Intervention de Paul Molac

Réunion du mercredi 17 novembre 2021 à 9h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul Molac :

Cette proposition de loi est-elle en mesure de régler ou de contribuer à régler le problème démocratique auquel nous sommes confrontés, avec l'abstention et la défiance qui est souvent notre lot ? Je ne le pense pas.

Il faut d'abord faire un sort à l'idée selon laquelle les parlementaires cumuleraient les mandats dans le temps : 50 % des députés ne sont pas réélus. Cela veut dire qu'il y a un renouvellement énorme.

Ensuite, tout dépend de la manière dont on conçoit le rôle du député. Selon certains, le député est un bel esprit, qui fait la loi en étant dégagé de toute contingence matérielle, voire de tout territoire. Une loi élaborée de cette manière est peut-être le paradis aux yeux d'un tel député, mais c'est l'enfer pour la majorité des Français, car une loi déconnectée de la réalité n'est jamais un bon texte.

À ce propos, cela m'amuse toujours quand j'entends parler du « Citoyen » : pour ma part, je ne connais que des « citoyens », qui viennent me voir pour que je règle leurs problèmes. Parfois, c'est tout simplement impossible au vu du dossier. Mais il arrive aussi que ce soit l'administration qui bloque, parce qu'elle applique les règles de manière rigide. Peu importe si le service rendu au citoyen et à la collectivité n'est pas bon : l'essentiel est que tout soit bien bordé sur le plan juridique, par crainte du juge. Je pourrais en donner des exemples dans de nombreux domaines, parmi lesquels l'urbanisme et les transports. Je pense ainsi à une jeune fille qui est obligée de faire 5 kilomètres à vélo tous les matins pour aller à l'école alors qu'il aurait été préférable qu'elle prenne le car. Or cela lui a été refusé au motif qu'elle devrait être accompagnée par un adulte entre l'arrêt du car et l'école. Son frère aurait pu le faire, mais c'est impossible aux yeux de l'administration. Que voulez-vous faire quand on en arrive à un tel degré d'imbécillité ?

Les citoyens nous disent que nous sommes bien gentils mais que nous n'avons pas de pouvoir, que c'est l'administration qui dirige tout. À cela s'ajoute la superpuissance de l'exécutif sous la Ve République : les députés ne servent pas à grand-chose. La solution me paraît évidemment de passer à une VIe République, mais pas forcément celle de notre ami Mélenchon. Ce pourrait être une République fédérale, car quand on divise le pouvoir, on introduit de l'équilibre et de la démocratie et on rend les gens intelligents. C'est le cas des Allemands : en l'absence de système majoritaire, ils sont obligés d'être intelligents.

Le renforcement de nos pouvoirs me semble être un minimum, que ce soit par la maîtrise de notre ordre du jour, par l'instauration éventuelle d'une minorité de blocage ou par la possibilité d'exercer un véritable contrôle de l'exécutif. Lorsqu'un ministère nous remet un rapport, il ne nous montre que ce qu'il veut bien nous montrer, de sorte que si nous ne disposons pas de l'assistance nécessaire pour effectuer une analyse complète, nous nous faisons rouler dans la farine ! Pour que le contrôle soit efficace, l'action de chaque ministère doit être suivie par des spécialistes. J'ai conscience de faire ici un peu le procès de la Ve République.

Quant au Sénat, il représente davantage les communes – un sénateur a bien souvent été représentant de l'Association des maires de France dans son département – que les départements et les régions. Aussi les sénateurs pourraient-ils être élus par trois collèges représentant respectivement les régions, les départements et les communes.

Ces différentes mesures seraient beaucoup plus efficaces que le cumul des mandats car nous avons besoin de temps, notamment pour contrôler l'administration et, le cas échéant, lui imposer une décision politique lorsque celle-ci correspond aux besoins de la population.

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