Cette année, l'examen de la mission Recherche et enseignement supérieur s'inscrit dans un contexte budgétaire particulier, puisque le projet de loi de finances concrétise la trajectoire ambitieuse du projet de loi de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030 et portant diverses dispositions relatives à la recherche et à l'enseignement supérieur, dit LPR, actuellement examiné au Sénat, qui va se traduire dès l'année prochaine par un choc budgétaire massif en faveur de la recherche et de ses personnels.
Lors des vingt-trois auditions que j'ai menées dans le cadre de la préparation de ce rapport spécial, dont certaines communes avec mon collègue rapporteur spécial Fabrice Le Vigoureux, j'ai mesuré l'assentiment que suscite la mise en place de nouveaux outils – tels que les chaires de professeur junior – qui vont créer un véritable choc d'attractivité pour les carrières des chercheurs, qui en ont bien besoin.
L'accord conclu entre le Gouvernement et les syndicats majoritaires le 12 octobre dernier permettra de revaloriser les rémunérations de nos jeunes chercheurs à hauteur de 92 millions d'euros par an jusqu'en 2027. Très concrètement, leur salaire sera porté à un minimum de 2 SMIC dès l'année prochaine, contre 1,3 SMIC actuellement. Ce projet de loi de finances ne se contente donc pas de conforter la dynamique enclenchée depuis 2017 : il la renforce considérablement.
Premier constat : le budget de la recherche augmente, à périmètre constant, de 2,25 % en autorisations d'engagement. Les moyens des programmes 150 et 172 sont respectivement en hausse de 165 et 224 millions d'euros en crédits de paiement, tandis que la diminution des crédits du programme 193 s'explique par la fin du remboursement de la dette française à l'Agence spatiale européenne. La baisse des crédits du programme 192 tient quant à elle à une mesure de périmètre, puisque le programme Aides à l'innovation de Bpifrance sera désormais financé par le quatrième programme d'investissements d'avenir (PIA 4).
Deuxième constat : les grands opérateurs de la recherche publique sont les principaux bénéficiaires de ces hausses de crédits. Conformément à la LPR, l'Agence nationale de la recherche (ANR) verra ainsi sa dotation portée à plus d'un milliard d'euros en crédits de paiement en 2021, avec l'ambition d'améliorer significativement le taux de succès de ses appels à projets, de 16 % actuellement à 23 % l'année prochaine, soit + 7 points.
Troisième constat : malgré ces hausses significatives, certains opérateurs – l'Institut français du pétrole et des énergies nouvelles (IFP-EN) ou l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) par exemple – ne parviendront pas à endiguer l'érosion de leurs effectifs. En effet, la baisse de leurs fonds propres et de leurs crédits récurrents, à laquelle s'ajoute le glissement vieillesse technicité (GVT), les contraint à flécher une partie de ces hausses vers la stabilisation de leurs emplois, alors même que leurs prérogatives sont étendues.
C'est pourquoi j'ai déposé un amendement visant à accompagner ces opérateurs à hauteur de 9 millions d'euros supplémentaires en 2021, afin qu'ils puissent non seulement stabiliser leurs effectifs, mais aussi exécuter le schéma d'emplois prévu par la loi de programmation, soit 315 équivalents temps plein (ETP) supplémentaires.
Quatrième point d'attention : les crédits dédiés à la recherche duale étant dorénavant inscrits au sein du plan de relance, nous devrons veiller à la pérennisation des inscriptions budgétaires au delà de la durée de vie du plan de relance.
En outre, l'effort historique que ce projet de loi de finances engage doit être appréhendé à travers d'autres outils de financement : le plan de relance prévoit à lui seul un effort cumulé d'environ 4 milliards d'euros pour la recherche sur trois ans, dont 428 millions d'euros pour l'accélération de la trajectoire de l'Agence nationale de recherche ; la mission Investissements d'avenir contribuera au soutien à long terme de la recherche et de l'innovation à hauteur de 16,6 milliards d'euros en autorisations d'engagement, dont 2,4 milliards d'euros au seul titre du PIA 4 pour accélérer nos innovations dans l'hydrogène, la cybersécurité, la technologie quantique ou d'autres programmes prioritaires, indispensables au redressement de notre économie ; le programme Horizon Europe est doté de 91 milliards d'euros ; enfin, les contrats de plan État-régions (CPER) participeront largement à l'effort national de recherche et d'innovation.
Pour finir, comment ne pas évoquer le crédit d'impôt recherche (CIR), examiné lors de la première partie du projet de loi de finances. Le Gouvernement devra remettre au Parlement deux rapports d'ici au 30 septembre prochain. Monsieur le président, l'efficience, le ciblage et le contrôle de ce crédit d'impôt pourraient faire l'objet d'un travail spécifique de la commission des finances au cours de l'exercice budgétaire à venir.