Il y a quelque chose d'étrange à entamer l'examen en commission de ce projet de loi au lendemain de l'intervention du Président de la République qui, pour l'essentiel, a souhaité rassurer les Français sur la maîtrise du virus. Sans que celui-ci ait totalement disparu, la vie économique, sociale et scolaire devrait pouvoir reprendre normalement. Or plutôt que d'organiser la fin de l'état d'urgence sanitaire, ce texte maintient en l'état, et pour une durée de quatre mois après la fin de l'état d'urgence sanitaire fixée, après accord en CMP, au 10 juillet, des dispositions exceptionnelles, attentatoires aux libertés collectives et individuelles, permettant à l'exécutif de faire fi des droits du Parlement, alors même qu'on nous dit que la situation sanitaire est sous contrôle et que les conditions de sécurité sanitaire sont établies.
S'agissant de la limitation des rassemblements, le Conseil d'État a considéré samedi que, même dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire, le droit de manifester ne saurait être totalement interdit. D'ailleurs, même interdites, les manifestations se tiennent, inspirant au ministre de l'intérieur un concept particulier consistant à les considérer comme « tolérées ». L'ordre républicain exige pourtant qu'un acte commis en dépit de son interdiction doit être sanctionné. Il devient compliqué de démêler tous ces concepts !
En revenant sur la date du 10 juillet, le projet de loi revient aussi à prolonger sans le dire l'état d'urgence.
Le délai de conservation des données personnelles, à l'article 2, a fait l'objet de débats importants, qui étaient indispensables parce qu'ils touchent à des éléments constitutifs des libertés publiques individuelles. Notre groupe avait voté les dispositions initiales, qui étaient équilibrées. Désormais, le déséquilibre est total, tant sur le plan juridique que politique. Les droits du Parlement ne peuvent plus souffrir de restriction au nom de l'état d'urgence sanitaire, dès lors que celui-ci n'est plus de mise et alors même que nous serions capables de prendre les dispositions nécessaires dans des situations exceptionnelles de retour de l'épidémie.
Nous ne pouvons pas nous satisfaire d'un Parlement qui abandonnerait ses droits à l'exécutif. C'est la raison pour laquelle nous avons déposé des amendements de suppression des articles 1er et 2. Les députés du groupe UDI et indépendants voteront résolument contre ce texte.