Une loi qui veut conforter le respect des principes de la République trouvera une oreille attentive et bienveillante auprès du groupe de la Gauche démocrate et républicaine. Nous avons déjà eu l'occasion de le dire, notamment au ministre, lors des concertations préalables : non seulement nous serons au rendez-vous, mais nous ne serons pas avares de propositions allant dans le sens du renforcement du respect des principes républicains.
Malheureusement, force est d'admettre qu'on ne retrouve pas du tout dans ce projet de loi la force, les grands principes et les grandes avancées du discours à certains égards fondateur prononcé par le Président de la République aux Mureaux, et qui avait rencontré un relatif consensus dans le pays.
Pour commencer, vous faites l'impasse sur les grands maux dont souffre notre République et qui en affaiblissent les principes : la ségrégation territoriale, la mixité sociale mise à mal, une école de moins en moins uniforme, des territoires et des populations non seulement perdus, mais bel et bien abandonnés depuis de trop longues années – j'en suis un témoin direct en Seine-Saint-Denis. Tous ces sujets, qui auraient dû se retrouver au cœur d'un texte renforçant les principes de la République, sont totalement évacués pour laisser place à une loi de communication et bavarde ; et même si nous approuvons certaines de ses dispositions que nous tenterons de renforcer, cela reste à nos yeux sa très grande faiblesse.
Si nous prenons comme référence notre République laïque et sociale, deux termes indissociables, qui fonctionnent ensemble, votre projet de loi est unijambiste : il n'en traite qu'un sur deux, et de manière relativement communicationnelle. On ne fait pas une grande loi sur les principes de la République en ne retenant qu'un seul terme sur les deux qui la font marcher depuis très longtemps.
Jean-Pierre Chevènement, auquel je peux sans trop de difficulté me référer sur ces sujets, prévenait en 1999, alors qu'il était ministre de l'intérieur, que si nous continuions ainsi dans la voie de la dégradation de la mixité sociale et de la ségrégation des territoires, nous irions vers un apartheid urbain et social en Île-de-France. Tous les indicateurs montrent que, depuis cette date, ce constat s'est aggravé, et dans bien d'autres endroits. C'est là-dessus qu'il faut travailler : on ne peut pas rappeler les grands principes de la République et ne pas traiter des territoires, de la mixité sociale, de l'école : dans certains secteurs de ma ville ou de mon département, moins d'un quart de la population concernée scolarise ses enfants dans l'école de la République : ce n'est pas possible. C'est sur de telles failles de notre République que se construit et que prospère le séparatisme.