Intervention de Nicole Trisse

Réunion du mercredi 2 juin 2021 à 16h40
Délégation française à l'assemblée parlementaire du conseil de l'europe

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNicole Trisse, Présidente :

Mes chers collègues, nous avons le plaisir de recevoir aujourd'hui M. Clément Beaune, Secrétaire d'État chargé des Affaires européennes auprès du Ministre de l'Europe et des Affaires étrangères. Monsieur le Ministre, je vous souhaite la bienvenue devant notre délégation, pour partie présente et pour partie connectée en raison du contexte sanitaire. Nous n'avions encore jamais eu l'occasion de vous auditionner depuis votre prise de fonctions et réparons ainsi, aujourd'hui, une carence regrettable.

En effet, il nous tardait de vous entendre sur un certain nombre de sujets car vous suivez les questions concernant le Conseil de l'Europe et êtes, à ce titre, l'interlocuteur gouvernemental naturel de notre délégation. Or, plusieurs événements importants se sont produits ces derniers mois dans la sphère européenne, tous ayant de potentielles répercussions sur cette Organisation qui siège à Strasbourg et qui incarne la communauté de valeurs de l'Europe moderne.

Tout d'abord, le 24 décembre 2020, l'Union européenne et le Royaume-Uni ont conclu un accord scellant leur nouvelle relation post-Brexit. Vous-mêmes avez suivi ce dossier de très près. Or, cette réalité fait que le Conseil de l'Europe est désormais la seule organisation européenne dans laquelle le Royaume-Uni siège en qualité de membre à part entière, ce qui lui confère sans doute une importance nouvelle dans l'affirmation de la pérennité des liens du continent européen avec le Royaume-Uni.

Ensuite, à la différence du Parlement européen – mais j'ai cru comprendre que cela pourrait prochainement changer, un retour à Strasbourg étant envisagé pour la session de juin –, l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe a, dès le 25 janvier dernier, repris ses sessions à Strasbourg selon un format hybride. Symboliquement, cette étape, fortement soutenue et accompagnée par le gouvernement français, a marqué la capacité de cette ville capitale à honorer dans des conditions satisfaisantes ses obligations d'accueil des institutions de l'Europe communautaire et extra-communautaire. D'importantes décisions ont été prises lors des sessions d'hiver et de printemps, auxquelles plusieurs d'entre nous ont participé : je citerai, entre autres, l'adoption de la nouvelle procédure de sanction conjointe des États membres du Conseil de l'Europe qui ne respectent pas leurs obligations en matière de droits de l'Homme et l'élection de plusieurs titulaires à des fonctions clés de l'Organisation.

Enfin, notre conscience de démocrates et de farouches défenseurs des libertés s'est trouvée profondément heurtée par le traitement réservé à l'opposant russe Alexeï Navalny, d'une part, ainsi qu'au peuple et aux opposants politiques en Biélorussie, d'autre part.

Après la tentative d'empoisonnement à l'agent neurotoxique dont M. Alexeï Navalny a été l'objet à l'été 2020, ce dernier a été emprisonné et condamné de manière arbitraire dès son retour sur le sol russe, en ce début d'année. De nombreux manifestants pacifiques réclamant sa libération ont aussi été arrêtés et molestés, suscitant l'inquiétude la plus vive. Lors de la session de printemps, l'APCE a adopté, sur proposition de notre collègue Jacques Maire, une résolution appelant la Russie à respecter les droits de M. Navalny mais elle n'a reçu pour toute forme de réponse qu'une notification à son rapporteur d'une interdiction à se rendre sur le territoire russe, à l'instar d'autres responsables européens de premier plan. Cette voie constitue assurément une mise au défi du Conseil de l'Europe et de ses États fondateurs.

Le cas de la Biélorussie, dont je rappelle qu'elle n'est pas un État membre du Conseil de l'Europe mais a vocation à y adhérer dès lors que la démocratie y sera établie, n'est guère plus encourageant. Après l'élection présidentielle contestée du 9 août dernier, le peuple biélorusse a subi la répression brutale et féroce d'un régime aux abois. En avril, notamment sur proposition de notre collègue Alexandra Louis, l'APCE en a appelé à une enquête internationale sur les violations des droits humains en Biélorussie. Mais là-aussi, la réponse des autorités ne laisse pas de place au doute, comme l'illustre l'acte sans précédent de « piraterie d'État », pour reprendre vos propres mots Monsieur le Ministre, ordonné par M. Loukachenko le 24 mai dernier à l'encontre d'un avion de la compagnie Ryanair reliant deux capitales européennes, aux seules fins d'arrêter un opposant politique. Mais sans doute aurons-nous l'occasion d'y revenir.

Au-delà de ces évolutions récentes, certains sujets de fond majeurs restent toujours pendants. C'est le cas notamment de la question de l'adhésion de l'Union européenne à la convention européenne des droits de l'Homme qui, si elle a connu des développements positifs ces derniers mois, n'est toujours pas réglée. C'est le cas, également, de l'articulation des procédures d'évaluation de l'État de droit en vigueur au sein de l'Union européenne et du Conseil de l'Europe, le risque de doubles standards étant un luxe que nous ne pouvons pas nous permettre.

Vous le voyez, Monsieur le Ministre, les sujets d'interrogation et, parfois, de préoccupation sont nombreux, de sorte que votre venue devant nous était attendue. Mais, sachant votre temps compté, je vous laisse sans plus tarder la parole pour nous livrer votre propos liminaire, puis nous aurons si vous le voulez bien un rapide échange sous la forme de questions des membres de la délégation et de réponses de votre part.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.