Tout à fait.
Au début de votre propos, vous parliez d'inertie. C'est particulièrement vrai en matière d'énergie. Nous l'avons constaté pendant nos auditions : le mot est souvent revenu. La réussite repose aussi sur les initiatives locales et citoyennes, car l'État ne peut pas tout faire. C'est d'ailleurs l'une des vertus des territoires à énergie positive pour la croissance verte (TEPCV) et des territoires à énergie positive (TEPOS) : ils ont prouvé leur utilité, non pas tant pour les projets dont ils auraient permis le développement que pour les dynamiques territoriales qu'ils ont créées, associant l'ensemble des acteurs. Les citoyens et les élus se sont ainsi emparés de la question de l'énergie et de la transition énergétique et écologique. De ce point de vue, ces dispositifs ont été une véritable réussite.
Ma première question est donc la suivante : pensez-vous engager de nouveau, sous quelque forme que ce soit, des initiatives de ce type ? Le développement des énergies renouvelables repose également sur l'investissement privé, nous l'avons constaté tout au long de nos auditions. Cela dit, il faut soutenir cet investissement – pas nécessairement de manière financière, d'ailleurs. Or, ce soutien fait souvent défaut. Surtout, les délais sont beaucoup trop longs – vous en parliez à l'instant. Depuis plusieurs années, nous avons déjà essayé de les raccourcir, mais certaines procédures réglementaires pourraient être faites parallèlement et non pas successivement. Cela mériterait peut-être d'être étudié. Le financement participatif, que nous avions souhaité développer durant la précédente législature, pourrait constituer lui aussi un levier pour accroître l'acceptation sociale des projets. Ce mécanisme n'est pas suffisamment développé. Dans nos visites dans d'autres pays, notamment au Danemark, nous avons vu que l'approche y était totalement différente : les projets sont partagés avant même qu'ils ne soient mis en œuvre. Il me semble que c'est là que réside, au moins en partie, la clé de leur réussite.
En ce qui concerne les ambitions que la France s'est données, elles font de notre pays l'un des moteurs, au niveau européen, en matière de transition écologique et énergétique. Ces objectifs ambitieux découlent de la loi de transition énergétique, des accords de Paris et de la mise en place de la PPE. À ce sujet, un nombre important des personnes que nous avons auditionnées et des élus que nous avons rencontrés nous ont signalé que les objectifs de la PPE mériteraient d'être débattus au Parlement. C'est le deuxième point que je souhaitais aborder, c'est le message que nous souhaitions vous faire passer, monsieur le ministre d'État.
Troisièmement, je voulais évoquer la question de la réduction de la consommation. On peine vraiment à atteindre les objectifs en la matière, notamment s'agissant des bâtiments et de leur réhabilitation thermique. Au-delà du problème du financement – qui pourrait être réglé par un grand plan d'investissement de l'État –, identifiez-vous d'autres freins ? L'évolution est très lente. Il faut y remédier car la diminution de la consommation influe directement sur le pouvoir d'achat des citoyens.
Quatrièmement, j'ai noté votre volonté de développer l'hydroélectricité. Comme vous vous en doutiez, cela ne m'a pas échappé… Quid de la nouvelle redevance pour les concessions sous le régime des délais glissants ? Avez-vous statué ? Le décret est-il sorti ? J'ai déjà eu l'occasion de vous dire qu'un point d'équilibre intermédiaire serait plus satisfaisant et permettrait de développer aussi l'investissement.
Les opérateurs ont également souligné la difficulté de réaliser de nouveaux développements dans le cadre des concessions déjà attribuées : c'est la question des suréquipements. Ces derniers se heurtent à une difficulté juridique, liée au fait que la disposition de la loi de programme fixant les orientations de la politique énergétique (POPE) qui permettait des augmentations de puissance jusqu'à 20 % dans les concessions en cours a été supprimée en 2016 lors de la transposition de la directive sur l'attribution de contrats de concession. Ce n'est pas de votre fait, monsieur le ministre d'État, mais il s'agit là d'une entrave au développement de l'hydroélectricité, alors même que de tels investissements seraient vertueux car ils ne porteraient pas du tout atteinte à l'environnement : l'enjeu est simplement d'augmenter la capacité. Je crois vraiment qu'il y a là une piste qui permettrait de déclencher rapidement de l'investissement et d'optimiser la production d'hydroélectricité, sans pour autant créer de nouvelles infrastructures. Il convient donc d'étudier la question. J'ai soulevé le problème à Bruxelles, lors de notre dernier rendez-vous avec Dominique Ristori, directeur général de l'énergie. Celui-ci était plutôt d'accord pour considérer qu'il faut débloquer la situation.
Je ne vous parlerai pas du renouvellement des concessions – vous connaissez toutes et tous mon avis sur le sujet –, mais si nous le facilitions, cela permettrait à nos opérateurs de débloquer des investissements importants. De nombreux projets sortiraient rapidement des cartons, augmentant ainsi la production de cette énergie renouvelable qui est, je crois que tout le monde s'accorde à le dire, la plus vertueuse – et, en tout cas, la première de nos énergies renouvelables.
J'évoquerai, pour terminer, le développement des filières françaises, notamment dans le domaine du photovoltaïque. Nous avons quelques entreprises qui peinent à passer le cap de la production de masse. Elles ont des demandes, mais n'arrivent pas à y répondre parce qu'il faut changer les modes de production et se diriger vers la massification. L'État est-il prêt à aider à la création et au développement de filières françaises, pour que nous ne soyons pas obligés d'installer des panneaux photovoltaïques venant de très loin, ce qui a un coût carbone réduisant la vertu de leur installation ?