Intervention de Amélie de Montchalin

Réunion du mercredi 11 décembre 2019 à 17h30
Délégation française à l'assemblée parlementaire du conseil de l'europe

Amélie de Montchalin, Secrétaire d'État chargée des Affaires européennes :

Pour ce qui concerne votre constat d'un supposé affaiblissement des groupes politiques, je pense qu'il ne faut pas porter de conclusions définitives ou hâtives. Personnellement, j'ai en mémoire la récente élection de la nouvelle Secrétaire générale du Conseil de l'Europe, qui a été marquée par une influence réelle des groupes politiques dans le processus. Mais vous avez raison de rester vigilants car il ne faut pas laisser se cristalliser des lignes de fracture principalement nationales au sein du Conseil de l'Europe.

J'observe d'ailleurs que le Conseil de l'Europe n'est pas une instance multilatérale classique, justement parce qu'il est doté d'une Assemblée parlementaire. Le dialogue de cette instance parlementaire avec le Comité des Ministres conduit à des orientations un peu plus particulières que dans d'autres organisations internationales.

Il est donc essentiel, pour infléchir les positions dictées par les intérêts nationaux, que vous, membres de l'APCE, vous nouiez des contacts et des liens avec les parlementaires d'autres délégations nationales, ukrainiens, turcs, baltes ou autres. C'est par la confrontation des idées et les échanges que les divergences peuvent être surmontées dans l'intérêt général, à travers des logiques de coalitions. La difficulté, j'en conviens, réside dans le fait que certaines délégations nationales sont moins pluri-partisanes que celles des pays d'Europe occidentale.

Pour le Président de la République et le Gouvernement, en tout cas, il est essentiel d'éviter que les structures multilatérales changent d'objectifs par la pratique. Il est capital qu'elles tiennent et accomplissent leur mandat. En restant fermes sur l'accomplissement de ce mandat, on pousse les autres délégations à se positionner sur le fond des dossiers et non par rapport à l'intérêt géopolitique de leur pays. Naturellement, le successeur de la Présidente actuelle de l'APCE, en janvier, devra intégrer les risques encourus par les groupes politiques et par son institution s'il laisse les débats dériver sur le plan de la confrontation des intérêts nationaux.

Pour ce qui concerne le mécanisme de réaction conjointe à l'égard des États défaillants, évidemment, les membres du Comité des Ministres ont eu des discussions sur les conséquences d'un déclenchement de la procédure et sur la dynamique que celui-ci pourrait enclencher. Le champ des motifs ouvrant la possibilité de recourir à cette procédure a été défini selon un éventail assez large pour ne pas restreindre le type de violations couvertes, mais tout l'objectif de la procédure est de parvenir à toujours préserver la convergence de vues du Comité des Ministres et de l'APCE, car on sait que si l'on veut que cette procédure fonctionne, on a besoin de l'Assemblée parlementaire.

Si, par comparaison, l'on se réfère à l'Union européenne et à l'article 7 du traité sur l'Union sur la violation de l'État de droit, l'expérience montre que l'unanimité requise au Conseil européen bloque les conséquences de la procédure. Dans le cas de la procédure proposée au Conseil de l'Europe, le dialogue entre le Comité des Ministres et l'APCE tout au long des différentes étapes du mécanisme favorisera la convergence de vues des organes statutaires et devrait permettre d'éviter un veto, même si on ne peut néanmoins totalement l'exclure.

La démarche proposée nous semble assez bien calibrée pour ne pas déclencher la procédure conjointe de sanction sur un coup de tête, tout en reposant sur une sorte d'aller-retour permanent entre l'organe politique en charge du dialogue interétatique et l'organe parlementaire.

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