Nous avons multiplié les accords de libre-échange dans le passé, dont les conséquences sont, hélas, multiples et néfastes. Le dumping et la libéralisation affectent nos entreprises, notre souveraineté, notre budget et surtout notre environnement. Je souhaiterais revenir sur deux sujets auxquels je tiens particulièrement : l'agriculture et la transition écologique.
L'agriculture française est passée de 90 à 180 milliards d'euros de produits importés entre 2000 et 2016 et l'excédent agricole français a été divisé par deux entre 2011 et 2017. À ce rythme de décroissance, notre pays connaîtra son premier déficit agricole en 2023. Malheureusement la politique agricole commune reste un instrument inégalitaire qui favorise les grandes entreprises agricoles. Les clauses de sauvegarde commerciales ne sont jamais vraiment mobilisées en matière agricole, par manque de volonté politique de la part de la Commission et à défaut d'un dispositif efficace de suivi des marchés.
Concernant la transition écologique, les références aux engagements environnement restent souvent limitées à des déclarations non contraignantes dans les accords commerciaux, aucune sanction n'étant envisagée en cas de manquement. Le cas de l'accord entre l'Union européenne et l'Indonésie est emblématique : cette dernière, malgré son engagement réaffirmé en faveur de l'Accord de Paris, a porté devant l'organe de règlement des différends de l'Organisation mondiale du commerce la décision européenne visant à restreindre l'importation d'huile de palme. L'huile de palme est pourtant fortement émettrice de CO², responsable de la déforestation, porte atteinte à la biodiversité et augmente la vulnérabilité des sols. Cependant, l'Union européenne est incapable de procéder à des restrictions de son importation. Une meilleure défense commerciale aurait des effets positifs sur notre marché, permettant par exemple un revenu décent pour nos agriculteurs, de lutter contre le travail forcé et la déforestation et de limiter les émissions de carbone et de méthane.
Dans le cadre de sa Présidence du Conseil de l'Union, la France doit renforcer la politique commerciale européenne plutôt que de négocier de nouveaux accords commerciaux. Elle doit prémunir l'Europe contre les législations extraterritoriales américaines et pousser des législations, comme la loi Potier sur le devoir de vigilance, contre l'accaparement des terres agricoles et pour le renforcement du devoir de vigilance au niveau européen. La France doit s'assurer que les produits importés soient soumis aux standards européens. De tels projets pourraient-ils être annoncés par la Commission ? Le temps presse.