La question de la prescription des violences sexuelles se pose avec de plus en plus d'acuité, la société ayant du mal à accepter qu'une personne identifiée comme l'auteure d'une infraction puisse ne jamais être poursuivie. Par ailleurs, l'amnésie traumatique, de plus en plus documentée, est une donnée nouvelle qui nourrit le débat.
J'ai toujours considéré, tant sur le plan universitaire que professionnel, que la prescription était nécessaire. Il existe une hiérarchie entre les crimes contre l'humanité et les crimes relevant du droit commun, et il est important que notre système judiciaire en tienne compte. De plus, dans ces dossiers où la parole se libère trop tard, les investigations peuvent être longues et sont parfois surinvesties par la victime. Or, quand on n'arrive pas à trouver les preuves qui permettraient d'établir la culpabilité et de prononcer des sanctions, ce parcours long, douloureux se solde par un échec, et c'est traumatisant pour les victimes. La loi Schiappa, en portant à trente ans le délai de prescription, constitue une avancée. Mais, au-delà de trente ans, le risque de dépérissement de la preuve est réel, qui plus est dans un domaine où celle-ci est très difficile à établir.