Intervention de Bernard Perrut

Réunion du mercredi 24 mars 2021 à 11h00
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBernard Perrut :

Après un certain nombre d'auditions, j'évoquerai volontiers cette interrogation de chefs d'entreprise, reprise par les chambres de commerce et d'industrie : dans quel cadre juridique passe-t-on du télétravail exceptionnel au télétravail régulier ? Là est bien la question.

Je m'interroge beaucoup sur la difficile mesure du temps de télétravail. Elle repose sur les déclarations du salarié lui-même, puisque l'employeur ne peut pas la contrôler. Ce dernier peut alors être confronté à un dépassement de la durée maximale de temps de travail quotidienne ou hebdomadaire. Le salarié peine quant à lui à fixer des limites claires entre sa vie personnelle et sa vie professionnelle. Ceci soulève des questions sur l'organisation du droit à la déconnexion et la sécurisation des situations de télétravail.

Le régime légal du temps de travail apparaît en complète contradiction avec le mode de management des travailleurs à distance. Le management par projets ou par objectifs repose sur une confiance réciproque entre salariés et employeurs et sur la surveillance habituelle. Autrement dit, le télétravail conduit à passer d'une rémunération de la présence à une rémunération du résultat – du « livrable », en quelque sorte – dans le même esprit qui a conduit à forfaitiser le temps de travail de certains salariés.

Comment envisager et organiser la mise en place d'un régime spécifique prenant en compte l'autonomie consubstantielle au télétravail à domicile et nomade, dès lors que cette autonomie du travailleur apparaît comme un prérequis pour accéder au télétravail ?

Certains pays ont assimilé cette réalité incontournable en l'intégrant à la définition même du télétravail. Je songe notamment au Japon, où le télétravail se définit comme « une méthode d'organisation qui, grâce à l'utilisation des moyens d'information et de télécommunication, n'est pas soumise à des conditions d'exercice liées au lieu et à la durée du travail ». Un tel constat permet d'adapter la loi et d'appliquer au télétravail des dispositions particulières. Votre avis sur ce point intéressera les chefs d'entreprise, puisque le télétravail ne se résume pas à une mesure exceptionnelle. On le voit bien depuis le début du confinement. Il nous livre un aperçu du monde d'après la crise. Il faut donc y réfléchir rapidement et trouver d'éventuels accords avec les organisations syndicales et professionnelles pour qu'une fois réglementé, il donne satisfaction, tant aux chefs d'entreprise qu'aux salariés, dans le respect des droits de chacun, et le respect de la vie privée, qui me semble essentiel.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.