La crise sanitaire a fait apparaître au grand jour l'ampleur de la dépendance sanitaire de la France en matière de médicament, démontrant l'insuffisance des stocks et l'indisponibilité de certains médicaments, même pour des médicaments d'intérêt vital. Aujourd'hui, 80 % des principes actifs à usage pharmaceutique sont fabriqués dans des pays tiers à l'Union européenne, principalement en Inde et en Chine ; ils n'étaient que 20 % voici trente ans. La France est donc passée de la première place en Europe pour la production de médicaments à la quatrième place, derrière l'Italie.
Cette situation a des conséquences très graves pour les Français. Il est donc important de relocaliser la production des médicaments d'intérêt stratégique dans notre pays pour sortir de cette dépendance et gagner notre souveraineté sanitaire, en restructurant notre chaîne de production pour répondre aux besoins de la population et en nous appuyant sur notre tissu industriel, principalement pour les médicaments d'origine chimique. Nous sommes forts de 271 sites et presque 43 000 employés expérimentés.
Vous avez évoqué la coordination à l'échelon européen. Est-ce admettre que la France ne peut plus être compétitive dans ce domaine ? Comment réindustrialiser notre pays et devenir un acteur incontournable de la chaîne de production des médicaments ? Pensez‑vous que la gestion des stocks stratégiques doit s'appréhender à un niveau extranational sans risque de perte d'indépendance ? Nous avons vu, précisément, la coopération très limitée avec le Royaume-Uni sur les vaccins lors de cette dernière période.
La question du prix des médicaments est également une véritable préoccupation. Les mécanismes de régulation sont arrivés très récemment dans le débat public avec la mise sur le marché de plusieurs thérapies à des niveaux de prix très élevés. Je pense à des traitements innovants qui bouleversent la prise en charge de la vie des patients et ne s'intègrent plus au schéma classique d'évaluation. Ceci pose la question de la soutenabilité budgétaire des dépenses mais aussi de l'accès pour tous les patients à ces médicaments. Dans ces conditions, comment assurer l'accès rapide aux médicaments innovants à nos patients ? Les délais d'accès semblent certes se réduire mais ils restent globalement très supérieurs à ceux prévus dans la directive européenne. Certaines molécules ont aujourd'hui du mal à trouver le chemin de l'accès au marché dans le cadre de la procédure classique d'enregistrement. C'est une véritable préoccupation.