Intervention de Stéphane Peu

Réunion du mercredi 31 mars 2021 à 9h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaStéphane Peu :

Nous portons sur cette proposition de loi un regard plutôt positif même si nous discuterons avec son rapporteur de l'opportunité de déposer des amendements en séance publique.

La question du patrimoine, en particulier foncier, est l'un des facteurs de l'accroissement des inégalités. Un grand résistant corse, Jean Nicoli, assassiné en 1943 par les Chemises noires, évoquait déjà les « spoliés de la terre ». L'Île-de-France et la Corse ont au moins un point commun : ce sont les deux régions où les inégalités de revenus entre les plus riches et les plus pauvres sont les plus importantes. De tels écarts, contrairement à ce que l'on pourrait penser, sont notamment liés à la question du patrimoine, comme le montrent les travaux de Thomas Piketty. Tous les mécanismes de défiscalisation instaurés par tous les gouvernements successifs ont plutôt accéléré le développement de ces inégalités et il est donc temps de les réorienter.

Il me paraîtrait intéressant d'adosser le droit de préemption à un intérêt anti spéculatif car la lutte contre la spéculation foncière et immobilière relève de l'intérêt public. Le droit de propriété est cependant placé si haut dans notre pays que toute tentative d'aller en ce sens a toujours échoué – je pense par exemple à la loi ALUR : la préemption suppose toujours la construction d'une école, d'une place publique ou d'une gare.

Cette proposition de loi pourrait d'ailleurs avoir des prolongements intéressants. Plus de quarante stations de métro vont être construites dans le cadre du Grand Paris Express. Les prix de certains terrains sont parfois multipliés par quinze mais exclusivement suite à cet investissement public. Or, il est anormal de pouvoir s'enrichir en dormant : l'intérêt public consisterait à préempter assez largement pour construire des logements et que les classes populaires puissent habiter près des réseaux de transport au lieu d'être reléguées toujours plus loin.

Sauf erreur de ma part, la question de la finalité de la préemption et de son utilité ou de son orientation sociale mérite d'être précisée dans ce texte. Même si je ne suis pas un inconditionnel des expérimentations, j'ai toujours pensé qu'il est des domaines où elles sont légitimes et c'est en l'occurrence le cas afin de pouvoir garantir aux Corses de pouvoir habiter chez eux.

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