers relatifs au RSA (revenu de solidarité active) ; 9 250 dossiers relatifs à la prime d'activité ; 9 000 dossiers relatifs aux allocations logement ; environ 2 000 dossiers relatifs à l'allocation de soutien familial.
De manière assez constante, les types de fraudes représentent trois situations principales : 69 % d'omissions intentionnelles ; 18 % de fraudes dites à l'isolement – selon la législation sociale, il est délicat de faire la preuve d'un état d'union ou de séparation d'un couple – ; 13 % d'emplois de faux, voire d'escroqueries.
Selon les résultats financiers de l'action de contrôle, 323,7 millions d'euros ont été identifiés comme correspondant à des montants fraudés pour 2019, contre 304,6 millions d'euros en 2018. C'est supérieur à l'objectif de 310 millions d'euros porté par la convention d'objectifs et de gestion (COG) de la branche famille pour 2019. Le préjudice moyen par dossier est légèrement supérieur à 6 500 euros, ce qui est un indicateur de ciblage. Ce montant de 323,7 millions d'euros doit être rapporté à la somme totale des indus identifiés chaque année par les CAF, légèrement inférieure à 900 millions d'euros.
L'activité de contrôle est bien sûr légitime et elle est importante en termes d'égalité devant la loi. Nous la concevons et essayons de l'organiser de façon cohérente dans un ensemble centré sur l'allocataire et la manière de délivrer les prestations. Nous ne nous excusons pas de faire du contrôle, car il s'agit de protéger à la fois les deniers publics et les allocataires qui, dans leur immense majorité, ne fraudent pas.
L'exercice effectif et public de la lutte contre la fraude en matière sociale est aussi un outil de cohésion sociale. Nous devons assurer à chacun son juste droit, voire le juste droit de l'autre. Le contrôle est en cohérence avec la délivrance des prestations sociales, dont l'objectif est avant tout de donner accès aux droits. Tout indu n'est pas frauduleux. D'ailleurs, chaque année, nous exerçons 33,4 millions d'opérations de contrôle (recoupements, contrôles approfondis, contrôles sur place ou sur pièces) qui aboutissent à la détection de 1,2 milliard d'euros d'anomalie, dont 300 millions d'euros sont des restitutions aux allocataires. Notre action de contrôle repose sur cet équilibre : nous reprenons et nous rendons de façon juste.
Le système des prestations sociales français est couvrant, et donc, complexe. Des obligations fréquentes pèsent sur les allocataires, telles que des déclarations trimestrielles de ressources. Il y a là un risque d'erreur, d'étourderie, voire de fraude et il faut surveiller la disparité entre le poids de ces obligations et l'aisance qu'ont nos concitoyens à s'en acquitter. On n'emploie pas un avocat pour demander une prestation sociale !
Dans une logique de simplicité et pour nous concentrer sur l'essentiel, notre premier travail est de prévenir, de faciliter et d'avertir.
Prévenir, c'est entretenir une relation disponible et efficace avec les allocataires qui en ont besoin, y compris en les sollicitant s'ils ne demandent rien.
Faciliter, c'est par exemple rendre plus pédagogiques d'anciennes procédures « papier » et les accompagner par des dispositifs d'accueil.
Avertir avec pédagogie est une démarche récente qui nous importe beaucoup. Toute suspicion n'aboutit pas à une qualification de fraude. Pour autant, elle ne reste pas sans suite. Depuis plusieurs années, et plus encore en 2019, nous demandons aux CAF, en cas de doute non qualifié de fraude, d'envoyer une lettre d'avertissement à l'allocataire pour le mettre en garde. Quelque 71 000 lettres ont été envoyées à ce titre l'année dernière. A posteriori, il est intéressant de constater que le taux de renouvellement de l'incident ou du comportement au bord de la fraude est quatre fois moindre chez les personnes auxquelles nous avons adressé cette lettre.
Cela nous permet de nous organiser et de concentrer nos forces sur l'essentiel. Nous comptons au total, dans les 101 CAF, un peu moins de 700 contrôleurs formés, spécialisés et assermentés. Nous disposons d'un plan pluriannuel de prévention et de lutte contre la fraude qui couvre la période 2019-2022, c'est-à-dire jusqu'à la fin de la COG. Mme Agnès Basso-Fattori en est la directrice générale déléguée et M. Matthieu Arzel dirige une équipe d'une dizaine de personnes à la CNAF.
Au-delà des organismes nationaux ou territoriaux de la branche, les comités opérationnels départementaux antifraude (CODAF) ont une très grande importance. Toutes nos CAF y participent. Ils sont pour nous une nécessité et présentent un immense intérêt, car les circonstances des fraudes les plus graves, dites « organisées », ne peuvent être aperçues à temps et traitées sérieusement que par notre participation à de telles instances.
Enfin, permettez-moi de présenter à votre commission quelques axes de progrès accomplis ou à accomplir.
Le premier axe est le datamining, ou fouille de données, que nous pratiquons depuis 2012. Cette pratique, qui a pris de la place dans nos méthodes au cours des dernières années, fait la preuve d'une efficacité croissante. Le taux d'impact, c'est-à-dire le résultat financier d'une opération déclenchée à partir de cette méthode, se situait à 66 % en 2014 ; il est de 97 % en 2019. L'impact de la procédure, qui se déroule dans le respect des droits de l'allocataire, n'est pas systématique, mais il est tout de même assez significatif. C'est devenu la principale source de détection des dossiers destinés au contrôle.
Cette méthode continuera à fonctionner si elle respecte le même équilibre et le même raisonnement, avec les mêmes équipes. Notre CAF de Bordeaux, notamment, qui est très férue en la matière, utilise la fouille de données aussi bien pour la lutte contre la fraude ou la détection d'anomalies que pour l'accès aux droits. Je tiens beaucoup à l'entretien de ces deux faces de notre mission.
Par exemple, à l'aide de recoupements de ce genre, nous avons procédé à des contrôles de situation où, plusieurs fois de suite, une déclaration trimestrielle de ressources nous avait été adressée à partir d'une adresse IP située hors de France. En 2019, 9 000 contrôles conduits à ce titre ont permis le rappel de 55 millions d'euros d'indus, dont un peu plus de 50 % correspondaient à des situations qualifiées de frauduleuses. Selon moi, la technique de traitement de données, qui en est à ses débuts, est une clé d'entrée indispensable sans laquelle nous n'eussions pas pu aller plus loin.
Le deuxième axe de progrès à accomplir est de nature juridique. À l'évidence, nous ne recourons pas assez largement au principe du contradictoire. Alors que nous le pratiquons depuis longtemps pour les contrôles sur place, nous l'étendrons cette année, de manière systématique, à toutes les situations de contrôle sur pièces conduisant à une qualification de fraude. C'est indispensable pour des raisons de principe juridique évidentes, mais aussi pour pouvoir mener en amont un dialogue avec l'allocataire qui le souhaite, sans attendre un éventuel recours. Sans rendre nos processus plus compliqués, nous devons mettre plus largement en pratique des principes juridiques aussi évidents que celui-ci.
Après cette période de confinement durant laquelle les contrôles sur place ont dû être interrompus, le troisième axe consiste à réfléchir aux modalités de ces contrôles. Bien que le droit nous le permette, devons-nous continuer à nous rendre de manière aussi systématique au domicile des allocataires ? Existe-t-il d'autres moyens d'apprécier et de contrôler leur situation ? Tous les contrôles administratifs ne disposent pas de telles voies de droit.
Pour savoir si des personnes cohabitent ou ne cohabitent pas, font foyer ou non, les anciens du métier évoquent volontiers la méthode dite « des brosses à dents » : qu'il y en ait une, ou deux, ou davantage dans la salle de bains peut servir d'indice ; pour autant, ce n'est pas forcément la méthode optimale pour de tels enjeux.
Enfin, nous avons amorcé à la fin de l'année dernière notre dernier axe de réflexion, qui vise à mieux structurer la lutte contre la fraude organisée. Je ne veux pas en exagérer la fréquence, mais il existe indéniablement des phénomènes organisés où quelqu'un feint une activité, y met fin aussitôt et demande le RSA, voire change de département ensuite. Il s'agit en général de pratiques transdépartementales, alors qu'une CAF a par définition une mission départementale – d'où l'importance des CODAF.
Par ailleurs, certaines fraudes présentent un degré de gravité qui va au-delà de l'atteinte portée aux deniers publics sociaux de la sécurité sociale, de l'État ou du département : c'est à la société qu'elles portent atteinte. Je pense en particulier aux fraudes qui combinent de l'habitat indigne, des aides au logement et des marchands de sommeil. Le calcul économique et financier n'est pas bien difficile : on achète bon marché des biens immobiliers en mauvais état en faisant un plan de financement reposant sur les aides au logement perçues par les locataires de ces biens, pour les revendre ensuite et en racheter davantage, sans se préoccuper des conditions de l'habitat. Dans ce cas, le dommage social est plus vaste que le dommage aux deniers.
Citons aussi le cas des pensions dites « marrons » à La Réunion, qui sont des établissements ou pensions de famille pour personnes âgées ou invalides sans cadre juridique particulier et dont les conditions sanitaires ne sont pas bonnes. Le modèle économique de ces institutions repose pour une part sur des prestations d'aide au logement ou d'allocation adulte handicapé (AAH) que percevront leurs pensionnaires, sans que ces derniers en soient toujours conscients. Face à cela, il est important que les différentes composantes de la loi s'unissent.
Ayant à l'esprit ces risques qui dépassent les limites départementales, nous préparons quatre ou cinq équipes d'une dizaine de personnes réparties sur le territoire, composées de professionnels motivés, volontaires, bien formés et bien outillés, ayant une compétence au mimimun interdépartementale, voire interrégionale. Je ne donnerai pas d'objectif à ces équipes, sinon celui d'attaquer le plus difficile avec énergie et précision. Je compte beaucoup sur l'exemplarité, qui est un point essentiel en matière de contrôle et de lutte contre les fraudes. La publication d'une condamnation ou le point annuel fait par un directeur de CAF sur les actions de sa caisse en la matière sont en général assez suivis par la presse locale. Cela doit être su parce que cela compte.
S'agissant de la fraude en bande organisée, disposez-vous de données chiffrées ? Pouvez-vous nous donner quelques exemples marquants de fraudes que vous avez récemment détectées ?
Par ailleurs, votre expérience professionnelle antérieure à Bercy vous amène-t-elle à utiliser les nouvelles technologies en combinant notamment le datamining et le croisement systématique de fichiers, en vue d'être le plus efficace possible dans vos contrôles ?
Enfin, lors de sa récente audition par notre commission, le Défenseur des droits nous a indiqué qu'il pouvait y avoir des biais liés aux algorithmes, et que de tels biais étaient susceptibles d'exister dans votre organisme. Qu'est-ce qui se pratique aujourd'hui et comment pouvons-nous améliorer les procédures ?
Nous ne disposons pas de chiffres sur la fraude en bande organisée, même si nous pouvons décrire des exemples de ces fraudes.
Au vu de mes fonctions antérieures, la branche famille de la sécurité sociale n'a pas à rougir de son adresse, de ses procédures et de ses méthodes en matière de traitement de données. La fouille de données, qui sert aussi bien à l'accès aux droits qu'à la recherche d'anomalies, voire de fraudes, est plus outillée dans la branche famille et dans les CAF que dans le domaine des finances publiques. Ce n'est pas exactement du datamining, mais de l'emploi de données. La majorité de nos 30 millions d'opérations de contrôle provient de recoupements, en particulier avec Pôle emploi. L'autre source principale n'est autre que les réponses des allocataires à nos demandes régulières de justifications.
L'axe à privilégier, à la fois pour l'accès aux droits et pour la lutte contre la fraude, est de parvenir à savoir ce que nous ne savons pas. Le fait de travailler sur les allocataires existants ne nous fait pas découvrir d'autres allocataires, mais d'autres droits pour les personnes que nous connaissons. De la même manière, c'est le partage de données qui nous fait progresser. Dans le cas de l'habitat indigne, des services publics extrêmement compétents et dévoués s'en occupent, mais en insuffisante liaison. Si nous voulons avoir une réponse plus sérieuse, plus dissuasive et plus efficace socialement en matière de lutte contre l'habitat indigne, nous devons changer de dimension.
Le Défenseur des droits a raison de redouter un biais dans les algorithmes, car il en existe toujours. Je ne peux pas répondre de manière précise quant aux biais qu'il aurait vus dans nos traitements de données, mais il correspond régulièrement avec moi et je lui rends compte des actions entreprises à la suite de ses remarques ou saisines. En outre, il sait que chacune de nos caisses a aussi une fonction de médiation particulièrement active et produit chaque année un rapport que je juge indépendant. C'est un contre-pouvoir très important pour nous.
La meilleure manière de se protéger d'un biais dans les algorithmes, c'est d'abord de les revisiter souvent pour qu'ils restent efficaces, c'est également de les déclarer à la commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) et c'est surtout de ne jamais confier une action de bout en bout à une machine, hormis le calcul d'une prestation. Un contrôleur intervient toujours après un algorithme, ce qui, me semble-t-il, représente la protection la plus sûre.
S'agissant du phénomène de fraude en bande organisée, deux exemples illustrent les méthodes sophistiquées utilisées par les fraudeurs, d'une part, et, d'autre part, notre collaboration avec différents organismes sociaux, notamment au sein des CODAF.
Dans le premier exemple, un cas de fraude repéré par la CAF de Strasbourg a été signalé par le CODAF. Il représente dix-neuf dossiers. Sous couvert de plusieurs sociétés régulièrement déclarées, un réseau organisé permettait de procurer à des ressortissants de l'Union européenne un emploi fictif et un kit documentaire composé de fiches de salaires et d'attestations de présence au travail, pour faire valoir leurs droits à la préfecture. Ces personnes bénéficiaient ainsi d'un titre de séjour et pouvaient ensuite s'affilier auprès des organismes sociaux (CAF, CPAM, Pôle emploi) et ouvrir des droits aux prestations sociales.
Le second exemple concerne la CAF de Bordeaux et le réseau des « porteurs d'affaires », soit environ cinquante dossiers d'allocataires. Ces porteurs d'affaires fournissaient des attestations fictives de logement et d'hébergement à des bénéficiaires qui se déclaraient autoentrepreneurs, ce qui leur permettait de bénéficier de prestations familiales et maladie.
Pour ces deux cas de fraude, une plainte a été déposée et une instruction est en cours.
Notre commission d'enquête s'intéresse à la lutte contre la fraude à la fois aux prestations et aux cotisations. Il ne s'agit pas de viser la « fraude des pauvres », mais de faire la lumière sur une réalité qui est indéniable. Comme vous l'avez dit, la lutte contre la fraude est une obligation pour garantir l'égalité des droits entre nos concitoyens. Vous n'avez pas à vous excuser de cette lutte, tout comme notre commission d'enquête n'a pas à s'excuser de vouloir faire la lumière sur cette fraude, sur sa réalité et sur ses évolutions. Il nous revient de pointer les faiblesses qui peuvent exister dans les dispositifs de lutte ainsi que les améliorations possibles pour mettre fin à certains fantasmes, polémiques ou discours qui peuvent nourrir des objectifs politiques qui ne sont pas les nôtres.
Tout d'abord, nous observons que la fraude organisée ressort assez précisément parmi les enjeux de la fraude sociale. La Cour des comptes a pointé un retard sur ce sujet au sein de la CNAF. Parmi les chiffres que vous avez évoqués, j'en ai noté deux : 18 % de fraude à l'isolement et 13 % de situations de faux, voire d'escroqueries, ce qui tend à nous ramener à la fraude en bande organisée. J'ai aussi noté les exemples de fraude organisée que vous avez cités.
Même si vous n'en êtes qu'au début d'une réflexion stratégique, qu'envisagez-vous pour mieux appréhender les conséquences de la fraude documentaire ? Lors de son audition, la direction centrale de la police aux frontières (DCPAF) a mis en exergue la tendance à passer d'une fraude au faux à une fraude au vrai document utilisé de manière frauduleuse. En d'autres termes, l'achat d'un passeport sur le darknet permet l'utilisation frauduleuse d'une identité, qui donne droit à de vrais papiers et à de vrais droits à prestations. Est-ce un sujet d'ores et déjà identifié dans votre caisse ?
S'agissant des collaborations avec d'autres administrations ou caisses dans cette lutte, quelles en sont les perspectives en matière de fraude en bande organisée ?
Enfin, vous avez mentionné une possible évolution de doctrine pour les contrôles sur place : peut-être le syndrome de la brosse à dents et du rasoir a-t-il vécu. De mon point de vue, ces contrôles peuvent avoir un effet dissuasif sur la fraude ou sur sa récidive. Ils peuvent aussi décrire par faisceau d'indices la réalité d'une situation isolée. En cas d'évolution de doctrine, comment vos contrôleurs pourraient-ils établir, par exemple, une situation de faux isolement ? J'ajoute que cela peut aussi constituer un lien vers de la fraude organisée.
Le risque de fraude documentaire ne nous échappe pas. Plus la CAF chargée de vérifier les conditions de délivrance d'une prestation et de la délivrer est en aval par rapport au fait générateur de fraude, plus il nous est difficile d'être réactifs. En revanche, des systèmes parfaitement établis existent pour vérifier l'exactitude, la validité et les termes d'un titre de séjour, par exemple. Voilà un domaine où nous devons être précis, pour écarter les fantasmes, et rigoureux dans l'application pleine et entière du droit, y compris pour l'accès aux droits.
S'agissant des perspectives de collaboration, à l'échelle départementale, le CODAF me paraît être la bonne institution opérationnelle, au-delà de la bonne relation collégiale qu'il est impératif d'entretenir avec son collègue de l'assurance maladie. Cela étant, nos moyens opérationnels étant sur le terrain, la difficulté réside dans le manque d'échanges opérationnels au niveau national. Nous avons une très bonne collaboration avec la délégation nationale à la lutte contre la fraude (DNLF), mais son rôle est moins opérationnel et plutôt dans la synthèse de résultats, dans l'identification de zones grises et dans la liaison. Lorsque nous aurons mis en place les premières équipes que je décrivais et qui imposeront une part d'animation opérationnelle nationale, je compte beaucoup sur l'établissement de liens nationaux plus opérationnels et sur le gain correspondant.
S'agissant des contrôles sur place, j'interroge leurs modalités et leur nécessité dans tous les cas. Au lieu de nous rendre chez une personne pour dialoguer avec elle, nous pouvons lui proposer un rendez-vous à la CAF. À l'inverse, si le risque et la présomption vont jusqu'à la fictivité complète – absence de logement malgré l'aide au logement, adresse fictive, fausses surfaces –, le bon sens commande de pouvoir aller sur place.
S'agissant de la fraude documentaire, plusieurs dispositifs et échanges automatisés nous permettent de contrôler directement à la source, auprès de nos partenaires, la validité de certains documents. Grâce à des outils fonctionnant en lien avec les préfectures, nous pouvons opérer de façon la plus automatisée possible pour ce qui est des titres de séjour. En revanche, le sujet sera probablement plus compliqué pour nous s'il s'agit d'une fraude à l'identité très en amont.
Concernant la collaboration avec d'autres organismes ou caisses, nos modèles reposent de plus en plus à la fois sur l'exploitation et la fouille de nos données et sur des échanges de données organisés et structurés. Des croisements de données nous permettent aussi de repérer des incohérences entre des données fournies à un organisme de sécurité sociale d'une part et à nous d'autre part. De telles incohérences peuvent provenir de simples erreurs, mais elles permettent aussi de détecter des fraudes, voire des fraudes organisées. Or, nous observons que les fraudes organisées sont assez difficiles à repérer seules. En revanche, la mobilisation des organismes partenaires est extrêmement importante pour remonter le fil d'une fraude organisée.
Ces échanges peuvent vraiment se développer à l'avenir et nous travaillons sur ce sujet dans le cadre de la prochaine mise en œuvre des équipes dédiées à la lutte contre la fraude organisée mentionnée par M. Vincent Mazauric. Au-delà des outils, nous devons développer des méthodes partagées avec les autres branches pour mobiliser pleinement non seulement les échanges de données, mais aussi la connaissance de leurs professionnels. Par exemple, il serait profitable d'organiser des échanges de pratiques entre nos professionnels et les inspecteurs de l'URSSAF qui luttent contre le travail dissimulé et qui ont une expérience, un acquis et une méthode.
Enfin, concernant le contrôle sur place, nous prenons acte de l'évolution de la nature des fraudes. À côté des fraudes de nature traditionnelle, nous commençons à constater des fraudes sous des formes plus sophistiquées. Pour être efficaces, nous devons nous adapter et disposer dans nos méthodologies, dans la formation de nos professionnels et dans le pilotage des opérations de contrôle d'une batterie de méthodes différentes pour mieux répondre à ces différents constats. Une méthode ne va pas forcément se substituer définitivement et complètement à une autre. En revanche, nous devons construire un pilotage des opérations pour trouver le bon point d'équilibre et faire face de façon adaptée et avec une méthodologie appropriée à chaque typologie de fraude constatée.
Le gouvernement britannique publie annuellement l'analyse détaillée de la fraude et des erreurs prestation par prestation. Ce n'est pas le cas en France. Ne pourrait-on envisager que les travaux auxquels vous faites référence puissent être systématiquement rendus publics et donnent lieu à un débat au Parlement ?
Sans doute. Chaque année, je fais un point de presse sur les résultats de la lutte contre la fraude et sur ceux de l'accès aux droits. Sans doute ne sont-ils pas aussi documentés que les résultats publiés par les services publics britanniques. Je ne verrais aucun inconvénient à des publications plus fines et se prêtant mieux à l'examen, à l'interrogation et au débat au Parlement, au-delà des documents déjà produits par la Cour des comptes. En termes de méthodologie, pour avoir une image à la fois cohérente et globale, je suggérerais de placer de telles publications sous l'égide de la délégation nationale à la lutte contre la fraude (DNLF) plutôt que de les confier à chaque organisme.
La DNLF a sans doute l'avantage de permettre une très bonne coordination. Néanmoins, les moyens dont elle dispose actuellement laissent à penser qu'elle a des difficultés à faire ce travail. C'est notre rôle de parlementaires de réfléchir à la manière d'agir pour être plus efficace.
Pour environ 12 millions d'allocataires, la CNAF a constaté 49 000 fraudes l'année dernière, soit un taux de 0,4 %. Nous pouvons donc estimer que toutes les fraudes ne sont pas découvertes, malgré le travail que vous réalisez. Avez-vous des comparaisons de ce taux de fraude dans les pays voisins ?
Par ailleurs, sur 49 000 fraudes, vous avez récupéré 322 millions d'euros, ce qui représente une somme très importante, avec 700 contrôleurs, soit 461 000 euros par contrôleur. Bref, embauchons des contrôleurs ! Mais ne pensez-vous pas que ce taux de 0,4 % représente seulement une partie de la fraude ? En triplant les moyens, ne pourrait-on pas atteindre 1 milliard d'euros ?
Cette démultiplication fonctionne dans les tables, mais pas toujours dans la réalité ! J'ai eu la même discussion avec ma tutelle et je partage cette conviction. Dans le projet de créer des équipes spécialisées, je ne m'inquiète pas de trouver la ressource et je m'y consacrerai sans hésiter.
Il y a deux vérités complémentaires dans le ratio que vous avez calculé. Ces 0,4 ou 0,5 % sont une vérité. Heureusement et logiquement, sur les 13 millions de bénéficiaires de prestations sociales, qui représentent 30 millions de personnes couvertes, les fraudeurs sont très minoritaires. Symétriquement, je ne vous dirai pas que nous avons fait le tour du sujet avec ces chiffres !
Je commençais d'ailleurs mon propos en disant que nous avons depuis un certain temps choisi de livrer une évaluation du risque de fraude selon une méthode établie et sérieuse. Le chiffre de 1,9 à 2,6 milliards d'euros est significatif et il reste à faire en termes de persistance pour mieux utiliser les ressources, de perfectionnement du ciblage pour les contrôles – pourquoi poursuivre les contrôles qui causeront du tracas aux allocataires si c'est en vain ? – et d'exemplarité. Aucun système, ni de prélèvements publics ni d'allocations publiques, ne garantit un zéro faute. L'exemplarité ne sert pas seulement en termes de communication, c'est aussi un outil. Il est dans nos obligations de dire que tel ou tel comportement comporte un risque. C'est la raison pour laquelle nous tenons à ce que les directeurs de CAF communiquent localement sur ces questions.
Le ratio que vous avancez porte sur les près de 700 contrôleurs sur place. Or beaucoup de personnels travaillent aussi à la réalisation de contrôles sur pièces. Ils concourent à l'ensemble des dossiers réalisés et à la détection de la fraude qualifiée. Cette double dimension de contrôle sur place mais également sur pièces est importante pour nous.
Vous avez fait état d'une évaluation de la fraude entre 1,9 et 2,6 milliards d'euros pour 2019. Je salue la philosophie de votre caisse qui consiste à accepter l'idée d'évaluer ce chiffre. J'en tire des enseignements pour nos préconisations car d'autres caisses, dont la CNAM, se refusent à ce principe.
Par ailleurs, dans des travaux menés par extrapolation par une université anglaise ou par un magistrat ayant appartenu à la DNLF, cette fraude est plutôt évaluée à 10 % environ. Diriez-vous que ce chiffre ne peut pas être une réalité, soit du fait de la méthodologie appliquée, soit parce qu'il atteint un niveau aberrant, soit du fait de la limite départementale des CODAF, soit d'un certain nomadisme frauduleux dans les prestations ? J'aimerais recueillir votre point de vue sur la méthodologie.
Faute de connaître la source que vous avez citée, je ne la conteste pas d'emblée. Peut-être est-ce une estimation non seulement de la fraude qualifiée à laquelle votre commission d'enquête s'intéresse, mais aussi de toute forme d'évasion ou d'anomalie pouvant être dite de bonne foi. Il n'y a pas un écart de dimension entre 2,5 ou 3 % et 10 %. Votre commission d'enquête recevra ces documents. Notre travail est méthodique, cadré et réalisé chaque année sur plus de 7 000 dossiers sous une supervision nationale de l'appréciation de la qualification. Le tout est aussi revu chaque année par la Cour des comptes. Il est donc fiable.
Il est clair que la limite départementale, au regard de l'action comme de la connaissance, doit pouvoir être dépassée. Dans les exemples strasbourgeois ou girondin cités par M. Arzel, je suis à peu près certain que les départements voisins avaient vu agir les mêmes personnes. Je me rappelle une affaire de faux entrepreneurs que l'on avait tracés du Pas-de-Calais au Nord, puis à la Moselle, avant qu'on ne réussisse à leur en faire passer l'envie. Rien ne doit être exagéré, mais la mobilité, l'optimisation, la recherche de toutes les occasions possibles existe, même si elle est le fait d'une extrême minorité. C'est pourquoi j'espère me doter d'équipes opérant dans un plus grand rayon d'action.
Les fraudes au RSA représentent près de 50 % des fraudes détectées au sein de la branche famille, voire 60 % en termes de volume. Or la branche sanctionne toutes les fraudes qualifiées à l'exception de celles au RSA, qu'elle notifie aux conseils départementaux car ces derniers n'ont pas systématiquement délégué aux CAF le pouvoir de sanctionner les fraudeurs. À l'échelle nationale, seuls 42 conseils départementaux ont délégué ce pouvoir. Selon un rapport de la Cour des comptes, les conseils départementaux restants appliquent leur propre politique de sanction aux fraudes aux RSA. De surcroît, ils n'informent généralement pas les CAF des suites données aux suspicions de fraude que celles-ci ont portées à leur connaissance. Finalement, vous ne savez pas ce qu'il advient du travail que vous avez réalisé et que vous avez relayé auprès des conseils départementaux.
Une telle situation ne permet pas de connaître avec précision le nombre et le montant des sanctions qui sont prononcées à l'encontre des fraudeurs au RSA. Nous savons que les collectivités territoriales sont très attachées à leurs prérogatives. Néanmoins, en tant que parlementaires, nous nous interrogeons sur la cohérence de l'action publique. Dans le cas de la fraude en bande organisée, à laquelle nous nous intéressons plus particulièrement, on est en train de rompre le pacte républicain, au mépris des droits de nos concitoyens. Selon vous, une évolution de la pratique consistant à laisser effectuer une sanction systématiquement par les CAF pour être plus efficace aurait-elle ou non du sens ?
Elle en aurait, monsieur le président ! Cela dit, la question est extrêmement délicate. Oui, je pense qu'une plus grande unité d'action serait opportune pour des raisons d'égalité devant la loi. Elle doit néanmoins se concilier avec le rôle de la collectivité départementale en matière de financement du RSA et avec le principe de libre administration des collectivités territoriales, qu'un directeur de CAF ne peut que respecter. La géographie, je vous le confirme, est compliquée. La direction d'une CAF peut beaucoup varier d'un département à l'autre.
Les chiffres que vous avez cités sont tout à fait exacts : c'est à peu près moitié-moitié. L'expérience montre que le choix peut refléter une intention politique de la collectivité départementale. En termes de méthode, même si la collectivité le souhaite, il peut lui être difficile d'administrer le contrôle.
Effectivement, les pratiques, qui sont issues des politiques définies par le département, peuvent vraiment varier d'un département à un autre. Il peut arriver que les départements n'informent pas les CAF des suites données, mais cela n'est pas systématique. La difficulté pour nous réside dans le fait que, lors d'un contrôle, la CAF réalise le contrôle de la situation globale d'un allocataire, qui peut bénéficier d'autres prestations. En cas de qualification de fraude, elle applique une politique homogène pour l'ensemble des allocataires sur l'ensemble des prestations, hormis sur le RSA si elle ne possède pas cette délégation. Cela pose de grandes questions de pédagogie vis-à-vis d'autres fraudeurs éventuels et vis-à-vis de la personne concernée pour éviter un renouvellement de la fraude. La situation peut être difficilement lisible ou compréhensible. Nous pouvons aussi nous trouver face aux deux extrêmes : soit la fraude au RSA n'est pas du tout sanctionnée, soit elle est plus durement sanctionnée qu'elle ne le serait selon nos propres barèmes.
Au-delà d'une disparité entre les départements, une disparité peut aussi exister au sein d'un même territoire dans le temps. Par exemple, à la faveur d'un changement de majorité, les publics d'un même département peuvent connaître des périodes avec des dispositifs de sanction plus ou moins durs, qui peuvent couvrir la qualification de la fraude seulement ou conduire à sortir certains bénéficiaires du dispositif de prestations. Cela aussi crée des difficultés de lisibilité et de compréhension pour les publics.
Par ailleurs, en cas de difficultés liées à des prestations, un allocataire se dirige logiquement vers la CAF. Or, si nous n'avons pas de délégation sur un sujet, nous pouvons seulement donner des explications théoriques, mais nous ne pouvons pas agir. C'est aussi un problème de compréhension pour les publics.
Dans un commentaire extrait des observations définitives du rapport de la VIe chambre de la Cour des comptes sur les fraudes aux prestations versées par la branche famille, il est indiqué, sous l'intitulé « Une politique de lutte contre les fraudes de plus en plus active et structurée » : « en 2018, les CAF ont qualifié 48 897 fraudes pour un montant agrégé d'un peu plus de 300 millions d'euros, ce qui marque un triplement par rapport à 2010 où l'on était sur 13 114 fraudes et un montant légèrement supérieur à 90 millions d'euros. Mais cela reste très en deçà du niveau estimé de la fraude (15 % ) ». Comment réagissez-vous à ce pourcentage ?
On ne peut jamais comparer une appréciation théorique et une réalité pratique, une méthode statistique et le résultat d'une action. Le montant estimé de la fraude, que je rapporte aux 90 milliards d'euros de prestations de toute nature, est compris – et je ne m'en réjouis pas – entre 1,9 et 2,6 milliards d'euros. Nous constatons une augmentation, mais cela ne représente pas 15 %. J'ai le rapport sous les yeux et les autres chiffres que vous avez cités, monsieur le président, sont parfaitement exacts.
La difficulté est que chacun – les caisses, la Cour des comptes – y va de sa méthode et nous n'y voyons pas très clair. Néanmoins, la CNAF mérite d'être saluée, car elle a effectué une estimation assortie d'un plancher, ce qui donne une base de travail et une idée des marges de progression. Vous êtes dans une démarche très sérieuse à cet égard, même si la méthodologie est perfectible. Nous espérons qu'elle puisse s'appliquer à terme dans toutes les caisses. Notre objectif était de vous entendre sur ce point et vos réponses montrent une véritable maîtrise de la question.
Au nom des agents des CAF, je suis honoré de vos propos. D'une branche à l'autre de la sécurité sociale, nous n'avons pas tous le même métier, ni les mêmes entrants, ni les mêmes activités. Cela peut justifier des estimations ou des outillages différents, mais le souci de la justice, de l'égalité et de la préservation des deniers publics est incontestablement partagé dans l'ensemble des branches de la sécurité sociale, que ce soit en matière de recouvrement, de pensions ou d'assurance maladie.
La Cour des comptes mentionne également le délai de prescription, qui est un sujet un peu sensible. Pourquoi les CAF ne retiennent-elles pas le délai de cinq ans pour mettre en recouvrement les indus frauduleux, alors que c'est une disposition habituelle du code civil ?
Les prescriptions juridiques ne sont pas discutables, pas plus que l'ensemble du système technique et informatique de délivrance des prestations, de conservation de la mémoire relative à celles-ci et d'activation des données. Cette mémoire est de deux ans et non de cinq ans. Même si nous avons entrepris la reconstruction de notre système dans le cadre de la COG 2018-2022, une généralisation à cinq ans n'est pas atteignable à très brève échéance.
J'apporterai toutefois deux nuances.
D'abord, pour un dossier particulièrement frauduleux, le droit nous demande de remonter sur cinq ans. Le système technique ne permet pas de déployer systématiquement une démarche de contrôle sur une profondeur de cinq ans, mais nous sommes néanmoins capables de traiter une affaire qui le mérite.
Ensuite, en matière sociale, le temps passé ne fait pas de bien. Pour les prestations les plus sociales – en mettant de côté les prestations plus familiales – la majorité des 13 millions d'allocataires de la branche famille ne connaîtront pas une situation parfaitement stable pendant cinq ans, si bien que la profondeur d'action sur cinq années ne donnerait pas nécessairement les résultats les plus convaincants. En d'autres termes, il vaut mieux se rendre capable de récupérer plus vite un indu de prestation sociale qu'attendre trop longtemps.
Compte tenu de votre fonction, cet argument est entendable. Mesdames et messieurs, merci pour vos réponses. Nous reviendrons probablement vers vous sur quelques points du questionnaire que nous vous avions adressé.
La réunion se termine à dix-huit heures trente.
Membres présents ou excusés
Commission d'enquête relative à la lutte contre les fraudes aux prestations sociales
Réunion du mardi 23 juin 2020 à 17 heures
Présents. - M. Pascal Brindeau, M. Patrick Hetzel, M. Alain Ramadier, M. Michel Zumkeller
Excusés. - Mme Josette Manin, M. Thomas Mesnier