La rédaction actuelle de cette proposition de loi constitutionnelle constitue une réponse inadaptée à une vraie question posée à notre démocratie. Personne ne se satisfait du fait que d'élection en élection – le phénomène touchant cependant moins l'élection présidentielle, peut-être aurait-il fallu un texte de portée plus globale –, un nombre grandissant de nos concitoyens rejette le processus électoral et choisisse de ne pas se rendre aux urnes. L'expression de ce non-choix, qui affaiblit effectivement la légitimité démocratique des élus, nous conduit à nous interroger sur cette distance de plus en plus importante entre nos concitoyens et leurs représentants politiques, qu'ils soient locaux ou nationaux.
On réfléchit donc depuis longtemps à distinguer l'abstention, le vote nul et le vote blanc, ce dernier étant l'expression d'un non-choix entre deux candidats présents au second tour.
Proposer de reconnaître le vote blanc pour faire progresser la démocratie peut s'entendre. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle une proposition de loi émanant de notre groupe et visant à distinguer vote nul et vote blanc et à comptabiliser celui-ci avait été adoptée en 2014. Nous n'avions pas été à l'époque jusqu'à intégrer ce vote blanc dans le calcul de la majorité absolue.
Si ce pas supplémentaire devait être franchi demain, il ne le serait qu'à certaines conditions. Or la rédaction actuelle, notamment de l'article 2, n'est pas acceptable pour nous dans la mesure où elle remet en cause non seulement le second tour de l'élection présidentielle – le président n'étant pas élu à la majorité absolue, selon la règle constitutionnelle, une nouvelle élection doit être organisée – mais également les résultats du premier. Nous en rediscuterons puisque des amendements ont été déposés sur cet article.
La solution préconisée me paraît contraire aux valeurs démocratiques puisque l'expression de 3 %, 4 %, 6 % ou peut-être 8 % d'électeurs remettrait en question l'équilibre issu du choix de 50 %, 60 % ou 70 % du corps électoral, ce qui n'est pas acceptable du point de vue de l'équilibre démocratique et donc de nos institutions.
Certes, on peut imaginer que le second tour de l'élection présidentielle doive être réorganisé – il faut en débattre. Pour ma part, je préconise plutôt de déclarer élu à la majorité relative le candidat arrivé en tête, qui aura donc besoin de conquérir au cours de son mandat une légitimité dans l'opinion publique. Se poserait alors la question de l'exercice du pouvoir. En tout cas, remettre en question la totalité du processus électoral ne nous semble pas en l'état conforme aux valeurs démocratiques.
Nous nous prononcerons sur ce texte à l'issue du débat en commission et dans l'hémicycle. En l'état, nous ne pouvons nous y rallier, bien que nous soyons favorables à la prise en compte du vote blanc de manière plus importante qu'aujourd'hui.