J'ai l'impression en vous écoutant que le combat « contre » est perdu d'avance, car nous courrons après. Nous avons nous aussi établi notre principe de base sur le socle que vous avez appelé de différentes façons : la citoyenneté, l'universalisme, ce modèle républicain d'émancipation, de compréhension de l'altérité.
Or ce socle est actuellement totalement battu en brèche par un certain nombre de mouvements intellectuels, idéologues, qui ne tiennent pas simplement des propos vindicatifs contre l'un ou l'autre, mais ont bâti une vraie philosophie alternative, originaire des États-Unis mais de plus en plus présente en France. On peut l'appeler l'indigénisme, ou le néocolonialisme. Ces personnes considèrent que notre modèle d'intégration est un véritable « viol » vis-à-vis de leurs différences, et que l'on doit parvenir à un modèle qui n'est pas celui qui a été défendu en France depuis le début de la Troisième République, et peut-être même avant.
Nous rappelons sans cesse la doctrine de la Troisième République, qui défend l'ascenseur social et la méritocratie. Or cette doctrine n'est plus reconnue, faute d'éducation, par un certain nombre de nos concitoyens. Pourquoi avons-nous baissé les bras ? Je l'ignore, et j'en parle souvent avec le ministre de l'éducation nationale. Cela s'explique peut-être par l'absence d'acceptation de la mixité sociale.
On observe une augmentation des manifestations de phénomènes racistes et antisémites. Ne devrait-on pas changer d'angle de réflexion, en nous plaçant plus en amont, pour comprendre pourquoi notre modèle a échoué ? Lorsqu'on parle de laïcité, et je l'ai dit textuellement à Jean-Michel Blanquer, « on est ringard ». La charte de la laïcité est « ringarde ». Pourquoi en est-on arrivé là ? Comment lutter plus en amont pour ne pas « courir après le train » ?