Je me permets d'ajouter que les interlocuteurs, extrêmement variés, que nous avons rencontrés lors des auditions nous ont très souvent demandé s'il y avait dans le texte une disposition à ce sujet. Certains nous ont même dit – j'avais réagi vivement – que nous ne faisions rien concernant le problème de la haine en ligne, sur différents supports. J'avais immédiatement souligné que l'article 18 répondait en partie à cette question.
Toutes les autorités religieuses nous en ont parlé, en particulier le Grand Rabbin de France et le président du Consistoire, qui nous ont dit qu'une grande partie du déferlement antisémite avait lieu de cette manière, par la divulgation de noms, d'informations qui ne sont pas nécessairement relatives à la vie privée – c'est pourquoi il est très important de mentionner d'autres critères. Les obédiences maçonniques nous l'ont également indiqué. On considère, dans leur tradition, qu'une personne peut dire si elle appartient à une loge maçonnique mais que ce n'est pas à d'autres de le faire, contre le gré de l'intéressé. Le représentant du Conseil français du culte musulman (CFCM) nous a également dit que de nombreux imams étaient exposés à la vindicte. Les associations d'élus locaux ont indiqué, de même, que des élus pouvaient être concernés.
Contrairement à certains collègues, je pense que les qualifications prévues dans le texte sont déjà assez restrictives. Il faudra prouver que les informations ont été diffusées dans le but d'exposer la personne à un risque. Devant les tribunaux, on le sait, certains allèguent qu'ils n'ont pas agi dans ce but. Dans l'affaire récente que la rapporteure a citée, c'est un des arguments qui ont été utilisés : on n'a fait que donner des informations, pas du tout dans le but de nuire. Or on sait très bien comment fonctionnent les réseaux sociaux : des personnes répandent, d'une manière faussement naïve, ce qu'ils présentent comme des informations, pour que la meute se déchaîne. Des personnes qui réfléchissent un peu moins appellent ensuite à la haine ou passent à l'acte.
Vous voulez supprimer cette disposition, qui est très encadrée, malgré toutes les auditions que nous avons faites mais aussi tout ce que nous pouvons voir dans nos circonscriptions. Des lycéens, des lycéennes, n'importe quel citoyen peut être confronté à ce problème.