Intervention de Nicole Trisse

Réunion du jeudi 10 décembre 2020 à 10h00
Délégation française à l'assemblée parlementaire du conseil de l'europe

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNicole Trisse, Présidente :

. Mes chers collègues, je suis très heureuse de souhaiter la bienvenue à toutes les personnes qui ont accepté de participer, ce matin, à cette visioconférence pour débattre, à l'occasion du 70ème anniversaire de la signature de la convention européenne des droits de l'Homme, de la portée de ce traité dans notre droit national, au bénéfice de nos concitoyens.

Monsieur le juge à la Cour européenne des droits de l'Homme, Madame la Présidente du Conseil national des Barreaux (CNB), Monsieur le Président de la chambre criminelle de la Cour de cassation, je vous remercie infiniment pour votre présence parmi nous. Je ne doute pas que vos interventions nous permettront de porter un regard éclairé sur l'un des apports du Conseil de l'Europe les plus concrets et connus de nos compatriotes.

Signée le 4 novembre 1950 à Rome, la convention européenne des droits de l'Homme est le premier traité européen d'après-guerre qui a conféré une reconnaissance formelle à des libertés et des droits fondamentaux pour les citoyens de notre continent. Si elle a été enrichie de nombreux Protocoles additionnels, elle comportait déjà dans son corpus initial des dispositions essentielles : je me bornerai à cet égard à ne citer que l'article 2 sur le droit à la vie, les articles 3 et 4 interdisant la torture et les traitements inhumains ainsi que l'esclavage, l'article 5 sur le droit à la liberté et à la sûreté, l'article 6 sur le droit à un procès équitable, ou encore les articles 8 sur le respect de la vie privée et familiale, 9 sur la liberté de pensée et de conscience et, enfin, 10 et 11 sur les libertés d'expression ainsi que de réunion et d'association.

Nous commémorons ces jours-ci l'avènement de ce texte dans un contexte un peu particulier, marqué par la grave crise sanitaire née de la pandémie de Covid-19 qui a contraint les États, y compris les plus démocratiques, à restreindre les libertés pour sauver des vies.

Mais ne pas souligner aujourd'hui l'importance fondamentale de ce traité et des instruments qu'il a mis en place pour assurer son effectivité constituerait un oubli coupable. En effet, la convention est sans doute l'un des textes juridiques les mieux connus des Français, qui n'hésitent pas à s'appuyer sur ses dispositions pour former des recours contre l'État devant la Cour européenne des droits de l'Homme.

Pourtant, la France, pays hôte du Conseil de l'Europe, n'a ratifié cette convention que le 3 mai 1974, soit vingt-quatre ans après sa signature et vingt-et-un ans après son entrée en vigueur. De plus, notre pays n'a permis à ses résidents de saisir la Cour européenne des droits de l'Homme qu'en 1981.

Désormais, plusieurs centaines de requêtes de ressortissants français sont attribuées aux formations judiciaires de la Cour européenne des droits de l'Homme chaque année, sur le fondement le plus souvent de la convention. C'est dire la place qu'elle occupe à présent dans notre ordonnancement juridique, d'autant que la France a ratifié, par la loi du 3 avril 2018, le Protocole n° 16 qui permet aux juridictions nationales suprêmes de solliciter l'avis consultatif de la Cour de Strasbourg sur des questions de principe relatives à l'interprétation ou à l'application des droits et libertés définis par la convention ou ses Protocoles dans certaines affaires pendantes.

À l'aune de cette année 2020, le succès de la convention du 4 novembre 1950 n'est plus à démontrer alors même que cela n'était pas acquis au départ. Reste malgré tout, selon moi, une ultime étape pour parfaire l'édifice juridique qui a été érigé il y a soixante-dix ans, à savoir l'adhésion formelle de l'Union européenne à ce texte, conformément à l'article 6 du traité sur l'Union européenne. Depuis l'automne 2019, le dialogue de la Commission européenne avec le Conseil de l'Europe a repris sur ce sujet, de sorte qu'une issue au blocage né de l'avis du 18 décembre 2014 de la Cour de Luxembourg pourrait être trouvée prochainement, ce dont je me réjouis. Mais sans doute y reviendrons-nous de manière approfondie nous lors de notre discussion.

Avant d'engager plus avant nos échanges, je vous propose de regarder ensemble un court message vidéo que Monsieur le Garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti, sollicité lui aussi pour cette table ronde, a enregistré à notre intention. L'agenda du Ministre de la Justice ne lui permettant pas de participer à notre visioconférence, Monsieur Dupond-Moretti a néanmoins tenu à prendre part, sous cette forme particulière, à notre débat, qui lui tient à cœur. Je profite de l'occasion pour l'en remercier chaleureusement.

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