Intervention de Matthias Guyomar

Réunion du jeudi 10 décembre 2020 à 10h00
Délégation française à l'assemblée parlementaire du conseil de l'europe

Matthias Guyomar, juge français à la Cour européenne des droits de l'Homme :

En tant que juge de la Cour européenne des droits de l'Homme, il ne m'appartient pas de me prononcer sur le calendrier en lui-même mais j'espère, à titre personnel, que l'adhésion de l'Union européenne à la convention européenne des droits de l'Homme interviendra le plus vite possible. Pour autant, je rejoins les propos de la Présidente du CNB : la situation actuelle ne constitue pas un obstacle insurmontable au bon fonctionnement et à la bonne articulation des ordres juridiques européens. Certes, ceux-ci sont autonomes et se chevauchent parfois, mais ils coïncident aussi. Ainsi, l'arrêt Bosphorus rendu en 2005 par la Cour européenne des droits de l'Homme a-t-il consacré une présomption de protection équivalente dans les ordres juridiques. La Cour de Strasbourg a, en l'espèce, estimé qu'un acte de droit national respectant le droit de l'Union européenne était présumé respecter aussi la convention européenne des droits de l'Homme.

Il existe en outre des ponts du côté de l'ordre juridique de l'Union européenne : d'abord dans la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union, qui a consacré comme principes généraux du droit communautaire les principes et exigences attachés au respect de la convention européenne des droits de l'Homme ; ensuite, à l'article 52 de la Charte des droits fondamentaux. On peut donc continuer à fonctionner dans le cadre actuel, mais cela demande malgré tout, de la part des juges des deux Cours européennes, un effort renouvelé de vigilance et de cohérence.

Cependant, il me semble important d'insister sur le fait que l'adhésion de l'Union européenne à la convention européenne des droits de l'Homme serait tout de même souhaitable pour deux raisons. En premier lieu, il y a, à mon sens, un paradoxe à ce que tous les États membres de l'Union aient signé et ratifié la convention et que l'Union elle-même ne l'ait pas fait. Il faut mettre un terme à ce paradoxe qui peut créer une ambiguïté, voire des difficultés. En second lieu, l'existence d'un contrôle externe à l'Union européenne paraît souhaitable, ne serait-ce que pour accroître et renforcer la cohérence des ordres juridiques européens.

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